Base de jurisprudence


Analyse n° 325824
30 décembre 2009
Conseil d'État

N° 325824 330223
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du mercredi 30 décembre 2009



01-05-01-03 : Actes législatifs et administratifs- Validité des actes administratifs motifs- Pouvoirs et obligations de l'administration- Compétence liée-

Obligation pour l'administration de prendre les textes d'application d'une loi dans un délai raisonnable - 1) Article 27 de la loi du 5 mars 2007 relative à la protection de l'enfance - Article nécessitant un décret d'application - 2) Délai raisonnable dépassé - Illégalité du refus implicite de prendre ce texte (1) - 3) Demande de réparation du préjudice né de la carence du pouvoir réglementaire (2) - Octroi d'une indemnité en l'espèce - Compensation intégrale des charges résultant pour les départements de l'application de cette loi - Absence.




En vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre assure l'exécution des lois et exerce le pouvoir réglementaire, sous réserve de la compétence conférée au Président de la République par son article 13. L'exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit, mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect des engagements internationaux de la France y ferait obstacle. 1) L'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 nécessitait un décret, d'une part, pour fixer les critères nationaux et les modalités selon lesquels les ressources du fonds national de financement de la protection de l'enfance seraient affectées aux départements en vue de compenser les charges résultant pour eux de l'application de cette loi, d'autre part, pour définir les modalités d'organisation et de fonctionnement de ce fonds, notamment la répartition des sièges, au sein du comité de gestion, entre les représentants de la Caisse nationale des allocations familiales, des départements et de l'Etat, les modalités de leur désignation et la durée de leur mandat. 2) Le refus ministériel implicite de proposer à la signature du Premier ministre le décret demandé est intervenu plus d'un an et demi après la publication de la loi du 5 mars 2007. L'élaboration de ce décret ne s'est pas heurtée à des difficultés particulières, de nature à justifier l'absence d'édiction de ce texte au terme d'un tel délai. Ainsi ce refus, intervenu après l'expiration du délai raisonnable qui était imparti au Gouvernement pour le prendre, est entaché d'illégalité. Il en va de même de la décision expresse de refus que le Premier ministre a opposée à la demande présentée par le requérant en vue d'obtenir l'édiction de ce décret. 3) Il résulte des dispositions de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007, éclairées par leurs travaux préparatoires, qu'un département ne saurait revendiquer de droit à la compensation intégrale des charges résultant pour lui de l'application de cette loi, mais seulement celui de se voir verser une fraction des sommes dont dispose le fonds, dont l'objet est de compenser ces charges, réparties selon des critères nationaux tenant compte, notamment, de leur situation démographique et sociale. Compte tenu, d'une part, de la somme de 30 millions d'euros que le législateur s'est borné à allouer pour l'ensemble des départements, d'autre part, des pièces produites par le département requérant et qui font apparaître les dépenses effectivement exposées par ce dernier pour la mise en oeuvre des dispositions de la loi du 5 mars 2007, appréciation à 100 000 euros du préjudice subi par ce dernier du fait de la carence du pouvoir réglementaire, pour la période comprise entre l'expiration du délai raisonnable mentionné ci-dessus et la date de la présente décision.





60-01-04-01 : Responsabilité de la puissance publique- Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité- Responsabilité et illégalité- Illégalité engageant la responsabilité de la puissance publique-

Obligation pour l'administration de prendre les textes d'application d'une loi dans un délai raisonnable - 1) Article 27 de la loi du 5 mars 2007 relative à la protection de l'enfance - Article nécessitant un décret d'application - 2) Délai raisonnable dépassé - Illégalité du refus implicite de prendre ce texte (1) - 3) Demande de réparation du préjudice né de la carence du pouvoir réglementaire (2) - Octroi d'une indemnité en l'espèce - Compensation intégrale des charges résultant pour les départements de l'application de cette loi - Absence.




En vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre assure l'exécution des lois et exerce le pouvoir réglementaire, sous réserve de la compétence conférée au Président de la République par son article 13. L'exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit, mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect des engagements internationaux de la France y ferait obstacle. 1) L'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 nécessitait un décret, d'une part, pour fixer les critères nationaux et les modalités selon lesquels les ressources du fonds national de financement de la protection de l'enfance seraient affectées aux départements en vue de compenser les charges résultant pour eux de l'application de cette loi, d'autre part, pour définir les modalités d'organisation et de fonctionnement de ce fonds, notamment la répartition des sièges, au sein du comité de gestion, entre les représentants de la Caisse nationale des allocations familiales, des départements et de l'Etat, les modalités de leur désignation et la durée de leur mandat. 2) Le refus ministériel implicite de proposer à la signature du Premier ministre le décret demandé est intervenu plus d'un an et demi après la publication de la loi du 5 mars 2007. L'élaboration de ce décret ne s'est pas heurtée à des difficultés particulières, de nature à justifier l'absence d'édiction de ce texte au terme d'un tel délai. Ainsi ce refus, intervenu après l'expiration du délai raisonnable qui était imparti au Gouvernement pour le prendre, est entaché d'illégalité. Il en va de même de la décision expresse de refus que le Premier ministre a opposée à la demande présentée par le requérant en vue d'obtenir l'édiction de ce décret. 3) Il résulte des dispositions de l'article 27 de la loi du 5 mars 2007, éclairées par leurs travaux préparatoires, qu'un département ne saurait revendiquer de droit à la compensation intégrale des charges résultant pour lui de l'application de cette loi, mais seulement celui de se voir verser une fraction des sommes dont dispose le fonds, dont l'objet est de compenser ces charges, réparties selon des critères nationaux tenant compte, notamment, de leur situation démographique et sociale. Compte tenu, d'une part, de la somme de 30 millions d'euros que le législateur s'est borné à allouer pour l'ensemble des départements, d'autre part, des pièces produites par le département requérant et qui font apparaître les dépenses effectivement exposées par ce dernier pour la mise en oeuvre des dispositions de la loi du 5 mars 2007, appréciation à 100 000 euros du préjudice subi par ce dernier du fait de la carence du pouvoir réglementaire, pour la période comprise entre l'expiration du délai raisonnable mentionné ci-dessus et la date de la présente décision.


(1) Cf. 28 juillet 2000, Association France nature environnement, n° 204024, p. 322. (2) Cf. 27 juillet 2005, Association Bretagne Ateliers, n° 261694, p. 350.