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Ariane Web: Conseil d'État 401376, lecture du 26 mars 2018

Analyse n° 401376
26 mars 2018
Conseil d'État

N° 401376
Publié au recueil Lebon

Lecture du lundi 26 mars 2018



60-01-03-04 : Responsabilité de la puissance publique- Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité- Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique- Omissions-

Carence dans la prévention des risques liés à l'exposition des travailleurs aux poussières d'amiante - Société spécialisée dans la production d'amiante-ciment - 1) Période antérieure à 1977 - Faute d'une particulière gravité délibérément commise - Conséquence - Faute faisant obstacle à ce que cette société puisse se prévaloir de la faute de l'administration - 2) Période postérieure à 1977 - Absence de preuve d'un lien de causalité direct et certain entre une carence de l'Etat et les préjudices invoqués (1).




Société, spécialisée dans la production d'amiante-ciment depuis sa création en 1922, devenue la principale entreprise de ce secteur en France et ayant des liens étroits avec des entreprises recourant aux mêmes procédés de fabrication à l'étranger. 1) D'une part, la société avait déjà, au cours de la période allant de 1974 à 1977, une connaissance particulière des dangers liés à l'utilisation de l'amiante. D'autre part, cette société n'établissait pas avoir pris de mesure particulière de protection individuelle et collective de ses salariés exposés avant 1977 par des installations efficaces, contrôlées, surveillées et entretenues de limitation et d'évacuation des poussières, conformément à la réglementation alors en vigueur. Cette société est l'auteur, pour la période antérieure au décret du 17 août 1977, d'une faute d'une particulière gravité délibérément commise, faisant obstacle à qu'elle se prévale de la carence fautive de l'État. 2) Les mesures adoptées par les pouvoirs publics à partir de 1977 ont été de nature à réduire le risque de maladie professionnelle liée à l'amiante dans les entreprises dont l'exposition des salariés aux poussières d'amiante était connue. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que les seuils d'empoussièrement fixés par le décret du 17 août 1977 avaient pu être dépassés sur certains postes de travail du site de Saint-Grégoire entre 1978 et 1981 et, d'autre part, que la société n'établissait pas avoir mis en place de système d'aspiration efficace garantissant la protection des salariés chargés du nettoyage et du broyage des déchets avant 1995, avoir informé ces salariés des risques pour sa santé ni avoir rempli son obligation de fournir des masques sur ce même site avant 1990 pour les salariés exposés ponctuellement. Dans ces conditions, la société n'établit pas que les maladies professionnelles développées par les salariés trouvent directement leur cause dans une carence fautive de l'Etat à prévenir les risques liés à l'usage de l'amiante.


(1) Cf. CE, Assemblée, 9 novembre 2015, SAS Constructions mécaniques de Normandie, n° 342468, p. 379.

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