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Ariane Web: Conseil d'État 451434, lecture du 2 février 2022, ECLI:FR:CECHS:2022:451434.20220202

Décision n° 451434
2 février 2022
Conseil d'État

N° 451434
ECLI:FR:CECHS:2022:451434.20220202
Inédit au recueil Lebon
9ème chambre
Mme Catherine Fischer-Hirtz, rapporteur
Mme Céline Guibé, rapporteur public
SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SCP FOUSSARD, FROGER, avocats


Lecture du mercredi 2 février 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

La société GEC 7 a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016 à raison d'immeubles situés à Paris (13ème et 15ème arrondissements) pour un montant total de 68 216 euros. Par un jugement nos 1813109, 1813283 du 19 février 2021, le tribunal administratif a fait droit à ses demandes.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 6 avril et 26 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes présentées par la société GEC 7.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société société GEC 7 ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le ministre de l'économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation contre le jugement du 19 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé la société GEC 7 des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères mises à sa charge pour l'année 2016 à raison d'immeubles situés à Paris (75013 et 75015) en raison de l'illégalité de la délibération du conseil de Paris en date du 4 avril 2016 fixant à 6,21% le taux de cette taxe.

2. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts, applicable à la ville de Paris, dans sa rédaction applicable au litige: " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales, dans la mesure où celles-ci ne sont pas couvertes par des recettes ordinaires n'ayant pas le caractère fiscal (...) ".

3. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères susceptible d'être instituée sur le fondement de ces dispositions n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et non couvertes par des recettes non fiscales affectées à ces opérations. Il s'ensuit que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses exposées pour ce service, déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales, relatives à ces opérations.

4. Les dépenses susceptibles d'être prises en compte sont constituées de la somme de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées, telle qu'elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe.

5. Pour juger disproportionnés le produit de la taxe litigieuse, et par suite son taux, le tribunal administratif de Paris a exclu des dépenses pouvant être couverte par la taxe toutes celles qui ont été exposées par des directions autres que la direction de la propreté et de l'eau au seul motif que cette dernière est le seul service directement chargé de la collecte et le traitement des déchets ménagers et assimilés. Alors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que peuvent être incluses dans les dépenses précitées, celles qui correspondent à la quote-part du coût des directions ou services centraux de la collectivité, calculée au moyen d'une comptabilité analytique permettant par différentes clés de répartition, d'identifier avec suffisamment de précision les dépenses qui, parmi celles liées à l'administration générale de la collectivité, peuvent être regardées comme ayant été directement exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales, le tribunal administratif de Paris a, ce faisant, commis une erreur de droit.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi et sur la substitution de motifs sollicitée par la société GEC 27 en défense, que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 19 février 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris.
Article 3 : Les conclusions présentées par la société GEC 7 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance, à la société GEC 7 et à la Ville de Paris.
Délibéré à l'issue de la séance du 13 janvier 2022 où siégeaient : M. Frédéric Aladjidi, président de chambre, présidant ; M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire et Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 2 février 2022.


Le président :
Signé : M. Frédéric Aladjidi
La rapporteure :
Signé : Mme Catherine Fischer-Hirtz
La secrétaire :
Signé : Mme B... A...