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Ariane Web: Conseil d'État 439720, lecture du 27 mars 2020

Analyse n° 439720
27 mars 2020
Conseil d'État

N° 439720
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du vendredi 27 mars 2020



335 : Étrangers-

Centres de rétention administrative - Absence de fermeture temporaire pendant l'état d'urgence sanitaire (art. L. 3131-12 du code de la santé publique) - Atteinte manifestement grave et illégale aux droits au respect de la vie et à la protection de la santé ainsi qu'à la liberté d'aller et venir (art. L. 521-2 du CJA) - Absence au regard, d'une part, des conditions présentes de fonctionnement des CRA, d'autre part, des perspectives d'éloignement effectif du territoire à brève échéance.




Requérants demandant au juge des référés d'ordonner, dans le contexte de l'épidémie causée par la propagation du virus covid-19, la fermeture temporaire de l'ensemble des centres de rétention administrative (CRA) figurant sur la liste établie par l'arrêté du 30 mars 2011 modifié, jusqu'à la levée des mesures de confinement décidées pour lutter contre cette épidémie Il ne résulte pas de l'instruction que les conditions de fonctionnement des CRA, où le nombre de personnes retenues a diminué dans des proportions très importantes depuis que l'épidémie de covid-19 a atteint la France, seraient, dans les circonstances particulières du temps présent, susceptibles de porter par elles-mêmes atteinte, pour les personnes retenues comme pour les personnels appelées à servir dans les centres, au droit au respect de la vie ou au droit de recevoir les soins que requiert son état de santé. Il appartient, en tout état de cause, à l'autorité administrative, en particulier aux chefs des CRA responsables de l'ordre et de la sécurité dans les centres, de s'assurer, à l'intérieur du centre, du respect des consignes données pour lutter contre la propagation du virus et de prendre toute mesure propre à garantir le respect des libertés fondamentales en cause. En outre, le placement ou le maintien en rétention d'étrangers faisant l'objet d'une mesure ordonnant leur éloignement du territoire français ne saurait, sans méconnaître l'objet assigné par la loi à la mise en rétention, être décidé par l'autorité administrative lorsque les perspectives d'éloignement effectif du territoire à brève échéance sont inexistantes. A cet égard, il résulte des éléments versés dans le cadre de l'instruction de la présente demande en référé que l'autorité administrative a pu procéder, dans la période récente, à des éloignements du territoire, en dépit des restrictions mises par de nombreux Etats à l'entrée sur leur territoire de ressortissants de pays tiers et de la très forte diminution des transports aériens. Dans ces conditions, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que devrait être ordonnée, au motif d'une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, la fermeture temporaire de l'ensemble des CRA par la mesure de portée générale que demandent les organisations requérantes, alors que la loi donne au juge des libertés et de la détention compétence pour mettre fin à la rétention lorsqu'elle ne se justifie plus pour quelque motif que ce soit.




54-035-03 : Procédure- Procédures instituées par la loi du juin - Référé tendant au prononcé de mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale (art- L- du code de justice administrative)-

Conditions d'intervention du juge du référé-liberté - 1) Atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale pouvant résulter de l'action ou de la carence d'une personne publique - 2) Situation d'urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures à très bref délai - 3) Mesures susceptibles d'être ordonnées - a) Principe - Caractère provisoire - Exception - Absence de mesure provisoire susceptible de sauvegarder l'exercice de la liberté fondamentale - b) Inclusion - Mesures d'organisation des services - 4) Caractère manifestement illégal de l'atteinte - Appréciation tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a déjà prises.




1) Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative (CJA) qu'il appartient au juge des référés, lorsqu'il est saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 et qu'il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, résultant de l'action ou de la carence de cette personne publique, de prescrire les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte, 2) dès lors qu'existe une situation d'urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures de sauvegarde à très bref délai. 3) a) Ces mesures doivent, en principe, présenter un caractère provisoire, sauf lorsqu'aucune mesure de cette nature n'est susceptible de sauvegarder l'exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte. b) Sur le fondement de l'article L. 521-2, le juge des référés peut ordonner à l'autorité compétente de prendre, à titre provisoire, des mesures d'organisation des services placés sous son autorité, dès lors qu'il s'agit de mesures d'urgence qui lui apparaissent nécessaires pour sauvegarder, à très bref délai, la liberté fondamentale à laquelle il est gravement, et de façon manifestement illégale, porté atteinte. 4) Le caractère manifestement illégal de l'atteinte doit s'apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a déjà prises.




54-035-03-03-01-02 : Procédure- Procédures instituées par la loi du juin - Référé tendant au prononcé de mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale (art- L- du code de justice administrative)- Conditions d'octroi de la mesure demandée- Atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale- Atteinte grave et manifestement illégale-

Etat d'urgence sanitaire (art. L. 3131-12 du code de la santé publique) - Absence de fermeture des centres de rétention administrative - Atteinte manifestement grave et illégale aux droits au respect de la vie et à la protection de la santé ainsi qu'à la liberté d'aller et venir - Absence au regard, d'une part, des conditions présentes de fonctionnement des CRA, d'autre part, des perspectives d'éloignement effectif du territoire à brève échéance.




Requérants demandant au juge des référés d'ordonner, dans le contexte de l'épidémie causée par la propagation du virus covid-19, la fermeture temporaire de l'ensemble des centres de rétention administrative (CRA) figurant sur la liste établie par l'arrêté du 30 mars 2011 modifié, jusqu'à la levée des mesures de confinement décidées pour lutter contre cette épidémie Il ne résulte pas de l'instruction que les conditions de fonctionnement des CRA, où le nombre de personnes retenues a diminué dans des proportions très importantes depuis que l'épidémie de covid-19 a atteint la France, seraient, dans les circonstances particulières du temps présent, susceptibles de porter par elles-mêmes atteinte, pour les personnes retenues comme pour les personnels appelées à servir dans les centres, au droit au respect de la vie ou au droit de recevoir les soins que requiert son état de santé. Il appartient, en tout état de cause, à l'autorité administrative, en particulier aux chefs des CRA responsables de l'ordre et de la sécurité dans les centres, de s'assurer, à l'intérieur du centre, du respect des consignes données pour lutter contre la propagation du virus et de prendre toute mesure propre à garantir le respect des libertés fondamentales en cause. En outre, le placement ou le maintien en rétention d'étrangers faisant l'objet d'une mesure ordonnant leur éloignement du territoire français ne saurait, sans méconnaître l'objet assigné par la loi à la mise en rétention, être décidé par l'autorité administrative lorsque les perspectives d'éloignement effectif du territoire à brève échéance sont inexistantes. A cet égard, il résulte des éléments versés dans le cadre de l'instruction de la présente demande en référé que l'autorité administrative a pu procéder, dans la période récente, à des éloignements du territoire, en dépit des restrictions mises par de nombreux Etats à l'entrée sur leur territoire de ressortissants de pays tiers et de la très forte diminution des transports aériens. Dans ces conditions, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que devrait être ordonnée, au motif d'une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, la fermeture temporaire de l'ensemble des CRA par la mesure de portée générale que demandent les organisations requérantes, alors que la loi donne au juge des libertés et de la détention compétence pour mettre fin à la rétention lorsqu'elle ne se justifie plus pour quelque motif que ce soit.

Voir aussi