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Ariane Web: Conseil d'État 382736, lecture du 8 juin 2016, ECLI:FR:CEASS:2016:382736.20160608

Décision n° 382736
8 juin 2016
Conseil d'État

N° 382736
ECLI:FR:CEASS:2016:382736.20160608
Publié au recueil Lebon
Assemblée
Mme Mireille Le Corre, rapporteur
Mme Suzanne von Coester, rapporteur public


Lecture du mercredi 8 juin 2016
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 382736, par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés le 18 juillet 2014, le 17 juillet 2015 et le 3 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. H...C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du Président de la République portant nomination de magistrats du 24 juin 2014 en tant qu'il nomme M. B...I...vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, le sursis à avis du Conseil supérieur de la magistrature du 22 mai 2014 portant sur sa nomination en qualité de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, l'avis non conforme émis par le Conseil supérieur de la magistrature le 25 juin 2014 sur sa nomination en tant que vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, du 20 juin 2014, de proposition de nomination de magistrats en tant qu'elle propose Mmes G...A..., F...J...et E...D...pour des emplois de magistrats instructeurs au tribunal de grande instance de Paris ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder à sa nomination en qualité de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris dans un délai d'un mois à compter de la décision du Conseil d'Etat, sous astreinte de 1 000 euros par semaine de retard.


2° Sous le n° 386701, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 24 décembre 2014 et le 17 juillet 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. H... C...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du Président de la République du 25 novembre 2014 portant nomination de magistrats, en tant qu'il nomme Mme L...K...vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris ;

2°) d'enjoindre à l'administration de procéder à sa nomination en tant que vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris dans un délai d'un mois à compter de la décision du Conseil d'Etat, sous astreinte de 1 000 euros par semaine de retard.


....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la Constitution, notamment ses articles 64 et 65 ;
- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le décret n° 93-21 du 7 janvier 1993;
- le décret n° 94-199 du 9 mars 1994 ;
- le code de justice administrative.


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Mireille Le Corre, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 31 mai 2016, présentée par M.C... ;


1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. H...C..., magistrat, a été nommé vice-président placé près le premier président de la cour d'appel de Paris, par décret du Président de la République du 21 août 2012, pour une prise de fonctions le 1er septembre 2012 ; qu'il s'est porté candidat, en vue des affectations de magistrats devant intervenir le 1er septembre 2014, pour occuper le poste de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, en se prévalant du bénéfice des dispositions du neuvième alinéa de l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature ; que le garde des sceaux, ministre de la justice a proposé sa nomination sur ce poste dans le cadre de la procédure dite de " transparence " du 28 février 2014 ; qu'après avoir, le 22 mai 2014, sursis à statuer, le Conseil supérieur de la magistrature a, par un avis du 25 juin 2014, émis un avis non conforme à cette nomination ; que, par décret portant nomination de magistrats du 24 juin 2014, le Président de la République a nommé M. B...I..., premier substitut à l'administration centrale au ministère de la justice, sur un poste vacant de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris ; que le garde des sceaux, ministre de la justice a proposé le 20 juin 2014 la nomination de MmesA..., J...et D...pour occuper des emplois de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris ; que, par décret du 25 novembre 2014 portant nomination de magistrats, le Président de la République a nommé Mme L...K...vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris ;

2. Considérant que, par des requêtes qu'il y a lieu de joindre, M. C...demande l'annulation pour excès de pouvoir des décrets du Président de la République des 24 juin et 25 novembre 2014 en tant qu'ils portent nomination, respectivement de M. I...et de Mme K..., des avis du Conseil supérieur de la magistrature des 22 mai et 25 juin 2014 portant sur sa nomination au poste de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction, et de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 20 juin 2014 proposant la nomination de MmesA..., J...etD... ;

3. Considérant qu'en vertu des articles R. 612-3 et R. 612-6 du code de justice administrative, d'une part, une mise en demeure peut être adressée à la partie appelée à produire un mémoire dans le cadre de l'instruction qui n'a pas respecté le délai qui lui a été imparti à cet effet et, d'autre part, si malgré une mise en demeure la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ; que si le Premier ministre et le garde des sceaux, ministre de la justice n'ont pas observé le délai imparti dans la mise en demeure qui leur a été adressée sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, ils ont produit des mémoires enregistrés avant que le Conseil d'Etat ne statue ; que dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le requérant, ils ne peuvent être regardés comme ayant acquiescé aux faits exposés dans les requêtes ;

Sur la décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 20 juin 2014 proposant la nomination de MmesA..., J...et D...sur des emplois de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 27-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Le projet de nomination à une fonction du premier ou du second grade et la liste des candidats à cette fonction sont communiqués pour les postes du siège ou pour ceux du parquet à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature./ Ce projet de nomination est adressé aux chefs de la Cour de cassation, aux chefs des cours d'appel et des tribunaux supérieurs d'appel, à l'inspecteur général des services judiciaires ainsi qu'aux directeurs et chefs de service de l'administration centrale du ministère de la justice, qui en assurent la diffusion auprès des magistrats en activité dans leur juridiction, dans le ressort de leur juridiction ou de leurs services. Ce document est adressé aux syndicats et organisations professionnelles représentatifs de magistrats et, sur leur demande, aux magistrats placés dans une autre position que celle de l'activité./ Toute observation d'un candidat relative à un projet de nomination est adressée au garde des sceaux, ministre de la justice, et au Conseil supérieur de la magistrature (....) " ; qu'aux termes de l'article 28 de la même ordonnance : " Les décrets de nomination aux fonctions de président d'un tribunal de grande instance ou d'un tribunal de première instance ou de conseiller référendaire à la Cour de cassation sont pris par le Président de la République sur proposition de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature./ Les décrets portant promotion de grade ou nomination aux fonctions de magistrat autres que celles mentionnées à l'alinéa précédent sont pris par le Président de la République sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour ce qui concerne les magistrats du siège et après avis de la formation compétente du Conseil supérieur pour ce qui concerne les magistrats du parquet. (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la proposition de nomination du garde des sceaux, ministre de la justice constitue un acte préparatoire au décret de nomination du Président de la République ; qu'une telle proposition n'a, dès lors, pas le caractère de décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il suit de là que M. C...n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 20 juin 2014, transmise par le garde des sceaux au Conseil supérieur de la magistrature, et proposant la nomination de MmesA..., J...etD... ; que ses conclusions dirigées contre cette décision doivent donc être rejetées ;

Sur le " sursis à avis " du Conseil supérieur de la magistrature du 22 mai 2014 :

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que dans sa séance du 22 mai 2014, le Conseil supérieur de la magistrature a sursis à statuer sur l'examen de la proposition de nomination de M. C...au poste de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, dans l'attente de pièces complémentaires, nécessaires à l'étude du dossier de l'intéressé, qui lui faisaient défaut ; qu'un avis non conforme a été rendu par le Conseil supérieur de la magistrature lors de sa séance du 25 juin 2014 ; qu'il résulte de ce qui précède que le " sursis à avis " du 22 mai 2014 constitue, dans les circonstances de l'espèce, une simple mesure préparatoire qui n'a pas le caractère d'une décision faisant grief ; que les conclusions de M. C...dirigées contre " ce sursis à avis " ne peuvent par suite qu'être rejetées ;

Sur le décret du Président de la République du 24 juin 2014 portant nomination de magistrats, en tant qu'il procède à la nomination de M.I... :

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le garde des sceaux, ministre de la justice a proposé deux candidats, respectivement M. C...et M.I..., sur deux postes distincts de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris qui étaient vacants dans le cadre de la procédure nationale de mouvement des magistrats ; que l'avis non conforme émis par le Conseil supérieur de la magistrature à la nomination de M. C...faisait obstacle à la nomination qui avait été proposée par le garde des sceaux, ministre de la justice ; que, dans les circonstances de l'espèce, M. C...ne justifie donc pas d'un intérêt à agir contre la nomination de M. I...à un poste identique à celui pour lequel il s'était porté candidat ; que les conclusions de M. C...dirigées contre le décret du Président de la République du 24 juin 2014 doivent donc être rejetées comme irrecevables ;

Sur l'avis non conforme du Conseil supérieur de la magistrature :

En ce qui concerne la légalité externe :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, que l'avis du 25 juin 2014 comporte les motifs ayant conduit le Conseil supérieur de la magistrature à émettre un avis non conforme à la candidature de M.C... ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que l'avis non conforme du 25 juin 2014 ne serait pas motivé manque en fait ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 39 du décret du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature : " (...). Le procès-verbal de chaque séance est arrêté par le président et contresigné par le secrétaire général, qui est chargé de le conserver. (...) " ; que M. C...ne saurait utilement soutenir que l'avis non conforme du Conseil supérieur de la magistrature du 25 juin 2014 qu'il attaque est entaché d'un vice de forme au motif qu'il a été précédé d'une délibération du 4 juin 2014 qui n'est pas revêtue de la signature et du contreseing nécessaires prévus par ces dispositions ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'aucune disposition ni aucun principe n'impose que le rapporteur initial de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature soit présent lors de la séance de délibération sur cet avis ; qu'il suit de là que le moyen tiré du vice de procédure tenant à l'absence, lors de la séance du 25 juin 2014, du membre de la formation initialement chargé de préparer le rapport relatif à sa nomination doit être écarté ;

11. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 38 du décret du 9 mars 1994 relatif au Conseil supérieur de la magistrature : " Pour les nominations sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice, le rapporteur de la formation compétente du conseil supérieur prend connaissance au ministère de la justice des dossiers des magistrats figurant sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article 17 de la loi organique du 5 février 1994 susvisée. (...) " ; que, par ailleurs, en application de l'article 21 du décret du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958, le magistrat dispose d'un délai de huit jours pour formuler des observations écrites sur les documents relatifs à l'évaluation de son activité professionnelle ; que M. C...soutient que le Conseil supérieur de la magistrature a délibéré au vu d'une évaluation le concernant sur laquelle il n'avait pas encore été mis à même de faire valoir des observations ; que, toutefois, il résulte des écritures du requérant que celui-ci n'a pas fait usage de son droit de formuler des observations ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de la magistrature s'est prononcé au vu du dossier du candidat comprenant ses différentes évaluations ; que le moyen, pris en ses deux branches, tiré de ce que l'avis aurait été émis au terme d'un dossier irrégulièrement constitué doit donc être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

12. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 64 de la Constitution : " Le Président de la République est garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire./ Il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature./ Une loi organique porte statut des magistrats./ Les magistrats du siège sont inamovibles. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 65 de la Constitution : " Le Conseil supérieur de la magistrature comprend une formation compétente à l'égard des magistrats du siège et une formation compétente à l'égard des magistrats du parquet " ; qu'aux termes du quatrième alinéa de ce même article : " La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, pour celles de premier président de cour d'appel et pour celles de président de tribunal de grande instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme. " ; qu'aux termes du dernier alinéa de cet article : " La loi organique détermine les conditions d'application du présent article. " ;

13. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " I. - Le corps judiciaire comprend : (...) 2° Les magistrats du siège et du parquet placés respectivement auprès du premier président et du procureur général d'une cour d'appel et ayant qualité pour exercer les fonctions du grade auquel ils appartiennent à la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés et dans l'ensemble des tribunaux de première instance du ressort de ladite cour " ; qu'aux termes de l'article 2 de cette même ordonnance : " La hiérarchie du corps judiciaire comprend deux grades (...) " ; qu'aux termes du neuvième alinéa de l'article 3-1 de la même ordonnance, qui prévoit la possibilité pour les magistrats mentionnés au 2° de l'article 1er d'exercer temporairement certaines fonctions à titre de remplacement ou de renfort : " Après deux ans d'exercice dans leurs fonctions et sur leur demande, ces magistrats sont nommés au tribunal de grande instance du siège de la cour d'appel à laquelle ils sont rattachés ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour. La nomination intervient sur le premier emploi vacant respectivement du siège ou du parquet du niveau hiérarchique auquel ces magistrats appartiennent et pour lequel ils se sont portés candidats, à l'exception des emplois de chef de juridiction, premier vice-président, premier vice-président adjoint, procureur de la République adjoint ou premier vice-procureur de la République des tribunaux de grande instance. " ;

14. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, qu'un magistrat ayant exercé les fonctions prévues par l'article 3-1 de l'ordonnance organique, a le droit, à l'issue d'un délai de deux ans dans l'exercice de ces fonctions et sur sa demande, d'être nommé au tribunal de grande instance du siège de la cour d'appel à laquelle il est rattaché ou au tribunal de grande instance le plus important du département où est située ladite cour ; qu'il a, en outre, vocation à être nommé, dans cette juridiction, sur le premier emploi vacant du niveau hiérarchique auquel il appartient et pour lequel il s'est porté candidat ; que l'administration est, en principe, tenue de proposer la nomination d'un magistrat qui se porte candidat à un tel emploi, lorsque sa candidature satisfait aux conditions posées par l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ;

15. Considérant, d'autre part, que l'exigence de l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature sur les nominations des magistrats du siège, prévue par l'article 65 de la Constitution, est une garantie essentielle de l'indépendance de l'autorité judiciaire et concourt au bon fonctionnement de l'institution judiciaire ;

16. Considérant que l'article 28 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 cité ci-dessus, auquel l'article 3-1 ne déroge pas, prévoit de façon générale que toute nomination d'un magistrat du siège est soumise à l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature ;

17. Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui précède qu'il appartient au Conseil supérieur de la magistrature de porter une appréciation sur toute proposition du garde des sceaux, ministre de la justice relative à la nomination d'un magistrat placé se prévalant du bénéfice des dispositions du neuvième alinéa de l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; qu'il lui appartient, dans cette appréciation, de tenir compte des droits que ce magistrat tire des dispositions de cet article et de prendre en considération les mérites intrinsèques du candidat ainsi que son adaptation au poste à pourvoir ; qu'il peut ainsi émettre un avis non conforme sur cette proposition s'il lui apparaît que la candidature au poste sollicité est inadéquate au regard des aptitudes de l'intéressé, révélées en particulier pendant la période durant laquelle il a exercé les fonctions de magistrat placé, des exigences déontologiques et des besoins de l'institution judiciaire ;

18. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que le Conseil supérieur de la magistrature peut légalement émettre un avis non conforme sur la proposition de nomination d'un magistrat du siège à un emploi déterminé, alors même que celui-ci remplirait par ailleurs les conditions posées par les dispositions du neuvième alinéa de l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'en délivrant le 25 juin 2014 un avis non conforme sur la candidature de M.C..., le Conseil supérieur de la magistrature aurait méconnu les dispositions du neuvième alinéa de l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 doit être écarté ;

19. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 4 du décret du 7 janvier 1993 pris pour l'application de l'ordonnance du 22 décembre 1958 : " Les magistrats du premier grade sont appelés à exercer les fonctions suivantes : (...) 2° Premier vice-président et procureur de la République adjoint d'un tribunal de grande instance ou d'un tribunal de première instance ; (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M.C..., magistrat du premier grade, qui avait le niveau hiérarchique exigé pour occuper les fonctions de vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, pouvait prétendre être nommé, à compter du 1er septembre 2014, à sa demande sur le premier emploi vacant du tribunal de grande instance de Paris au niveau hiérarchique auquel il appartenait, en application des dispositions de l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ;

20. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les évaluations de M. C... comportent plusieurs réserves, émises notamment lors des affectations de l'intéressé aux tribunaux de grande instance d'Auxerre et de Meaux, dans le cadre de sa période en tant que " magistrat placé ", de 2012 à 2014 ; que M. C... pouvait prétendre à d'autres fonctions au sein du tribunal de grande instance de Paris ; que les responsabilités éminentes d'un vice-président chargé des fonctions de juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, impliquent qu'une attention toute particulière soit portée à l'adéquation du candidat à un tel poste ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le Conseil supérieur de la magistrature aurait, en émettant un avis non conforme, au regard de ces réserves, sur la candidature de M. C...à de telles fonctions, entaché son appréciation d'une erreur manifeste ou d'une inexactitude matérielle ne peut qu'être écarté ;

21. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'avis contesté ;

Sur le décret du 25 novembre 2014 du Président de la République nommant MmeK... :

22. Considérant que M. C...fait valoir, à l'appui de ses conclusions dirigées contre ce décret, qu'il s'était lui-même porté candidat sur cet emploi et remplissait les conditions posées par l'article 3-1 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 pour disposer d'un droit de priorité sur celui-ci ; que si, ainsi qu'il a été dit au point 14, l'administration est, en principe, tenue de proposer la candidature d'un magistrat remplissant ces conditions, il en va différemment lorsque le Conseil supérieur de la magistrature s'est déjà récemment prononcé sur l'aptitude de l'intéressé à exercer de telles fonctions ; qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que le Conseil supérieur de la magistrature avait, par une appréciation exempte d'erreur manifeste, émis lors d'une récente procédure de nomination un avis non conforme à la nomination de M. C...sur de telles fonctions ; qu'il suit de là que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué ;

23. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;


D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes n° 382736 et 386701 de M. C...sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. H...C..., à M. B...I..., à Mme L...K..., à Mme G...A..., à Mme E...D..., à Mme F...J..., au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.


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