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Ariane Web: Conseil d'État 453378, lecture du 28 mars 2022

Analyse n° 453378
28 mars 2022
Conseil d'État

N° 453378
Publié au recueil Lebon

Lecture du lundi 28 mars 2022



08-01-02 : Armées et défense- Personnels militaires et civils de la défense- Questions particulières à certains personnels militaires-

Justification du préjudice moral d'anxiété (1) dû aux risques liés à l'amiante invoqué à l'appui d'une action en responsabilité contre l'employeur - Cas où le préjudice est justifié - Inclusion - Vie de marin dans un espace clos et confiné comportant des matériaux amiantés.




La personne qui recherche la responsabilité d'une personne publique en sa qualité d'employeur et qui fait état d'éléments personnels et circonstanciés de nature à établir une exposition effective aux poussières d'amiante susceptible de l'exposer à un risque élevé de développer une pathologie grave et de voir, par là même, son espérance de vie diminuée, peut obtenir réparation du préjudice moral tenant à l'anxiété de voir ce risque se réaliser. Doivent être regardés comme justifiant d'un préjudice d'anxiété indemnisable, eu égard à la spécificité de leur situation, les marins qui, sans intervenir directement sur des matériaux amiantés, établissent avoir, pendant une durée significativement longue, exercé leurs fonctions et vécu, de nuit comme de jour, dans un espace clos et confiné comportant des matériaux composés d'amiante, sans pouvoir, en raison de l'état de ces matériaux et des conditions de ventilation des locaux, échapper au risque de respirer une quantité importante de poussières d'amiante.





60-04-01-02-02 : Responsabilité de la puissance publique- Réparation- Préjudice- Caractère certain du préjudice- Existence-

Préjudice moral d'anxiété (1) dû aux risques liés à l'amiante invoqué à l'appui d'une action en responsabilité contre un employeur public - 1) a) Preuve exigée (3) - i) Éléments personnels et circonstanciés établissant une exposition effective - ii) Risque élevé de développer une pathologie grave - b) Preuve non exigée - Manifestation de troubles psychologiques - 2) Cas où le préjudice est justifié - a) Intervention sur des matériaux amiantés dans l'exercice des fonctions - b) Vie de marin dans un espace clos et confiné comportant des matériaux amiantés - c) Intégration dans le dispositif d'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité (4).




1) a) La personne qui recherche la responsabilité d'une personne publique en sa qualité d'employeur et qui i) fait état d'éléments personnels et circonstanciés de nature à établir une exposition effective aux poussières d'amiante ii) susceptible de l'exposer à un risque élevé de développer une pathologie grave et de voir, par là même, son espérance de vie diminuée, peut obtenir réparation du préjudice moral tenant à l'anxiété de voir ce risque se réaliser. b) Dès lors qu'elle établit que l'éventualité de la réalisation de ce risque est suffisamment élevée et que ses effets sont suffisamment graves, la personne a droit à l'indemnisation de ce préjudice, sans avoir à apporter la preuve de manifestations de troubles psychologiques engendrés par la conscience de ce risque élevé de développer une pathologie grave. 2) a) Doivent ainsi être regardées comme faisant état d'éléments personnels et circonstanciés de nature à établir qu'elles ont été exposées à un risque élevé de pathologie grave et de diminution de leur espérance de vie, dont la conscience suffit à justifier l'existence d'un préjudice d'anxiété indemnisable, les personnes qui justifient avoir été, dans l'exercice de leurs fonctions, conduites à intervenir sur des matériaux contenant de l'amiante et, par suite, directement exposées à respirer des quantités importantes de poussières issues de ces matériaux. b) Doivent également être regardés comme justifiant d'un préjudice d'anxiété indemnisable, eu égard à la spécificité de leur situation, les marins qui, sans intervenir directement sur des matériaux amiantés, établissent avoir, pendant une durée significativement longue, exercé leurs fonctions et vécu, de nuit comme de jour, dans un espace clos et confiné comportant des matériaux composés d'amiante, sans pouvoir, en raison de l'état de ces matériaux et des conditions de ventilation des locaux, échapper au risque de respirer une quantité importante de poussières d'amiante. c) Les personnes qui sont intégrées, compte tenu d'éléments personnels et circonstanciés tenant à des conditions de temps, de lieu et d'activité, dans le dispositif d'allocation spécifique de cessation anticipée d'activité, désormais régi par la loi n° 2015-1789 du 29 décembre 2015, lequel vise à compenser un risque élevé de baisse d'espérance de vie des personnels ayant été effectivement exposés à l'amiante, doivent, de même, être regardées comme justifiant de ce seul fait d'un préjudice d'anxiété lié à leur exposition à l'amiante.





60-04-03-04 : Responsabilité de la puissance publique- Réparation- Évaluation du préjudice- Préjudice moral-

Préjudice moral d'anxiété (1) dû aux risques liés à l'amiante invoqué à l'appui d'une action en responsabilité contre un employeur public - Éléments à prendre notamment en considération.




Le montant de l'indemnisation du préjudice d'anxiété prend notamment en compte, parmi les autres éléments y concourant, la nature des fonctions exercées par l'intéressé et la durée de son exposition aux poussières d'amiante.


(1) Cf., s'agissant du caractère indemnisable de ce préjudice, CE, 9 novembre 2016, Mme , n° 393108, p. 496. (3) Cf., en précisant, CE, 9 novembre 2016, Mme , n° 393108, p. 496 ; CE, 3 mars 2017, Ministre de la défense c/ M. , n° 401395, p. 81. (4) Cf. CE, 3 mars 2017, Ministre de la défense c/ M. , n° 401395, p. 81.

Voir aussi