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Ariane Web: Conseil d'État 335860, lecture du 23 mars 2012, ECLI:FR:CESJS:2012:335860.20120323

Décision n° 335860
23 mars 2012
Conseil d'État

N° 335860
ECLI:FR:CESJS:2012:335860.20120323
Inédit au recueil Lebon
3ème sous-section jugeant seule
M. Alain Ménéménis, président
M. Guillaume Odinet, rapporteur
Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO, avocats


Lecture du vendredi 23 mars 2012
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier et 26 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentés pour la SOCIETE FINANCIERE AUBERT, dont le siège est Zone industrielle Saint-Thomas, rue Marcel Dassault au Chambon-Feugerolles (42500), représentée par son gérant ; la SOCIETE FINANCIERE AUBERT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 08LY01680 du 24 novembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a interjeté du jugement n° 0601104 du 29 avril 2008 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lyon ne lui a accordé qu'une décharge partielle des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 décembre 2002 et 2003 ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 34 ;

Vu le code civil ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Odinet, Auditeur,

- les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la SOCIETE FINANCIERE AUBERT,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la SOCIETE FINANCIERE AUBERT ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE FINANCIERE AUBERT a acquis, le 29 mars 2001, 1 000 actions en pleine propriété de la SAS Chaudronnerie Aubert, représentant 50 % du capital de cette société et, le 1er décembre 2001, l'usufruit des 1 000 autres actions de celle-ci ; que la SOCIETE FINANCIERE AUBERT ayant opté, pour l'imposition des exercices clos les 31 décembre 2002 et 2003, pour le régime fiscal des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts, elle a déduit de son résultat imposable au titre de chacun de ces deux exercices le produit net des dividendes reçus de sa filiale correspondant à la détention des 1 000 titres en pleine propriété et des 1 000 titres en usufruit ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice du régime fiscal des sociétés mères ; que, par un jugement du 29 avril 2008, le tribunal administratif de Lyon a partiellement fait droit à la demande de la SOCIETE FINANCIERE AUBERT tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et 2003 en conséquence de ces redressements, au motif qu'elle était seulement fondée à demander la décharge des suppléments d'imposition correspondant à la réintégration dans son résultat des produits issus des participations qu'elle détenait en pleine propriété, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges ; que la SOCIETE FINANCIERE AUBERT se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 novembre 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a interjeté de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions en décharge ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant que la SOCIETE FINANCIERE AUBERT soutient que la cour a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation en s'abstenant de répondre au moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 54 de l'annexe II au code général des impôts, qui imposent aux personnes morales qui entendent se prévaloir du régime fiscal des sociétés mères prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts de prendre l'engagement de conserver pendant deux ans au moins la pleine propriété des titres de leur filiale, constituaient une disposition illégale contraire à l'article 34 de la Constitution ; que, toutefois, ce moyen, que la cour a analysé sans dénaturer les écritures de la société, était inopérant dès lors, d'une part, que les redressements dont procédaient les impositions en litige n'avaient pas été notifiés en application de ces dispositions et, d'autre part, qu'il résultait des seules dispositions législatives applicables au litige, à l'exclusion des dispositions réglementaires de l'article 54 de l'annexe II au code général des impôts, que le régime fiscal des sociétés mères n'était applicable qu'aux titres détenus en pleine propriété ; que, par suite, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit et sans entacher son arrêt d'irrégularité, s'abstenir de répondre à ce moyen ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

Considérant, d'une part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 216 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci..." ; qu'aux termes de l'article 145 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés (...) qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : / a. Les titres de participations doivent revêtir la forme nominative ou être déposés dans un établissement désigné par l'administration ; / b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 % du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation. / (...). / c. Les titres de participations doivent avoir été souscrits à l'émission. A défaut, la personne morale participante doit avoir pris l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans. / (...) / 6. Le régime fiscal des sociétés mères n'est pas applicable : / (...) b. ter Aux produits des titres auxquels ne sont pas attachés des droits de vote (...) " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le régime fiscal des sociétés mères, qui tend à prévenir le risque de double imposition des dividendes provenant des filiales et a pour objectif de favoriser les concentrations d'entreprises, est soumis notamment aux conditions que la société qui entend en réclamer le bénéfice détienne des titres de participation et que ces titres représentent au moins 5 p. 100 du capital de la société émettrice ; que si la qualité d'usufruitier permet une participation aux éventuels bénéfices, elle ne confère pas à son titulaire des droits équivalents, notamment vis-à-vis du capital et de l'exercice du droit de vote, à ceux d'un propriétaire détenteur du titre ; que, dès lors, en jugeant qu'il résulte de l'ensemble des conditions posées par les articles 216 et 145 du code général des impôts que le législateur a entendu exclure du bénéfice du régime fiscal des sociétés mères les sociétés qui ne détiennent que l'usufruit des titres dont elles perçoivent les produits, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE FINANCIERE AUBERT n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

Sur les conclusions de la SOCIETE FINANCIERE AUBERT présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la SOCIETE FINANCIERE AUBERT au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE FINANCIERE AUBERT est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE FINANCIERE AUBERT et à la ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.