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Ariane Web: Conseil d'État 424712, lecture du 24 avril 2019, ECLI:FR:CECHS:2019:424712.20190424

Décision n° 424712
24 avril 2019
Conseil d'État

N° 424712
ECLI:FR:CECHS:2019:424712.20190424
Inédit au recueil Lebon
7ème chambre
Mme Cécile Renault, rapporteur
Mme Mireille Le Corre, rapporteur public
SCP MEIER-BOURDEAU, LECUYER, avocats


Lecture du mercredi 24 avril 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 22 septembre 2014 par laquelle le directeur des résidents à l'étranger et des services généraux du ministère de l'économie et des finances a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'un départ anticipé à la retraite en qualité de travailleur handicapé. Par un jugement n° 1500077 du 23 janvier 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 17MA00900 du 28 septembre 2018, enregistrée le 3 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête enregistrée le 6 mars 2017 au greffe de cette cour, présentée par MmeB.... Par cette requête et un mémoire, enregistré le 9 novembre 2018, Mme B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 ;
- le décret n° 2010-1734 du 30 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme A...Renault, auditrice,

- les conclusions de Mme C...Le Corre, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Meier-Bourdeau, Lecuyer, avocat de Mme B...;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeB..., agent administratif principal des finances publiques, affectée à la direction régionale des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, a sollicité auprès de son administration le bénéfice d'une retraite anticipée avant l'âge de 60 ans en qualité de fonctionnaire handicapé qui a été rejeté par deux décisions des 28 janvier et 22 septembre 2014 du directeur des résidents à l'étranger et des services généraux du ministère de l'économie et des finances. Par un jugement du 23 janvier 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de Mme B...tendant à l'annulation de cette décision.

2. D'une part, aux termes du 5° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction antérieure à la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites : " Un décret fixe les conditions dans lesquelles l'âge d'ouverture du droit à pension est abaissé, par rapport à un âge de référence de soixante ans, pour les fonctionnaires handicapés qui totalisent, alors qu'ils étaient atteints d'une incapacité permanente d' au moins 80 % ou qu'ils avaient la qualité de travailleur handicapé au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail, une durée d'assurance au moins égale à une limite fixée par ce décret, tout ou partie de cette durée ayant donné lieu à versement de retenues pour pensions ". Aux termes du 5° du I du même article, dans sa rédaction issue de la loi du 20 janvier 2014 : " Un décret fixe les conditions dans lesquelles l'âge d'ouverture du droit à pension est abaissé, par rapport à un âge de référence de soixante ans, pour les fonctionnaires handicapés qui totalisent, alors qu'ils étaient atteints d'une incapacité permanente d' au moins 50 %, une durée d'assurance au moins égale à une limite fixée par ce décret, tout ou partie de cette durée ayant donné lieu à versement de retenues pour pensions ". Si ces dernières dispositions, tout en abaissant le seuil d'incapacité permanente permettant d'accéder à la retraite anticipée, ont supprimé la référence aux bénéficiaires de la qualité de travailleur handicapé, l'article 36 de la loi du 20 janvier 2014 a prévu que : " III. Pour les périodes antérieures au 31 décembre 2015, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail, est prise en compte pour l'appréciation des conditions mentionnées (...) au 5° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (...) / IV. - Le présent article est applicable aux pensions prenant effet à compter du 1er février 2014 ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 5213-1 du code du travail, inséré dans la section du chapitre III du titre 1er du livre II de la partie V de ce code relative à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé : " Est considérée comme travailleur handicapé toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique. " Aux termes de l'article L. 5213-2 du même code : " La qualité de travailleur handicapé est reconnue par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles ".

4. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1, la demande de Mme B... tendait au bénéfice d'une retraite anticipée à compter au plus tard du 22 mars 2014. En faisant application à cette demande des dispositions du 5° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans leur rédaction issue de la loi du 20 janvier 2014, tout en recherchant si, en application des dispositions transitoires prévues par l'article 36 de cette loi, Mme B...pouvait, pour les périodes antérieures au 31 décembre 2015, justifier de la qualité de travailleur handicapé, le tribunal administratif de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

5. En second lieu, il résulte des dispositions du code du travail citées au point 3 et de la section du code dans lesquelles elles s'insèrent que le législateur a subordonné la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, au sens de l'article L. 5213-1 de ce code, à une décision de reconnaissance de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ou de la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) à laquelle elle a succédé. Ces dispositions ne donnent pas à l'assuré demandant le bénéfice des dispositions de l'article L. 5213-1 du code du travail la possibilité d'apporter la preuve de sa qualité de travailleur handicapé, au sens de ces dispositions, par d'autres moyens. Par suite, et ainsi qu'il ressort des débats parlementaires de la loi du 24 janvier 2014, seul peut être considéré comme travailleur handicapé pour l'application des dispositions du III de l'article 36 de la loi du 20 janvier 2014 citées au point 2, celui qui a été reconnu comme tel par la COTOREP ou par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour la période requise.

6. Il résulte des énonciations du jugement attaqué que, pour rejeter la demande de départ anticipé à la retraite de MmeB..., le tribunal administratif de Marseille a estimé, après avoir relevé que la requérante ne produisait qu'une décision de la COTOREP lui reconnaissant la qualité de travailleur handicapé pour la période comprise entre le 13 mars 1985 et le 13 mars 1990 puis des décisions de 2006 et 2011 de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées lui accordant cette reconnaissance pour la période comprise entre le 6 mars 2006 et le 6 mars 2011 puis entre cette date et le 6 mars 2016, que Mme B...ne justifiait pas d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé sur la totalité de la période requise. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en exigeant de Mme B...qu'elle justifie d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé sur la totalité de la période requise et en estimant, eu égard aux documents produits par l'intéressée, que ce n'était pas le cas, le tribunal administratif de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit ou d'erreur de qualification juridique et n'a pas davantage dénaturé les faits.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme B...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme D...B..., au ministre de l'économie et des finances et au ministre de l'action et des comptes publics