Base de jurisprudence


Analyse n° 389711
13 janvier 2017
Conseil d'État

N° 389711
Publié au recueil Lebon

Lecture du vendredi 13 janvier 2017



37-05-02-01 : Juridictions administratives et judiciaires- Exécution des jugements- Exécution des peines- Service public pénitentiaire-

Conditions de détention - Caractère attentatoire à la dignité - 1) Appréciation - Eléments à prendre en compte - 2) Caractérisation d'une atteinte à la dignité - a) Circonstance seule de nature à révéler une faute de l'administration (1) - Existence - b) Atteinte de nature à causer par elle-même un préjudice moral - Existence (2) - 3) Espèce - a) Cas de surpopulation carcérale - Existence d'une atteinte - Absence, le requérant n'ayant jamais bénéficié d'un espace inférieur à 3 mètres carrés et les cellules occupées ayant été récemment rénovées - b) Possibilité pour le juge de prendre en compte la seule brièveté de l'atteinte à la dignité pour exclure tout préjudice moral - Absence (3).




1) En raison de la situation d'entière dépendance des personnes détenues vis-à-vis de l'administration pénitentiaire, l'appréciation du caractère attentatoire à la dignité des conditions de détention dépend notamment de leur vulnérabilité, appréciée compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de leur personnalité et, le cas échéant, de leur handicap, ainsi que de la nature et de la durée des manquements constatés et des motifs susceptibles de justifier ces manquements eu égard aux exigences qu'impliquent le maintien de la sécurité et du bon ordre dans les établissements pénitentiaires ainsi que la prévention de la récidive. Les conditions de détention s'apprécient au regard de l'espace de vie individuel réservé aux personnes détenues, de la promiscuité engendrée, le cas échéant, par la sur-occupation des cellules, du respect de l'intimité à laquelle peut prétendre tout détenu, dans les limites inhérentes à la détention, de la configuration des locaux, de l'accès à la lumière, de l'hygiène et de la qualité des installations sanitaires et de chauffage. 2) a) Seules des conditions de détention qui porteraient atteinte à la dignité humaine, appréciées à l'aune de ces critères et des dispositions des articles D. 349 à D. 351 du CPP, révèlent l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique. b) Une telle atteinte, si elle est caractérisée, est de nature à engendrer, par elle-même, un préjudice moral pour la personne qui en est la victime. 3) a) Tribunal administratif ayant relevé qu'en dépit de la sur-occupation des cellules successivement occupées par le requérant, celui-ci n'avait jamais bénéficié d'un espace individuel inférieur à trois mètres carrés et que dix-sept des dix-huit cellules qu'il a occupées avaient fait l'objet de travaux récents de rénovation, ayant notamment permis de réaliser un cloisonnement partiel des toilettes. En déduisant de ces constatations que les conditions de détention de l'intéressé n'avaient pas porté atteinte à la dignité humaine pendant la période correspondant à l'occupation de ces dix-sept cellules, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'inexacte qualification juridique des faits. b) Personne détenue dans des conditions attentatoires à la dignité humaine. En excluant tout préjudice subi du fait de la seule brièveté de la durée d'incarcération dans ces conditions, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.





60-02-091 : Responsabilité de la puissance publique- Responsabilité en raison des différentes activités des services publics- Services pénitentiaires-

Conditions de détention - Caractère attentatoire à la dignité - 1) Appréciation - Eléments à prendre en compte - 2) Caractérisation d'une atteinte à la dignité - a) Circonstance seule de nature à révéler une faute de l'administration (1) - Existence - b) Atteinte de nature à causer par elle-même un préjudice moral - Existence (2) - 3) Espèce - a) Cas de surpopulation carcérale - Existence d'une atteinte - Absence, le requérant n'ayant jamais bénéficié d'un espace inférieur à 3 mètres carrés et les cellules occupées ayant été récemment rénovées - b) Possibilité pour le juge de prendre en compte la seule brièveté de l'atteinte à la dignité pour exclure tout préjudice moral - Absence (3).




1) En raison de la situation d'entière dépendance des personnes détenues vis-à-vis de l'administration pénitentiaire, l'appréciation du caractère attentatoire à la dignité des conditions de détention dépend notamment de leur vulnérabilité, appréciée compte tenu de leur âge, de leur état de santé, de leur personnalité et, le cas échéant, de leur handicap, ainsi que de la nature et de la durée des manquements constatés et des motifs susceptibles de justifier ces manquements eu égard aux exigences qu'impliquent le maintien de la sécurité et du bon ordre dans les établissements pénitentiaires ainsi que la prévention de la récidive. Les conditions de détention s'apprécient au regard de l'espace de vie individuel réservé aux personnes détenues, de la promiscuité engendrée, le cas échéant, par la sur-occupation des cellules, du respect de l'intimité à laquelle peut prétendre tout détenu, dans les limites inhérentes à la détention, de la configuration des locaux, de l'accès à la lumière, de l'hygiène et de la qualité des installations sanitaires et de chauffage. 2) a) Seules des conditions de détention qui porteraient atteinte à la dignité humaine, appréciées à l'aune de ces critères et des dispositions des articles D. 349 à D. 351 du CPP, révèlent l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique. b) Une telle atteinte, si elle est caractérisée, est de nature à engendrer, par elle-même, un préjudice moral pour la personne qui en est la victime. 3) a) Tribunal administratif ayant relevé qu'en dépit de la sur-occupation des cellules successivement occupées par le requérant, celui-ci n'avait jamais bénéficié d'un espace individuel inférieur à trois mètres carrés et que dix-sept des dix-huit cellules qu'il a occupées avaient fait l'objet de travaux récents de rénovation, ayant notamment permis de réaliser un cloisonnement partiel des toilettes. En déduisant de ces constatations que les conditions de détention de l'intéressé n'avaient pas porté atteinte à la dignité humaine pendant la période correspondant à l'occupation de ces dix-sept cellules, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'inexacte qualification juridique des faits. b) Personne détenue dans des conditions attentatoires à la dignité humaine. En excluant tout préjudice subi du fait de la seule brièveté de la durée d'incarcération dans ces conditions, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.


(1) Cf., en supprimant le critère de la protection de l'intérêt des victimes, CE, Section, 6 décembre 2013, M. Thévenot, n° 363290, p. 309 ; CE, juge des référés, 30 juillet 2015, Section française de l'Observatoire international des prisons et ordre des avocats au barreau de Nîmes, n°s 392043 392044, p. 305. (2) Cf. CE, 5 juin 2015, M. Langlet, n° 370896, T. pp. 741-869. (3) Cf. décisions du même jour, M. Vianen, n° 389709, M. Niakaté, n° 389710, M. Lemetais, n° 389712, inédites au Recueil.