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Ariane Web: Conseil d'État 324816, lecture du 17 juin 2011

Analyse n° 324816
17 juin 2011
Conseil d'État

N° 324816 et autres
Publié au recueil Lebon

Lecture du vendredi 17 juin 2011



09 : Arts et lettres-

Propriété intellectuelle - Rémunération pour copie privée (art. L. 311-1 du code de la propriété intellectuelle) - 1) a) Principes déterminant la fixation de la rémunération - b) Conséquences sur la méthode à suivre par la commission prévue à l'article L. 311-5 - 2) Illégalité, en l'espèce, d'une délibération de la commission décidant de soumettre à la rémunération tous les supports sans prévoir la possibilité d'exonérer ceux des supports dont les conditions d'utilisation ne permettent pas de présumer un usage à des fins de copie privée (1).




1) a) Il résulte des dispositions des articles L. 122-4, L. 122-5, L. 211-3 et L. 311-1, L. 311-4 et L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle et de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 21 octobre 2010 Padawan SL (C-467/08), que la rémunération pour copie privée doit être fixée à un niveau permettant de produire un revenu, à partager entre les ayants droit, globalement analogue à celui que procurerait la somme des paiements d'un droit par chaque auteur d'une copie privée s'il était possible de l'établir et de le percevoir. b) Pour fixer la rémunération, la commission prévue à l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle doit apprécier, sur la base des capacités techniques des matériels et de leurs évolutions, le type d'usage qui en est fait par les différents utilisateurs, en recourant à des enquêtes et sondages qu'il lui appartient d'actualiser régulièrement. Si cette méthode repose nécessairement sur des approximations et des généralisations, celles-ci doivent toujours être fondées sur une étude objective des techniques et des comportements et ne peuvent reposer sur des hypothèses ou des équivalences supposées. 2) En décidant que l'ensemble des supports, à l'exception de ceux acquis par les personnes légalement exonérées de la rémunération pour copie privée par les dispositions de l'article L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle, seraient soumis à la rémunération, sans prévoir la possibilité d'exonérer ceux des supports acquis, notamment à des fins professionnelles, dont les conditions d'utilisation ne permettent pas de présumer un usage à des fins de copie privée, la décision attaquée a méconnu les dispositions de ce code et de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 telle qu'interprétée par l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne.





54-07-023 : Procédure- Pouvoirs et devoirs du juge- Modulation dans le temps des effets d'une annulation-

Annulation d'une délibération fixant le montant de la rémunération pour copie privée - Possibilité de tenir compte des exigences du droit de l'Union européenne - Existence.




Le Conseil d'Etat annule la décision n° 11 du 17 décembre 2008 de la commission prévue à l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle relative à la rémunération pour copie privée. La gravité de la méconnaissance des exigences du droit de l'Union affectant les délibérations antérieures, que cette annulation a pour effet de faire revivre, étant supérieure à celle de la délibération annulée, cette circonstance, ajoutée aux difficultés d'exécution qui porteraient atteinte à l'existence même du système de rémunération du droit de copie privée régi par la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 crée, en application du principe de sécurité juridique, reconnu par le droit de l'Union, une nécessité impérieuse de différer pour une période de six mois l'effet de la décision d'annulation.


(1) Cf. CJUE, 21 octobre 2010, Padawan SL contre Sociedad General de Autores y Editores de España (SGAE), aff. C-467/08.

Voir aussi