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Ariane Web: Conseil d'État 463186, lecture du 27 mars 2023

Analyse n° 463186
27 mars 2023
Conseil d'État

N° 463186
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du lundi 27 mars 2023



44 : Nature et environnement-

Principe de non-régression (9° du II de l'art. L. 110-1 du code de l'environnement) - 1) Champ - a) Inclusion - Détermination des règles réglementaires relatives à l'environnement (1) - b) Exclusions - Législateur ayant i) entendu écarter son application dans un domaine particulier ou ii) instauré un régime protecteur de l'environnement et confié au pouvoir réglementaire le soin de préciser les dérogations qu'il a lui-même prévues - 2) Illustration - Décrets pris en application de l'article L. 1333-4 du CSP introduisant des dérogations à l'interdiction de réutilisation de substances provenant d'une activité nucléaire - a) Invocabilité - Existence - b) Violation - Absence.




a) Le principe de non-régression, tel que défini au 9° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement s'impose au pouvoir réglementaire lorsqu'il détermine des règles relatives à l'environnement. b) Il n'est toutefois pas invocable i) lorsque le législateur a entendu en écarter l'application dans un domaine particulier ii) ou lorsqu'il a institué un régime protecteur de l'environnement et confié au pouvoir réglementaire le soin de préciser les conditions de mise en oeuvre de dérogations qu'il a lui-même prévues à ce régime. 2) Article L. 1333-4 du code de la santé publique (CSP) disposant que certaines des activités nucléaires ainsi que certains procédés, dispositifs ou substances exposant des personnes à des rayonnements ionisants peuvent être, en raison du peu d'avantages qu'ils procurent ou de l'importance de leur effet nocif, réglementés ou interdits par voie réglementaire et que les interdictions ou réglementations prises sur ce fondement peuvent être révisées compte tenu d'éléments nouveaux et significatifs permettant de réévaluer la justification des activités, procédés, dispositifs ou substances concernés. Requérantes demandant l'annulation, pour méconnaissance du principe de non-régression, des décrets d'application n° 2022-174 du 14 février 2022 et n° 2022-175 du 14 février 2022. Premier décret ayant introduit trois articles R. 1333-6-1 à R. 1333-6-3 au sein du code de la santé publique (CSP) permettant des dérogations à l'interdiction de réutilisation de substances provenant d'une activité nucléaire dans la fabrication de biens de consommation et dans les produits de construction. Second décret précisant les catégories de substances pouvant bénéficier d'une dérogation. a) Par l'article L. 1333-4 du CSP, le législateur n'a pas entendu écarter l'application du principe de non-régression ou confier au pouvoir réglementaire compétence pour déterminer les conditions de mise en oeuvre de dérogations à un régime protecteur de l'environnement. Il en résulte que le principe de non-régression peut être utilement invoqué à l'encontre des dispositions des décrets attaqués. b) Toutefois, le dispositif permettant la réutilisation de matériaux, institué par les dispositions réglementaires attaquées, comporte des garanties destinées à prévenir les risques pour la santé et l'environnement. Par suite, eu égard à la très faible radioactivité des substances dont la valorisation est susceptible d'être autorisée sur le fondement des décrets attaqués et aux garanties qu'ils prévoient, ces décrets ne conduisent pas à une régression de la protection de l'environnement, en méconnaissance des dispositions du 9° de du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement.


(1) Rappr. Cons. const, 4 août 2016, n° 2016-737 DC, Loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, cons. 10.

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