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Ariane Web: Conseil d'État 407989, lecture du 26 avril 2018

Analyse n° 407989
26 avril 2018
Conseil d'État

N° 407989
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du jeudi 26 avril 2018



04-01-005 : Aide sociale- Organisation de l'aide sociale- Détermination de la collectivité ayant la charge de l'aide-

Aide sociale à l'enfance - Prise en charge des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins trois ans - 1) Compétence de principe du département, y compris s'agissant de l'hébergement - Compétence supplétive de l'Etat (1) - 2) Obligations du département face à une situation d'urgence - Protection des mineurs qu'il doit prendre en charge, nonobstant l'absence d'évaluation préalable et de recueil des informations préoccupantes.




1) S'il résulte des articles L. 121-7, L. 345-1, L. 345-2 et L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles (CASF) que sont en principe à la charge de l'Etat les mesures d'aide sociale relatives à l'hébergement des personnes qui connaissent de graves difficultés, notamment économiques ou de logement, ainsi que l'hébergement d'urgence des personnes sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale, il résulte des articles L. 221-1, L. 222-1, L. 222-5 et L. 221-2 du même code que la prise en charge, qui inclut l'hébergement, le cas échéant en urgence, des femmes enceintes ou des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile, incombe au département en vertu de l'article L. 222-5 du CASF. Si toute personne peut s'adresser au service intégré d'accueil et d'orientation prévu par l'article L. 345-2 du même code et si l'Etat ne pourrait légalement refuser à ces femmes un hébergement d'urgence au seul motif qu'il incombe en principe au département d'assurer leur prise en charge, l'intervention de l'Etat ne revêt qu'un caractère supplétif, dans l'hypothèse où le département n'aurait pas accompli les diligences qui lui reviennent, et ne fait d'ailleurs pas obstacle à ce que puisse être recherchée la responsabilité du département en cas de carence avérée et prolongée. 2) Si l'article L. 223-1 du CASF prévoit que l'attribution d'une prestation d'aide sociale à l'enfance "est précédée d'une évaluation de la situation prenant en compte l'état du mineur, la situation de la famille et les aides auxquelles elle peut faire appel dans son environnement", ces dispositions ne s'opposent pas à ce que le service de l'aide sociale à l'enfance réalise en urgence des actions de protection nécessaires à l'égard des personnes qu'il doit prendre en charge, ainsi que le prévoit le 3° de l'article L. 221-1 du même code. En outre, il ne résulte pas des dispositions des articles L. 226-3 et R. 226-2-2 du même code, qui prévoient le recueil, le traitement et l'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, que la compétence du département au titre de l'aide sociale à l'enfance pourrait être limitée aux situations dans lesquelles un enfant a fait l'objet d'une telle information.





04-02-02 : Aide sociale- Différentes formes d'aide sociale- Aide sociale à l'enfance-

Prise en charge des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins trois ans - 1) Compétence de principe du département, y compris s'agissant de l'hébergement - Compétence supplétive de l'Etat (1) - 2) Obligations du département face à une situation d'urgence - Protection des mineurs qu'il doit prendre en charge, nonobstant l'absence d'évaluation préalable et de recueil des informations préoccupantes.




1) S'il résulte des articles L. 121-7, L. 345-1, L. 345-2 et L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles (CASF) que sont en principe à la charge de l'Etat les mesures d'aide sociale relatives à l'hébergement des personnes qui connaissent de graves difficultés, notamment économiques ou de logement, ainsi que l'hébergement d'urgence des personnes sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale, il résulte des articles L. 221-1, L. 222-1, L. 222-5 et L. 221-2 du même code que la prise en charge, qui inclut l'hébergement, le cas échéant en urgence, des femmes enceintes ou des mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile, incombe au département en vertu de l'article L. 222-5 du CASF. Si toute personne peut s'adresser au service intégré d'accueil et d'orientation prévu par l'article L. 345-2 du même code et si l'Etat ne pourrait légalement refuser à ces femmes un hébergement d'urgence au seul motif qu'il incombe en principe au département d'assurer leur prise en charge, l'intervention de l'Etat ne revêt qu'un caractère supplétif, dans l'hypothèse où le département n'aurait pas accompli les diligences qui lui reviennent, et ne fait d'ailleurs pas obstacle à ce que puisse être recherchée la responsabilité du département en cas de carence avérée et prolongée. 2) Si l'article L. 223-1 du CASF prévoit que l'attribution d'une prestation d'aide sociale à l'enfance "est précédée d'une évaluation de la situation prenant en compte l'état du mineur, la situation de la famille et les aides auxquelles elle peut faire appel dans son environnement", ces dispositions ne s'opposent pas à ce que le service de l'aide sociale à l'enfance réalise en urgence des actions de protection nécessaires à l'égard des personnes qu'il doit prendre en charge, ainsi que le prévoit le 3° de l'article L. 221-1 du même code. En outre, il ne résulte pas des dispositions des articles L. 226-3 et R. 226-2-2 du même code, qui prévoient le recueil, le traitement et l'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être, que la compétence du département au titre de l'aide sociale à l'enfance pourrait être limitée aux situations dans lesquelles un enfant a fait l'objet d'une telle information.


(1) Rappr. CE, 27 juillet 2016, Département du Nord c/ M. Badiaga, n° 400055, p. 387 ; CE, 8 novembre 2017, Groupement d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI) et autres, n° 406256, T. pp. 458-460.

Voir aussi