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Ariane Web: Conseil d'État 451890, lecture du 28 juillet 2022, ECLI:FR:CECHR:2022:451890.20220728

Décision n° 451890
28 juillet 2022
Conseil d'État

N° 451890
ECLI:FR:CECHR:2022:451890.20220728
Inédit au recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
Mme Pauline Hot, rapporteur
M. Stéphane Hoynck, rapporteur public
SARL LE PRADO - GILBERT, avocats


Lecture du jeudi 28 juillet 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

L'association Robin des Lois a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 12 septembre 2016 par laquelle la préfète de la Vienne a rejeté sa demande tendant à la création d'un bureau de vote au sein du centre pénitentiaire de Vivonne. Par un jugement n° 1602557 du 19 décembre 2018, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

L'association Robin des Lois a relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Bordeaux. Par un arrêt n° 19BX00493 du 13 avril 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis le dossier de la requête au Conseil d'Etat.

Par cette requête et par un nouveau mémoire, et un mémoire en réplique, enregistrés le 20 avril 2021 et le 22 avril et 28 juin 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Robin des Lois demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler la décision du 12 septembre 2016 par laquelle la préfète de la Vienne a rejeté la demande formée le 26 août 2016 par l'association Robin des lois visant à instituer un bureau de vote au sein du centre pénitentiaire de Vivonne;

3°) d'enjoindre la Préfète de la Vienne de prendre une nouvelle décision après une nouvelle instruction dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, à verser à la SARL Le Prado - Gilbert en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Hot, auditrice,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de l'association Robin des Lois ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier transmis au Conseil d'Etat que l'association Robin des Lois a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 12 septembre 2016 par laquelle la préfète de la Vienne a refusé d'instituer un bureau de vote au sein du centre pénitentiaire de Vivonne. Par un jugement du 19 décembre 2018, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande. L'association Robin des Lois a demandé à la cour administrative d'appel de Bordeaux l'annulation de ce jugement. Par un arrêt du 13 avril 2021, la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis le dossier de la requête au Conseil d'Etat.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 17 du code électoral, dans sa version applicable au litige : " A chaque bureau de vote est affecté un périmètre géographique. Une liste électorale est dressée pour chaque bureau de vote par une commission administrative constituée pour chacun de ces bureaux et composée du maire ou de son représentant, du délégué de l'administration désigné par le préfet, ou le sous-préfet, et d'un délégué désigné par le président du tribunal de grande instance. (...) ". Aux termes de l'article L. 71 du code électoral : " Peuvent exercer, sur leur demande, leur droit de vote par procuration : (...) c) Les personnes placées en détention provisoire et les détenus purgeant une peine n'entraînant pas une incapacité électorale. ". Aux termes de l'article R. 5 du même code, dans sa version applicable au litige : " Pour chaque révision annuelle des listes électorales, les demandes d'inscription des électeurs doivent parvenir dans les mairies jusqu'au dernier jour ouvrable de décembre inclus, le samedi étant considéré comme un jour ouvrable. Les demandes d'inscription doivent soit être déposées personnellement ou par l'intermédiaire d'un mandataire, muni d'un mandat écrit, soit être adressées par courrier, au moyen du formulaire agréé prévu à cet effet. Elles peuvent également être admises dans le cadre d'une téléprocédure dans les conditions agréées par le ministre de l'intérieur. (...) La commission administrative prévue au deuxième alinéa de l'article L. 17 se réunit à compter du 1er septembre. Elle procède aux inscriptions correspondant aux demandes parvenues dans le délai fixé au premier alinéa. Au plus tard à la date fixée au premier alinéa, elle effectue la radiation des personnes mentionnées à l'article R. 7. Au plus tard le 9 janvier, la commission administrative se prononce sur les observations formulées en application des articles L. 23 et R. 8, puis dresse le tableau rectificatif."

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 40 du code électoral : " Les électeurs sont répartis par arrêté du préfet en autant de bureaux de vote que l'exigent les circonstances locales et le nombre des électeurs. Tout arrêté modifiant le périmètre des bureaux de vote doit être notifié au maire avant le 31 août de chaque année. Il entre en vigueur le premier mars suivant et est pris en compte pour l'établissement des listes électorales entrant en vigueur à partir de cette date. [...] Les lieux de vote sont désignés dans l'arrêté du préfet instituant les bureaux. "

4. Il ressort des pièces du dossier qu'eu égard aux difficultés particulières propres à l'instauration de modalités de vote au sein des établissements pénitentiaires, et au fait que les détenus, qui disposaient du droit de vote par procuration, ne pourraient plus, une fois libérés, accéder à ces locaux et ainsi au bureau de vote auquel ils auraient été rattachés, la préfète de la Vienne n'a en tout état de cause pas commis d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation en refusant pour ce motif l'instauration d'un bureau de vote au sein du centre pénitentiaire de Vivonne. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait légalement pris la même décision en se fondant sur ce seul motif.

5. Il résulte de ce qui précède que l'association Robin des Lois n'est pas fondée soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la préfète de la Vienne a refusé d'instituer un bureau de vote au sein du centre pénitentiaire de Vivonne.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'association Robin des Lois est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Robin des Lois et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.


Délibéré à l'issue de la séance du 29 juin 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Pauline Hot, auditrice-rapporteure.

Rendu le 28 juillet 2022.

Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz

La rapporteure :
Signé : Mme Pauline Hot

La secrétaire :
Signé : Mme Valérie Peyrisse