Conseil d'État
N° 503317
Publié au recueil Lebon
Lecture du jeudi 17 juillet 2025
39 : Marchés et contrats administratifs-
Concession de service public - Règles relatives aux biens « de retour » (1) - 1) Application aux tiers au contrat - a) Principe - Absence - b) Exception - Cas où il existe des liens étroits entre le concessionnaire et le propriétaire d'un bien mis à la disposition du premier pour l'exécution de la concession - 2) Illustration - Concession relative à l'exploitation d'un casino - a) Circonstance que le bâtiment abritant le casino ait été mis à la disposition du concessionnaire par l'unique actionnaire de ce dernier - Incidence sur l'application de ces règles - Absence - b) Bâtiment nécessaire au service public - Existence (2).
1) Si les règles relatives aux biens dits « de retour » ne trouvent pas à s'appliquer aux biens qui sont la propriété d'un tiers au contrat de concession, quand bien même ils seraient affectés au fonctionnement du service public et nécessaires à celui-ci, 2) a) il en va différemment dans le cas où, d'une part, il existe des liens étroits entre les actionnaires ou les dirigeants du propriétaire du bien et du concessionnaire, lesquels permettent de regarder l'un comme exerçant une influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de l'autre ou de regarder l'un et l'autre comme étant placé sous le contrôle d'une même entreprise tierce et, d'autre part, le bien, exclusivement destiné à l'exécution du contrat de concession, a été mis par son propriétaire à la disposition du concessionnaire pour cette exécution. Dans un tel cas, le propriétaire du bien doit être regardé comme ayant consenti à ce que l'affectation du bien au fonctionnement du service public emporte son transfert dans le patrimoine de la personne publique, dans les conditions précédemment énoncées. 2) Commune ayant lancé une consultation en vue du renouvellement d'une concession relative à l'exploitation d'un casino et des services associés. Juge des référés ayant annulé cette procédure sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative (CJA). a) Le bâtiment abritant actuellement le casino est la propriété d'une société A, qui l'a acquis auprès de la commune en vue de l'aménager pour pouvoir exploiter le futur casino et qui le loue à la société B, dont elle détient l'intégralité du capital, par l'effet d'un bail commercial dont les stipulations prévoient expressément que l'activité exercée dans le bâtiment est l'exploitation d'un casino et des services associés. Dans ces conditions la circonstance que le bâtiment du casino n'était pas la propriété du concessionnaire ne faisait pas obstacle à ce qu'il fasse retour à la commune au terme de la convention. b) Si les jeux de casino ne constituent pas, par eux-mêmes, une activité de service public, la convention conclue pour leur installation et leur exploitation a pour objet, compte tenu des obligations imposées au cocontractant quant à, notamment, la prise en charge du financement d'infrastructures et de missions d'intérêt général en matière de développement économique, culturel et touristique et des conditions de sa rémunération substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation, de confier à ce cocontractant l'exécution d'un service public. Par suite, les biens nécessaires au fonctionnement du service public ainsi confié au cocontractant, alors même que des jeux de casino y sont installés, constituent des biens de retour et appartiennent à la personne publique contractante. Au cas présent, le bâtiment litigieux a été spécialement aménagé en vue d'y accueillir l'activité de casino et les services connexes prévus par le contrat de concession, de sorte qu'il est nécessaire au fonctionnement du service public.
(1) Cf., sur la portée de ces règles, CE, Section, 29 juin 2018, Ministre de l'intérieur c/ Communauté de communes de la vallée de l'Ubaye, n° 402251, p. 285. (2) Rappr., sur la qualification des murs d'un casino en biens de retour, CE, 23 janvier 2020, Société Touristique de la Trinité, n° 426421, inédite au Recueil, pt. 6.
N° 503317
Publié au recueil Lebon
Lecture du jeudi 17 juillet 2025
39 : Marchés et contrats administratifs-
Concession de service public - Règles relatives aux biens « de retour » (1) - 1) Application aux tiers au contrat - a) Principe - Absence - b) Exception - Cas où il existe des liens étroits entre le concessionnaire et le propriétaire d'un bien mis à la disposition du premier pour l'exécution de la concession - 2) Illustration - Concession relative à l'exploitation d'un casino - a) Circonstance que le bâtiment abritant le casino ait été mis à la disposition du concessionnaire par l'unique actionnaire de ce dernier - Incidence sur l'application de ces règles - Absence - b) Bâtiment nécessaire au service public - Existence (2).
1) Si les règles relatives aux biens dits « de retour » ne trouvent pas à s'appliquer aux biens qui sont la propriété d'un tiers au contrat de concession, quand bien même ils seraient affectés au fonctionnement du service public et nécessaires à celui-ci, 2) a) il en va différemment dans le cas où, d'une part, il existe des liens étroits entre les actionnaires ou les dirigeants du propriétaire du bien et du concessionnaire, lesquels permettent de regarder l'un comme exerçant une influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de l'autre ou de regarder l'un et l'autre comme étant placé sous le contrôle d'une même entreprise tierce et, d'autre part, le bien, exclusivement destiné à l'exécution du contrat de concession, a été mis par son propriétaire à la disposition du concessionnaire pour cette exécution. Dans un tel cas, le propriétaire du bien doit être regardé comme ayant consenti à ce que l'affectation du bien au fonctionnement du service public emporte son transfert dans le patrimoine de la personne publique, dans les conditions précédemment énoncées. 2) Commune ayant lancé une consultation en vue du renouvellement d'une concession relative à l'exploitation d'un casino et des services associés. Juge des référés ayant annulé cette procédure sur le fondement de l'article L. 551-1 du code de justice administrative (CJA). a) Le bâtiment abritant actuellement le casino est la propriété d'une société A, qui l'a acquis auprès de la commune en vue de l'aménager pour pouvoir exploiter le futur casino et qui le loue à la société B, dont elle détient l'intégralité du capital, par l'effet d'un bail commercial dont les stipulations prévoient expressément que l'activité exercée dans le bâtiment est l'exploitation d'un casino et des services associés. Dans ces conditions la circonstance que le bâtiment du casino n'était pas la propriété du concessionnaire ne faisait pas obstacle à ce qu'il fasse retour à la commune au terme de la convention. b) Si les jeux de casino ne constituent pas, par eux-mêmes, une activité de service public, la convention conclue pour leur installation et leur exploitation a pour objet, compte tenu des obligations imposées au cocontractant quant à, notamment, la prise en charge du financement d'infrastructures et de missions d'intérêt général en matière de développement économique, culturel et touristique et des conditions de sa rémunération substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation, de confier à ce cocontractant l'exécution d'un service public. Par suite, les biens nécessaires au fonctionnement du service public ainsi confié au cocontractant, alors même que des jeux de casino y sont installés, constituent des biens de retour et appartiennent à la personne publique contractante. Au cas présent, le bâtiment litigieux a été spécialement aménagé en vue d'y accueillir l'activité de casino et les services connexes prévus par le contrat de concession, de sorte qu'il est nécessaire au fonctionnement du service public.
(1) Cf., sur la portée de ces règles, CE, Section, 29 juin 2018, Ministre de l'intérieur c/ Communauté de communes de la vallée de l'Ubaye, n° 402251, p. 285. (2) Rappr., sur la qualification des murs d'un casino en biens de retour, CE, 23 janvier 2020, Société Touristique de la Trinité, n° 426421, inédite au Recueil, pt. 6.