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Ariane Web: Conseil d'État 427536, lecture du 22 décembre 2020, ECLI:FR:CECHR:2020:427536.20201222

Décision n° 427536
22 décembre 2020
Conseil d'État

N° 427536
ECLI:FR:CECHR:2020:427536.20201222
Mentionné aux tables du recueil Lebon
10ème - 9ème chambres réunies
Mme Christelle Thomas, rapporteur
M. Laurent Domingo, rapporteur public
CABINET BRIARD, avocats


Lecture du mardi 22 décembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012. Par un jugement n° 1605683/2-2 du 26 octobre 2017, le tribunal administratif de Paris, après avoir prononcé un non-lieu à statuer partiel, a rejeté le surplus de leur demande.

Par un arrêt n° 17PA03909 du 5 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de M. t Mme A..., prononcé la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.

Par un pourvoi, enregistré le 31 janvier 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de M. et Mme B... A... ;



Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... A..., qui était depuis plus de vingt ans salarié de la société HSBC au Royaume-Uni, a rompu son contrat de travail avec cette dernière pour rejoindre le 1er mars 2010 la société HSBC France dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée. A la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations de revenus de M. et Mme A..., l'administration fiscale a, par une proposition de rectification du 22 juillet 2014, remis en cause le bénéfice du régime forfaitaire des impatriés prévu à l'article 155 B du code général des impôts dont s'était prévalu M. A... au titre des années 2011 et 2012, au motif qu'il n'avait pas bénéficié d'un recrutement direct de l'étranger par une entreprise établie en France mais d'une mobilité entre sociétés appartenant au même groupe. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 avril 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a prononcé la décharge des impositions supplémentaires auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012 à raison de ce redressement.

2. Le 1 du I de l'article 155 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige, dispose que : " Les salariés et les personnes mentionnées aux 1°, 2° et 3° du b de l'article 80 ter appelés de l'étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France pendant une période limitée ne sont pas soumis à l'impôt à raison des éléments de leur rémunération directement liés à cette situation ou, sur option, et pour les salariés et personnes autres que ceux appelés par une entreprise établie dans un autre Etat, à hauteur de 30 % de leur rémunération". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie de laquelle elles sont issues, que seules les personnes recrutées directement à l'étranger par une entreprise installée en France et non les personnes effectuant une mobilité entre entités d'un même groupe peuvent bénéficier, sur option, de l'exonération d'imposition forfaitaire de 30 % de leur rémunération.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si M. A... a rompu tout lien juridique avec la société HSBC UK avant de conclure un contrat à durée indéterminée avec la société HSBC France, il a néanmoins continué à travailler au sein du même groupe, a bénéficié, lors de son embauche en France, d'une dispense de période d'essai ainsi que de la reprise intégrale de son ancienneté dans le groupe et s'est d'ailleurs lui-même prévalu, dans un courrier adressé le 26 mai 2014 à l'administration fiscale, d'avoir fait l'objet d'une mobilité intra-groupe. Il s'ensuit qu'en jugeant que M. A... avait fait l'objet d'un recrutement direct à l'étranger par une entreprise établie en France et pouvait, en conséquence, bénéficier de l'option en faveur de l'exonération forfaitaire d'imposition de sa rémunération prévue par l'article 155 B du code général des impôts, cité au point 2, alors que son embauche en France résultait d'une mobilité au sein du groupe HSBC, la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 5 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. et Mme B... A....



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