Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 412074, lecture du 18 juin 2018

Analyse n° 412074
18 juin 2018
Conseil d'État

N° 412074
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du lundi 18 juin 2018



56-01 : Radio et télévision- Conseil supérieur de l'audiovisuel-

Sanction prononcée contre la société C8 en raison d'une séquence de l'émission "Touche pas à mon poste" du 3 novembre 2016 - Méconnaissance de l'article 2-3-4 de la convention de service - Absence - Conséquence - Illégalité de la sanction (1).




Le 3 novembre 2016, au cours de l'émission "Touche pas à mon poste", ont été diffusées plusieurs séquences tournées selon le principe courant de la "caméra cachée" mettant en scène l'animateur et des chroniqueurs de l'émission censés avoir été filmés à leur insu. En particulier, lors de la séquence ayant donné lieu à la sanction attaquée, l'animateur et le chroniqueur ont été montrés se rendant chez un tiers, en réalité un acteur se faisant passer pour un producteur américain avec lequel l'animateur venait négocier le passage dans l'émission d'un acteur vedette. La discussion s'étant tendue, le producteur et son comparse ont eu une altercation au cours de laquelle le second est tombé, apparemment inanimé. L'animateur et son garde du corps ont ensuite tenté de dissuader le chroniqueur d'appeler la police et de le contraindre à endosser la responsabilité de l'incident qui ne lui était cependant en rien imputable. Le chroniqueur, qui a été présenté comme n'ayant été avisé que le lendemain qu'il s'agissait d'une mise en scène, est apparu, tout au moins initialement, déstabilisé par le comportement de l'animateur, mais faisant preuve de sang-froid, appelant la police, alors qu'il lui était demandé avec insistance de n'en rien faire, et se préoccupant à plusieurs reprises de l'état de la prétendue victime avec qui il a partagé un repas après qu'elle a repris ses esprits. Eu égard à son comportement tout au long de la séquence, il n'a pas été montré sous un jour dégradant, humiliant ou attentatoire à sa dignité. Dès lors, la diffusion de cette séquence, à laquelle le chroniqueur a consenti et qu'il a lui-même accepté de commenter, ne révèle, contrairement à ce qu'a estimé le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et eu égard au caractère humoristique de l'émission et à la protection qui s'attache à la liberté d'expression en vertu des articles 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH), aucune méconnaissance des stipulations de l'article 2-3-4 de la convention du service C8. Par suite, annulation de la décision, prononcée par le CSA à l'encontre de la société C8, en sa qualité d'éditeur du service, d'interdiction de diffuser des séquences publicitaires, pendant une durée d'une semaine, au sein de l'émission en cause et pendant les quinze minutes précédant et suivant la diffusion de cette émission.





59-02-02-03 : Répression- Domaine de la répression administrative Régime de la sanction administrative- Bienfondé-

Sanction prononcée par le CSA à l'encontre la société C8 en raison d'une séquence de l'émission "Touche pas à mon poste" du 3 novembre 2016 - Méconnaissance de l'article 2-3-4 de la convention de service - Absence - Conséquence - Illégalité de la sanction (1).




Le 3 novembre 2016, au cours de l'émission "Touche pas à mon poste", ont été diffusées plusieurs séquences tournées selon le principe courant de la "caméra cachée" mettant en scène l'animateur et des chroniqueurs de l'émission censés avoir été filmés à leur insu. En particulier, lors de la séquence ayant donné lieu à la sanction attaquée, l'animateur et le chroniqueur ont été montrés se rendant chez un tiers, en réalité un acteur se faisant passer pour un producteur américain avec lequel l'animateur venait négocier le passage dans l'émission d'un acteur vedette. La discussion s'étant tendue, le producteur et son comparse ont eu une altercation au cours de laquelle le second est tombé, apparemment inanimé. L'animateur et son garde du corps ont ensuite tenté de dissuader le chroniqueur d'appeler la police et de le contraindre à endosser la responsabilité de l'incident qui ne lui était cependant en rien imputable. Le chroniqueur, qui a été présenté comme n'ayant été avisé que le lendemain qu'il s'agissait d'une mise en scène, est apparu, tout au moins initialement, déstabilisé par le comportement de l'animateur, mais faisant preuve de sang-froid, appelant la police, alors qu'il lui était demandé avec insistance de n'en rien faire, et se préoccupant à plusieurs reprises de l'état de la prétendue victime avec qui il a partagé un repas après qu'elle a repris ses esprits. Eu égard à son comportement tout au long de la séquence, il n'a pas été montré sous un jour dégradant, humiliant ou attentatoire à sa dignité. Dès lors, la diffusion de cette séquence, à laquelle le chroniqueur a consenti et qu'il a lui-même accepté de commenter, ne révèle, contrairement à ce qu'a estimé le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et eu égard au caractère humoristique de l'émission et à la protection qui s'attache à la liberté d'expression en vertu des articles 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH), aucune méconnaissance des stipulations de l'article 2-3-4 de la convention du service C8. Par suite, annulation de la décision, prononcée par le CSA à l'encontre de la société C8, en sa qualité d'éditeur du service, d'interdiction de diffuser des séquences publicitaires, pendant une durée d'une semaine, au sein de l'émission en cause et pendant les quinze minutes précédant et suivant la diffusion de cette émission.


(1) Cf. sol. contr. CE, décisions du même jour, Société C8, n°s 412071 et 414532, à mentionner aux Tables.

Voir aussi