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Ariane Web: Conseil d'État 409018, lecture du 17 avril 2019, ECLI:FR:CECHS:2019:409018.20190417

Décision n° 409018
17 avril 2019
Conseil d'État

N° 409018
ECLI:FR:CECHS:2019:409018.20190417
Inédit au recueil Lebon
9ème chambre
M. Matias de Sainte Lorette, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
SCP MONOD, COLIN, STOCLET, avocats


Lecture du mercredi 17 avril 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La commune du Plessis-Robinson a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer l'annulation la décision du 4 avril 2011 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France a rejeté son recours contre la décision du 3 janvier 2011 par laquelle le directeur du pôle gestion publique de la direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine a arrêté la créance détenue sur elle par l'Etat, à la suite de la restitution de la taxe locale d'équipement accordée à la SARL CEREP France par l'unité territoriale des Hauts-de-Seine du ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à un montant de 1 118 702 euros. Par un jugement n° 1104087 du 23 juillet 2012, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande et prononcé la décharge de cette somme.

Par une décision n° 363158 du 17 juin 2015, le Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Versailles le jugement du recours du ministre de l'égalité des territoires et du logement contre ce jugement.

Par un arrêt n° 15VE02028 du 19 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur recours du ministre, annulé le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 23 juillet 2012 et rejeté la demande de la commune du Plessis-Robinson.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 17 mars et 19 juin 2017 et le 18 janvier 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune du Plessis-Robinson demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la commune du Plessis-Robinson ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 août 2006, le maire du Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine) a délivré à la SCI Descartes un permis de construire, modifié le 17 avril 2007, portant sur la construction d'un bâtiment à usage de bureaux et d'activité. Ce permis a été transféré à la SARL CEREP France par arrêté du 14 octobre 2008. Par décision du 3 janvier 2011, le directeur du pôle gestion publique de la direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine a arrêté la créance que l'Etat détenait sur la commune du Plessis-Robinson, à la suite de la restitution de la taxe locale d'équipement à la SARL CEREP France, à un montant de 1 118 702 euros. Par décision du 4 avril 2011, le directeur régional et interdépartemental de l'équipement et de l'aménagement d'Ile-de-France a rejeté le recours gracieux formé par le maire contre cette décision. Par un jugement du 23 juillet 2012, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, faisant droit à la demande de la commune, a annulé cette dernière décision et prononcé la décharge de la somme réclamée par l'Etat. La commune du Plessis-Robinson se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 janvier 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et rejeté la demande de la commune.

2. Aux termes de l'article 1723 quinquies du code général des impôts, alors applicable à la taxe locale d'équipement et dont les dispositions sont désormais reprises, en substance, à l'article L. 331-30 du code de l'urbanisme applicable à la taxe d'aménagement, " Le redevable de la taxe peut en obtenir la décharge, la réduction ou la restitution totale ou partielle : / S'il justifie qu'il n'a pas été en mesure de donner suite à l'autorisation de construire ; / Si, en cas de modification apportée au permis de construire ou à l'autorisation tacite de construire, le constructeur devient redevable d'un montant de taxe inférieur à celui dont il était débiteur ou qu'il a déjà acquitté au titre des constructions, précédemment autorisées ; / (...) ". Pour l'application de ces dispositions, seuls les redevables n'ayant entrepris aucun travail de construction sont susceptibles d'être regardés comme n'ayant pas été en mesure de donner suite à l'autorisation de construire. En cas d'exécution partielle des travaux projetés, il leur incombe, pour pouvoir, le cas échéant, bénéficier d'une restitution, également partielle, de l'impôt acquitté, d'obtenir une modification de l'autorisation de construire initiale.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la cour que, par un courrier du 29 juin 2010, la SARL CEREP France avait informé le maire du Plessis-Robinson avoir réalisé " des travaux de démolition, de terrassement et fondations ", avant de demander qu'il constate la caducité du permis de construire à compter du 30 janvier 2010 du fait de l'interruption des travaux, ce qu'a fait le maire par décision du 22 septembre 2010. Dès lors, en estimant qu'il résultait de l'instruction que les bénéficiaires successifs du permis de construire n'avaient entrepris aucune construction avant la péremption de ce permis, la cour administrative d'appel a dénaturé les faits qui lui étaient soumis. Son arrêt doit dès lors être annulé.

4. Le motif retenu au point 3 suffisant à entraîner l'annulation de l'arrêt, il n'est pas nécessaire de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 19 janvier 2017 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à la commune du Plessis-Robinson au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune du Plessis-Robinson et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie en sera adressée au ministre de l'action et des comptes publics et à la SARL CEREP France.