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Ariane Web: Conseil d'État 442530, lecture du 18 mai 2021, ECLI:FR:CECHR:2021:442530.20210518

Décision n° 442530
18 mai 2021
Conseil d'État

N° 442530
ECLI:FR:CECHR:2021:442530.20210518
Mentionné aux tables du recueil Lebon
7ème - 2ème chambres réunies
M. Alexis Goin, rapporteur
M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public
SCP KRIVINE, VIAUD ; LE PRADO, avocats


Lecture du mardi 18 mai 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société Alapont France a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 12 décembre 2016 par laquelle la Régie des transports métropolitains (RTM) a résilié le marché industriel relatif au renouvellement de douze escaliers mécaniques situés dans le métro de Marseille et à la maintenance associée, d'ordonner la reprise des relations contractuelles, de condamner la RTM à lui verser, à titre principal, une indemnité de 350 000 euros, avec intérêts et capitalisation, en réparation des conséquences dommageables de la suspension de l'exécution du marché depuis le 12 décembre 2016 ou, à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la reprise des relations contractuelles ne serait pas ordonnée, de condamner la RTM à lui verser une indemnité de 959 737,53 euros HT, avec intérêts et capitalisation, en réparation du préjudice résultant de la résiliation du marché. Par un jugement n° 1700931 du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 19MA00917 du 15 juin 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la société Alapont France, annulé ce jugement, condamné la RTM à verser une indemnité de 114 551,45 euros à cette société et rejeté le surplus des conclusions de celle-ci.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 août et 4 novembre 2020 et 30 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la RTM demande au Conseil d'Etat :




1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la société Alapont France la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics industriels ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexis Goin, auditeur,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de la Régie des transports métropolitains et à la SCP Viaud, Krivine, avocat de la société Alapont France ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par acte d'engagement du 21 juin 2013, la Régie des transports métropolitains (RTM) a conclu avec la société Alapont France un marché public industriel relatif au renouvellement et à la maintenance de douze escaliers mécaniques situés dans les stations Baille et La Timone de la ligne 1 du métro de Marseille. Les 20 octobre et 17 novembre 2016, par deux courriers, la RTM a mis en demeure la société Alapont France de respecter ses obligations contractuelles dans un délai de quinze jours. Par une décision du 12 décembre 2016, la RTM a prononcé la résiliation pour faute de ce marché. La société Alapont France a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à la reprise des relations contractuelles et à ce que lui soit versée la somme de 959 737,53 euros. Par un jugement du 27 décembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande. Sur appel de la société Alapont France, la cour administrative d'appel a, par l'arrêt attaqué du 15 juin 2020, annulé le jugement, rejeté les conclusions de cette société tendant à la reprise des relations contractuelles et fait droit à ses conclusions indemnitaires à hauteur de 114 551,45 euros. Il s'ensuit que le pourvoi de la RTM dirigé contre cet arrêt doit être regardé comme tendant à l'annulation de celui-ci en tant seulement qu'il a accordé une indemnité à la société Alapont France.

2. Les fautes commises par le cocontractant de la personne publique dans l'exécution du contrat sont susceptibles, alors même qu'elles ne seraient pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du titulaire, de limiter en partie son droit à l'indemnisation du préjudice qu'il subit du fait de cette résiliation irrégulière. Par suite, en condamnant la RTM à réparer l'intégralité du préjudice subi par la société Alapont du fait de la résiliation irrégulière du contrat, sans tenir compte des fautes commises par cette société dans l'exécution du contrat dont elle avait constaté l'existence tout en considérant qu'elles n'étaient pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du titulaire, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la RTM est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il l'a condamnée à indemniser la société Alapont.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Alapont France la somme de 3 000 euros à verser à la RTM au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la RTM qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 15 juin 2020 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions indemnitaires de la société Alapont France.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Marseille.
Article 3 : La société Alapont France versera à la Régie des transports métropolitains la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées au même titre par la société Alapont France sont rejetées.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la Régie des transports métropolitains est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la Régie des transports métropolitains et à la société Alapont France.


Voir aussi