Base de jurisprudence


Analyse n° 497325
13 juin 2025
Conseil d'État

N° 497325
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du vendredi 13 juin 2025



66-02-02-02 : Travail et emploi- Conventions collectives- Extension des conventions collectives- Pouvoirs du ministre-

Motif d'intérêt général justifiant de refuser l'extension d'une convention ou d'un avenant (1) - Illustration - Motif tiré du caractère ambigu des obligations nées de cet avenant et des conditions de son entrée en vigueur.




Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 2261-15 du code du travail que le ministre chargé du travail, saisi d'une demande tendant à ce qu'il étende un accord collectif, doit s'assurer que cet accord ne comporte pas de clauses qui seraient contraires aux textes législatifs et réglementaires ou qui ne répondraient pas à la situation de la branche ou des branches dans le champ d'application de l'accord. Dans le cas où l'accord satisfait à ces exigences, le ministre n'est pas pour autant tenu de procéder à l'extension qui lui est demandée. Le premier alinéa de l'article L. 2261-25 du code du travail lui attribue à cet égard un pouvoir d'appréciation lui permettant de refuser cette extension, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, pour des motifs d'intérêt général. Requérante demandant l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté sa demande d'extension d'un avenant à un accord collectif, dont l'entrée en vigueur est subordonnée à l'obtention de l'intégralité des financements nécessaires à la mise en oeuvre des modalités de rémunération qu'il institue. Les stipulations de cet avenant ne déterminent pas clairement le niveau de financement nécessaire et la clef de répartition entre les différents financeurs, ces deux points faisant d'ailleurs l'objet d'interprétations divergentes entre les organisations signataires de l'avenant. L'équivocité de ces stipulations qui, en raison de l'incidence de la revalorisation des rémunérations prévue par l'avenant sur l'évolution de la masse salariale des employeurs relevant de son champ d'application, ne sauraient être distraites de l'accord sans en modifier l'économie générale, fait naître une ambiguïté quant à son applicabilité aux salariés et aux employeurs compris dans son champ d'application. Par suite, en retenant que ces stipulations étaient dépourvues de la clarté nécessaire pour garantir la sécurité juridique de l'entrée en vigueur de l'avenant en cause et en refusant pour ce motif d'intérêt général de l'étendre, le ministre chargé du travail n'a pas fait une inexacte application du pouvoir qu'il tient du premier alinéa de l'article L. 2261-25 du code du travail.


(1) Cf., sur la possibilité de refuser l'extension d'une convention pour un tel motif, CE, 21 novembre 2008, Syndicat national des cabinets de recouvrement de créances et de renseignements commerciaux et autres, n° 300135, p. 437.