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Ariane Web: Conseil d'État 462383, lecture du 16 novembre 2022

Analyse n° 462383
16 novembre 2022
Conseil d'État

N° 462383
Publié au recueil Lebon

Lecture du mercredi 16 novembre 2022



19-04-02-01-04-083 : Contributions et taxes- Impôts sur les revenus et bénéfices- Revenus et bénéfices imposables règles particulières- Bénéfices industriels et commerciaux- Détermination du bénéfice net- Relations entre sociétés d'un même groupe-

Incorporation des bénéfices indirectement transférés à l'étranger (art. 57 du CGI) - Souscription d'OCA par une société française auprès d'une filiale étrangère dont elle détenait l'intégralité du capital - Etablissement par l'administration d'une minoration du taux de rémunération - Comparaison avec les prix pratiqués par des entreprises similaires exploitées normalement (1) - Taux inférieur à celui rémunérant normalement un financement obligataire - Correction de ce taux par une valorisation de l'option de conversion - Absence en l'espèce, sa valeur étant nulle (2).




Société ayant souscrit des obligations convertibles en actions (OCA) émises par une filiale dont elle détenait l'intégralité du capital. Administration ayant regardé la rémunération des obligations comme insuffisante et constitutive d'un transfert indirect de bénéfices à l'étranger au sens de l'article 57 du code général des impôts (CGI). Cour ayant constaté que le taux d'intérêt convenu était inférieur au taux rémunérant, en situation de pleine concurrence, un financement obligataire. Cour ayant considéré que l'octroi d'une option de conversion de ces titres en actions pouvait être valorisé à l'identique de l'octroi d'une même option octroyée dans le cadre d'une transaction entre sociétés dépourvues de liens capitalistiques. Cour en ayant déduit que le taux d'intérêt en litige, intégrant la valeur de cette option, n'était pas constitutif d'un transfert indirect de bénéfices à l'étranger. La situation née de l'octroi à l'actionnaire unique d'une société financée d'une option de conversion des obligations qu'il a souscrites en actions de cette dernière est, par nature, insusceptible d'être comparée à une situation de pleine concurrence, dès lors que la valeur de cette option, consistant exclusivement dans l'ouverture d'une faculté d'acquérir une fraction du capital social en remboursement du prêt obligataire consenti, est nécessairement nulle lorsque l'option est attribuée à la personne possédant, à la date de l'émission, l'intégralité de ce capital. En effet, cet actionnaire unique dispose du pouvoir de décider, à tout moment, de l'émission de nouveaux titres et leur attribution à son profit en remboursement du prêt obligataire qu'il a consenti à la société et, au surplus, l'opération de conversion est nécessairement neutre pour lui d'un point de vue patrimonial, dès lors qu'il possède, avant comme après celle-ci, la totalité du capital d'une société dont la valeur se trouve augmentée du montant de la dette dont elle s'est libérée, à exacte concurrence du montant de la créance dont il disposait sur celle-ci. Il s'ensuit que, pour l'application de l'article 57 du CGI, la transaction en litige doit, faute de pouvoir être comparée à une transaction similaire dans une situation de pleine concurrence, être regardée comme une opération de financement intragroupe rémunérée à un taux inférieur à la valeur vénale du service.


(1) Cf., en ce qui concerne les conditions dans lesquelles l'administration peut bénéficier de la présomption de l'article 57 du CGI, CE, Plénière, 27 juillet 1988, SARL Boutique 2M, n° 50020, p. 305, CE, 16 mars 2016, Société Amycel France, n° 372372, T. p. 740 . (2) Cf., s'agissant du principe selon lequel y a lieu, pour la société emprunteuse devant justifier de la déductibilité des intérêts qu'elle acquitte (I de l'art. 212 du CGI), de corriger le taux de référence des OCA émises pour tenir compte de l'option de conversion, CE, 20 septembre 2022, SASU HCL Maître Pierre, n° 455651, à mentionner aux Tables.

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