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Ariane Web: Conseil d'État 436794, lecture du 20 décembre 2019, ECLI:FR:CEORD:2019:436794.20191220

Décision n° 436794
20 décembre 2019
Conseil d'État

N° 436794
ECLI:FR:CEORD:2019:436794.20191220
Inédit au recueil Lebon



Lecture du vendredi 20 décembre 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Le syndicat FSU Territoriale 13 a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de prendre toutes mesures nécessaires afin de suspendre les effets de la note distribuée le 25 novembre 2019 aux agents des écoles par le directeur général des services de la commune d'Aix-en-Provence et du refus du directeur général des services, daté du 26 novembre 2019, de la retirer. Par une ordonnance n° 1909990 du 29 novembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu la note du directeur général des services de la commune d'Aix-en-Provence distribuée aux agents des écoles le 25 novembre 2019 et le refus de la retirer en tant qu'ils prévoient que les agents doivent désormais exercer leur droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme, indépendamment de toute appréciation d'un risque de désordre manifeste dans l'exécution du service.

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat FSU Territoriale 13 demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, d'annuler l'ordonnance n° 1909990 du 29 novembre 2019 en tant seulement qu'elle précise que " cette suspension ne fait pas obstacle à ce que, une fois informée par les agents des écoles de leur intention de participer à la grève, et s'il apparaît alors que l'exercice du droit de grève en cours de service peut entraîner un risque de désordre manifeste dans l'exécution du service, l'autorité territorial impose aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d'exercer leur droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme " et, d'autre part, de faire droit à leurs conclusions de première instance.



Le syndicat FSU Territoriale 13 soutient que :
- l'ordonnance contestée doit être annulée dès lors que l'exemplaire qui lui a été notifié ne permet pas d'établir que la minute a été signée comme le prévoit l'article R. 742-5 du code de justice administrative ;
- elle est entachée d'une première erreur de droit dès lors que les dispositions du III de l'article 7-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ne trouvent application qu'en cas de conclusion de l'accord mentionné au I du même article ;
- elle est entachée d'une deuxième erreur de droit dès lors qu'aucun élément ne permet d'établir un risque de désordre manifeste dans l'exécution du service ;
- elle est entachée d'une troisième erreur de droit dès lors qu'elle permet à l'autorité territoriale d'imposer aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d'exercer ce droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme sans prendre en considération la durée réelle de la grève.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;




Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ". L'article L. 522-3 du même code dispose que : " Lorsque la demande ne présente pas de caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu de faire application des deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ".

2. Le syndicat FSU Territoriale 13 a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, sur le fondement de l'article L. 521-2, lui demandant de suspendre la note relative à l'exercice du droit de grève adressée le 25 novembre 2019 par le directeur général des services de la commune d'Aix-en-Provence aux agents des écoles. Par une ordonnance n° 1909990 du 29 novembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a fait droit à cette demande. Le syndicat FSU Territoriale 13 relève appel de cette ordonnance, en tant seulement qu'elle précise que " cette suspension ne fait pas obstacle à ce que, une fois informée par les agents des écoles de leur intention de participer à la grève, et s'il apparaît alors que l'exercice du droit de grève en cours de service peut entraîner un risque de désordre manifeste dans l'exécution du service, l'autorité territoriale impose aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d'exercer leur droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme. "

3. Aux termes de l'article 7-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique : " I.- Dans les collectivités territoriales et les établissements publics mentionnés à l'article 2 de la présente loi, l'autorité territoriale et les organisations syndicales (...) peuvent engager des négociations en vue de la signature d'un accord visant à assurer la continuité des services (...), d'accueil des enfants de moins de trois ans, d'accueil périscolaire, de restauration collective et scolaire dont l'interruption en cas de grève des agents publics participant directement à leur exécution contreviendrait au respect de l'ordre public, notamment à la salubrité publique, ou aux besoins essentiels des usagers de ces services (...) / II.- Dans le cas où un préavis de grève a été déposé dans les conditions prévues à l'article L. 2512-2 du code du travail et en vue de l'organisation du service public et de l'information des usagers, les agents des services mentionnés au I du présent article informent, au plus tard quarante-huit heures avant de participer à la grève, comprenant au moins un jour ouvré, l'autorité territoriale ou la personne désignée par elle, de leur intention d'y participer. / (...) III.- Lorsque l'exercice du droit de grève en cours de service peut entraîner un risque de désordre manifeste dans l'exécution du service, l'autorité territoriale peut imposer aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d'exercer leur droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme. / IV. -Est passible d'une sanction disciplinaire l'agent (...) qui n'a pas exercé son droit de grève dès sa prise de service, dans les conditions prévues aux II et III du présent article. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité territoriale peut exiger des agents exerçant leur fonction dans les services d'accueil périscolaire ou de restauration scolaire, et ayant déclaré leur intention de participer à la grève, qu'ils exercent ce droit dès leur prise de service et jusqu'à son terme, dans le cas où l'interruption soudaine du service en cours d'exécution est susceptible de susciter un " désordre manifeste " dans l'exécution de ce service, sans que cette faculté instituée par la loi soit subordonnée à la conclusion de l'accord mentionné au I de ces dispositions, ni davantage limitée par les termes du préavis de grève déposé.

4. Le syndicat FSU Territoriale 13 soutient que les dispositions du III de l'article 7-2 précité ne trouvent application qu'en cas de conclusion de l'accord mentionné au I du même article, qu'un préavis de grève peut légalement prévoir une grève ne couvrant pas la totalité de la journée de travail dès lors qu'il répond aux conditions de préavis énoncées dans l'article L. 2512-2 du code du travail, que l'autorité ne peut imposer à un agent de faire grève durant une journée entière de service alors que cet agent a déclaré une grève d'une durée inférieure ou que le préavis déposé limite lui-même les plages horaires de cette grève.

5. Il résulte de ce qui est dit au point 3 que l'appel du syndicat FSU Territoriale 13 dirigé contre l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille qui, contrairement à ce qu'il soutient, est revêtue de la signature de son auteur, est manifestement mal fondé. La requête doit, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'apprécier son caractère d'urgence, être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.



O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du syndicat FSU Territoriale 13 est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat FSU Territoriale 13.
Copie en sera adressée à la commune d'Aix-en-Provence et au préfet des Bouches-du-Rhône.