Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 394348, lecture du 8 juin 2016

Analyse n° 394348
8 juin 2016
Conseil d'État

N° 394348
Publié au recueil Lebon

Lecture du mercredi 8 juin 2016



26-01-01-015 : Droits civils et individuels- État des personnes- Nationalité- Perte de la nationalité-

Sanction de déchéance de nationalité (art. 25 C. Civ.) (1) - 1) Détermination dans le temps des règles applicables - Cas d'un texte fixant les délais dans lesquels une sanction administrative peut être prononcée - a) Principe (2) - b) Application à la déchéance de nationalité - 2) Contentieux - a) Nature du contentieux - Excès de pouvoir (3) - b) Contrôle du juge de l'excès de pouvoir - Contrôle de proportionnalité de la sanction (4) - c) Opérance du moyen tiré de l'art. 8 de la convention EDH - Absence s'agissant du droit au respect de la vie familiale (5) - Existence s'agissant du droit au respect de la vie privée (6).




1) a) Si, en matière d'édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les faits constitutifs de manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date où ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. Il en va ainsi des textes fixant les délais dans lesquels une sanction administrative peut être prononcée sauf si les délais antérieurement applicables étaient expirés avant leur entrée en vigueur. b) La loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 a porté de dix à quinze ans le délai fixé à l'article 25-1 du code civil (C. civ.) dans lequel la déchéance de la nationalité peut être prononcée à compter de la perpétration des faits à l'origine de la condamnation pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme. A la date de l'entrée en vigueur de cette loi, le délai de dix ans antérieurement applicable dans lequel la sanction de déchéance de la nationalité pouvait être prononcée à l'encontre du requérant n'était pas expiré. Application du délai prévu par l'article 25-1 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 23 janvier 2006. 2) a) La contestation de la sanction de déchéance de nationalité prononcée par décret sur le fondement de l'article 25 du code civil relève de l'excès de pouvoir. b) Le juge de l'excès de pouvoir exerce un entier contrôle sur la proportionnalité de la sanction de déchéance de nationalité. c) Un décret portant déchéance de la nationalité française est par lui-même dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille, et n'affecte pas, dès lors, le droit au respect de sa vie familiale. En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée garanti par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention EDH).





26-055-01-08-01 : Droits civils et individuels- Convention européenne des droits de l'homme- Droits garantis par la convention- Droit au respect de la vie privée et familiale (art- )- Champ d'application-

Sanction de déchéance de nationalité - Droit au respect de la vie familiale - Exclusion (5) - Droit au respect de la vie privée - Inclusion (6).




Un décret portant déchéance de la nationalité française est par lui-même dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille, et n'affecte pas, dès lors, le droit au respect de sa vie familiale. En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée garanti par l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention EDH).





54-02-01-01 : Procédure- Diverses sortes de recours- Recours pour excès de pouvoir- Recours ayant ce caractère-

Contestation d'une déchéance de nationalité prononcée par décret (art. 25 C. Civ.) (3).




La contestation de la sanction de déchéance de nationalité prononcée par décret sur le fondement de l'article 25 du code civil (C. civ.) relève de l'excès de pouvoir.





54-07-01-04-03 : Procédure- Pouvoirs et devoirs du juge- Questions générales- Moyens- Moyens inopérants-

1) Existence - Moyen tiré de ce qu'une sanction de déchéance de nationalité porte atteinte au droit au respect de la vie familiale (art. 8 CEDH) (5) - 2) Absence - Moyen tiré de ce qu'une sanction de déchéance de nationalité porte atteinte au droit au respect de la vie privée (art. 8 CEDH) (6).




1) Un décret portant déchéance de la nationalité française est par lui-même dépourvu d'effet sur la présence sur le territoire français de celui qu'il vise, comme sur ses liens avec les membres de sa famille, et n'affecte pas, dès lors, le droit au respect de sa vie familiale. 2) En revanche, un tel décret affecte un élément constitutif de l'identité de la personne concernée et est ainsi susceptible de porter atteinte au droit au respect de sa vie privée garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention EDH).





59-02-02 : Répression- Domaine de la répression administrative Régime de la sanction administrative-

Détermination dans le temps des règles applicables - Cas d'un texte fixant les délais dans lesquels une sanction administrative peut être prononcée (2).




Si, en matière d'édiction de sanction administrative, sont seuls punissables les faits constitutifs de manquement à des obligations définies par des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur à la date ou ces faits ont été commis, en revanche, et réserve faite du cas où il en serait disposé autrement, s'appliquent immédiatement les textes fixant les modalités des poursuites et les formes de la procédure, alors même qu'ils conduisent à réprimer des manquements commis avant leur entrée en vigueur. Il en va ainsi des textes fixant les délais dans lesquels une sanction administrative peut être prononcée sauf si les délais antérieurement applicables étaient expirés avant leur entrée en vigueur.


(1)Cf. décisions du même jour, M. , n° 394350, inédite au Recueil ; M. , n° 394352, inédite au Recueil ; M. , n° 394354, inédite au Recueil ; M. , n° 394356, inédite au Recueil. (2)Cf. CE, Section, 17 novembre 2006, Société CNP Assurances, n° 276926, p. 473. (3)Comp. CE, Assemblée, 16 février 2009, Société ATOM, n° 274000, p. 25. Rappr. CE, Section, 22 juin 2007, Arfi, n° 272650, p. 263 ; CE, 2 mars 2010, Fédération française d'athlétisme, n° 324439, T. pp. 894-925 ; CE, 5 mai 2011, , n° 326084, p. 246. (4)Cf. CE, Assemblée, 20 mars 1964, Sieur et Dame Konarkowski, p. 196 ; CE, Section, 10 mars 1995, de Sousa, n° 123136, p. 125. Comp., s'agissant du contrôle exercé par ailleurs sur les conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'intéressé, CE, 18 juin 2003, , n° 251299, aux Tables sur un autre point. (5) Cf., sur ce point, CE, 18 juin 2003, , n° 251299, aux Tables sur un autre point. (6)Ab. jur., sur ce point, CE, 18 juin 2003, , n° 251299, aux Tables sur un autre point.

Voir aussi