Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 414532, lecture du 18 juin 2018

Analyse n° 414532
18 juin 2018
Conseil d'État

N° 414532
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du lundi 18 juin 2018



56-01 : Radio et télévision- Conseil supérieur de l'audiovisuel-

Sanction à l'encontre la société C8 pour une séquence de l'émission "TPMP! Baba hot line" du 18 mai 2017 - Méconnaissance des articles 2-3-3 et 2-3-4 de la convention de service - Existence - Atteinte disproportionnée à la liberté d'expression - Absence (1).




Emission "TPMP ! Baba hot line" diffusée le 18 mai 2017 à partir de 23h05 par le service C8 durant laquelle l'animateur a diffusé en direct les conversations téléphoniques qu'il a eues avec des personnes des deux sexes, mais très majoritairement de sexe masculin, répondant à une fausse petite annonce préalablement publiée sur un site de rencontres et présentant l'auteur de l'annonce comme bisexuel. En l'absence de tout procédé technique destiné à rendre méconnaissables les voix des personnes mises à l'antenne, sans qu'elles y aient consenti ni même qu'elles aient été avisées de la diffusion de conversations qu'elles pouvaient au contraire légitimement croire particulières, ces personnes ont été exposées au risque d'être reconnues, notamment par des membres de leur famille ou de leur entourage, eu égard notamment à certaines informations personnelles qu'elles avaient été engagées à livrer, concernant par exemple leur lieu de résidence, leur âge ou leur profession. L'animateur a incité ces personnes à tenir des propos d'une crudité appuyée dévoilant leur intimité et exposant leur vie privée alors même qu'elles ne pouvaient imaginer que leurs propos seraient diffusés publiquement. Par ailleurs, l'animateur a constamment adopté, à cette occasion, une attitude visant à donner une image caricaturale des homosexuels qui ne peut qu'encourager les préjugés et la discrimination à leur encontre. Compte tenu de la nature et de la gravité de ces faits, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) a pu légalement estimer qu'ils devaient être regardés, sans qu'y fasse obstacle le caractère humoristique de l'émission, comme une méconnaissance des prescriptions des articles 2-3-3 et 2-3-4 de la convention du service C8, et justifiaient ainsi une sanction. Eu égard tant aux pouvoirs dévolus au CSA, auquel le législateur a confié la mission de veiller à ce que les programmes audiovisuels donnent une image de la société française exempte de préjugés, qu'à la nature des faits décrits ci-dessus au regard des obligations qui s'imposent à la société requérante, la décision de sanctionner cette dernière ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression, protégée tant par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 que par l'article 10 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH). En fixant à 3 millions d'euros le montant de la sanction pécuniaire infligée à la société C8, soit à peu près les deux tiers du plafond fixé par l'article 42-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 compte tenu du chiffre d'affaires de cette société, le CSA n'en a pas fait une inexacte application, eu égard à la gravité des manquements commis.





59-02-02-03 : Répression- Domaine de la répression administrative Régime de la sanction administrative- Bienfondé-

Sanction prononcée par le CSA à l'encontre la société C8 pour une séquence de l'émission "TPMP! Baba hot line" du 18 mai 2017 - Méconnaissance des articles 2-3-3 et 2-3-4 de la convention de service - Existence - Atteinte disproportionnée à la liberté d'expression - Absence (1).




Emission "TPMP ! Baba hot line" diffusée le 18 mai 2017 à partir de 23h05 par le service C8 durant laquelle l'animateur a diffusé en direct les conversations téléphoniques qu'il a eues avec des personnes des deux sexes, mais très majoritairement de sexe masculin, répondant à une fausse petite annonce préalablement publiée sur un site de rencontres et présentant l'auteur de l'annonce comme bisexuel. En l'absence de tout procédé technique destiné à rendre méconnaissables les voix des personnes mises à l'antenne, sans qu'elles y aient consenti ni même qu'elles aient été avisées de la diffusion de conversations qu'elles pouvaient au contraire légitimement croire particulières, ces personnes ont été exposées au risque d'être reconnues, notamment par des membres de leur famille ou de leur entourage, eu égard notamment à certaines informations personnelles qu'elles avaient été engagées à livrer, concernant par exemple leur lieu de résidence, leur âge ou leur profession. L'animateur a incité ces personnes à tenir des propos d'une crudité appuyée dévoilant leur intimité et exposant leur vie privée alors même qu'elles ne pouvaient imaginer que leurs propos seraient diffusés publiquement. Par ailleurs, l'animateur a constamment adopté, à cette occasion, une attitude visant à donner une image caricaturale des homosexuels qui ne peut qu'encourager les préjugés et la discrimination à leur encontre. Compte tenu de la nature et de la gravité de ces faits, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) a pu légalement estimer qu'ils devaient être regardés, sans qu'y fasse obstacle le caractère humoristique de l'émission, comme une méconnaissance des prescriptions des articles 2-3-3 et 2-3-4 de la convention du service C8, et justifiaient ainsi une sanction. Eu égard tant aux pouvoirs dévolus au CSA, auquel le législateur a confié la mission de veiller à ce que les programmes audiovisuels donnent une image de la société française exempte de préjugés, qu'à la nature des faits décrits ci-dessus au regard des obligations qui s'imposent à la société requérante, la décision de sanctionner cette dernière ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression, protégée tant par l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (DDHC) du 26 août 1789 que par l'article 10 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (Conv. EDH). En fixant à 3 millions d'euros le montant de la sanction pécuniaire infligée à la société C8, soit à peu près les deux tiers du plafond fixé par l'article 42-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 compte tenu du chiffre d'affaires de cette société, le CSA n'en a pas fait une inexacte application, eu égard à la gravité des manquements commis.


(1) Cf. CE, décision du même jour, Société C8, n° 412071, à mentionner aux Tables. Cf. sol. contr. CE, décision du même jour, Société C8, n° 412074, à mentionner aux Tables.

Voir aussi