Conseil d'État
N° 506130
ECLI:FR:CEORD:2025:506130.20250722
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP BUK LAMENT - ROBILLOT, avocats
Lecture du mardi 22 juillet 2025
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 et 17 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté HC/DCEC/BEL/2025-97 du 7 juillet 2025 par lequel le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie l'a déclaré démissionnaire d'office de ses mandats de membre du congrès de la Nouvelle-Calédonie et de membre de l'assemblée de la province Sud ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761.1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite en ce que, d'une part, l'arrêté contesté porte une atteinte grave et immédiate à sa situation et au fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie et, d'autre part, le recours au fond contre cette décision est, à la différence du recours formé contre un arrêté prononçant la démission d'office d'un élu local métropolitain ou ultra-marin, dépourvu de caractère suspensif ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que le III de l'article 195 de la loi organique du 12 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ne prévoit pas que le haut-commissaire de la République puisse prononcer une démission d'office lorsque la cause d'inéligibilité survient en cours de mandat ;
- les dispositions du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie méconnaissent les stipulations des articles 7, 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les dispositions du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et leur abrogation par le Conseil constitutionnel, saisi par voie de question prioritaire de constitutionnalité, entachera l'arrêté contesté d'un défaut de base légale.
Par un mémoire distinct, enregistré le 11 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du III de l'article 195 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie. Il soutient que ces dispositions, qui sont applicables au litige, méconnaissent le droit au recours garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789 et le principe d'égalité devant la loi garanti par son article 6.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes du premier alinéa du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Tout membre du congrès ou d'une assemblée de province dont l'inéligibilité se révélera après l'expiration du délai pendant lequel son élection peut être contestée ou qui, pendant la durée de son mandat, se trouvera frappé de l'une des incapacités qui fait perdre la qualité d'électeur, est déclaré démissionnaire par arrêté du haut-commissaire, soit d'office, soit sur réclamation de tout électeur. Les recours contre ces arrêtés sont portés devant le Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article 199 de la même loi organique : " Les élections au congrès ou à l'assemblée de province peuvent être contestées dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats par tout candidat ou tout électeur de la province devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Le même droit est ouvert au haut-commissaire s'il estime que les conditions et les formes légalement prescrites n'ont pas été respectées. (...). Le membre de l'assemblée de province dont l'élection est contestée reste en fonctions jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur la réclamation. "
3. Il résulte de ces dispositions que le recours formé devant le Conseil d'Etat par un membre du congrès ou d'une assemblée de province contre l'arrêté du haut-commissaire le déclarant démissionnaire d'office en application des dispositions précitées du premier alinéa du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999, qui obéit au même régime contentieux que l'élection, revêt un caractère suspensif.
4. L'arrêté du 7 juillet 2025 par lequel le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a déclaré M. A... démissionnaire de ses mandats de membre du congrès de Nouvelle-Calédonie et de membre de l'assemblée de la province Sud a fait l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat, enregistré sous le n° 506110. Ce recours a eu, ainsi qu'indiqué ci-dessus, pour effet d'en suspendre le caractère exécutoire.
5. Il en résulte que la demande de M. A... tendant à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat suspende l'exécution de cet arrêté était dépourvue d'objet à la date de son introduction. Cette demande est, par suite, irrecevable et doit être rejetée par application des dispositions de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin pour le Conseil d'Etat de se prononcer sur le renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que les dispositions du III de l'article 195 de la loi du 19 mars 1999 porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, dont le Conseil constitutionnel est au demeurant déjà saisi.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A....
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et au Conseil constitutionnel.
Fait à Paris, le 22 juillet 2025
Signé : Pierre Collin
N° 506130
ECLI:FR:CEORD:2025:506130.20250722
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP BUK LAMENT - ROBILLOT, avocats
Lecture du mardi 22 juillet 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 11 et 17 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté HC/DCEC/BEL/2025-97 du 7 juillet 2025 par lequel le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie l'a déclaré démissionnaire d'office de ses mandats de membre du congrès de la Nouvelle-Calédonie et de membre de l'assemblée de la province Sud ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761.1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite en ce que, d'une part, l'arrêté contesté porte une atteinte grave et immédiate à sa situation et au fonctionnement des institutions de la Nouvelle-Calédonie et, d'autre part, le recours au fond contre cette décision est, à la différence du recours formé contre un arrêté prononçant la démission d'office d'un élu local métropolitain ou ultra-marin, dépourvu de caractère suspensif ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors que le III de l'article 195 de la loi organique du 12 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ne prévoit pas que le haut-commissaire de la République puisse prononcer une démission d'office lorsque la cause d'inéligibilité survient en cours de mandat ;
- les dispositions du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie méconnaissent les stipulations des articles 7, 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les dispositions du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et leur abrogation par le Conseil constitutionnel, saisi par voie de question prioritaire de constitutionnalité, entachera l'arrêté contesté d'un défaut de base légale.
Par un mémoire distinct, enregistré le 11 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du III de l'article 195 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie. Il soutient que ces dispositions, qui sont applicables au litige, méconnaissent le droit au recours garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789 et le principe d'égalité devant la loi garanti par son article 6.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Aux termes du premier alinéa du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " Tout membre du congrès ou d'une assemblée de province dont l'inéligibilité se révélera après l'expiration du délai pendant lequel son élection peut être contestée ou qui, pendant la durée de son mandat, se trouvera frappé de l'une des incapacités qui fait perdre la qualité d'électeur, est déclaré démissionnaire par arrêté du haut-commissaire, soit d'office, soit sur réclamation de tout électeur. Les recours contre ces arrêtés sont portés devant le Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article 199 de la même loi organique : " Les élections au congrès ou à l'assemblée de province peuvent être contestées dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats par tout candidat ou tout électeur de la province devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux. Le même droit est ouvert au haut-commissaire s'il estime que les conditions et les formes légalement prescrites n'ont pas été respectées. (...). Le membre de l'assemblée de province dont l'élection est contestée reste en fonctions jusqu'à ce qu'il ait été définitivement statué sur la réclamation. "
3. Il résulte de ces dispositions que le recours formé devant le Conseil d'Etat par un membre du congrès ou d'une assemblée de province contre l'arrêté du haut-commissaire le déclarant démissionnaire d'office en application des dispositions précitées du premier alinéa du III de l'article 195 de la loi organique du 19 mars 1999, qui obéit au même régime contentieux que l'élection, revêt un caractère suspensif.
4. L'arrêté du 7 juillet 2025 par lequel le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a déclaré M. A... démissionnaire de ses mandats de membre du congrès de Nouvelle-Calédonie et de membre de l'assemblée de la province Sud a fait l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat, enregistré sous le n° 506110. Ce recours a eu, ainsi qu'indiqué ci-dessus, pour effet d'en suspendre le caractère exécutoire.
5. Il en résulte que la demande de M. A... tendant à ce que le juge des référés du Conseil d'Etat suspende l'exécution de cet arrêté était dépourvue d'objet à la date de son introduction. Cette demande est, par suite, irrecevable et doit être rejetée par application des dispositions de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin pour le Conseil d'Etat de se prononcer sur le renvoi au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que les dispositions du III de l'article 195 de la loi du 19 mars 1999 porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, dont le Conseil constitutionnel est au demeurant déjà saisi.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A....
Copie en sera adressée au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et au Conseil constitutionnel.
Fait à Paris, le 22 juillet 2025
Signé : Pierre Collin