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Ariane Web: Conseil d'État 386328, lecture du 11 décembre 2014, ECLI:FR:CEORD:2014:386328.20141211

Décision n° 386328
11 décembre 2014
Conseil d'État

N° 386328
ECLI:FR:CEORD:2014:386328.20141211
Inédit au recueil Lebon

FOUSSARD, avocats


Lecture du jeudi 11 décembre 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le Centre Dumas-Pouchkine des Diasporas et Cultures Africaines (CDPDCA), élisant domicile..., l'association Alliance Noire Citoyenne, élisant domicile..., l'association L'Amozaik, élisant domicile..., et Mme A...B..., demeurant ... ; les requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1430123/9 du 9 décembre 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la suspension de la tenue de la représentation " Exhibit B " programmée par l'établissement le Centquatre à Paris du 7 au 14 décembre 2014 et, d'autre part, à ce que soit mise à la charge de la ville de Paris la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'enjoindre au préfet de Paris et à l'établissement le Centquatre de mettre en oeuvre toutes les diligences de nature à faire cesser tout trouble à l'ordre public dans le cadre de la manifestation " Exhibit B " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de l'établissement le Centquatre le versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


ils soutiennent que :

- la condition d'urgence, prévue par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, est remplie dès lors que la représentation litigieuse n'est programmée par le Centquatre que jusqu'au 12 décembre 2014 ;
- le maintien de cette programmation constitue une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ; qu'en effet, l'esclavage est un crime contre l'humanité ; que la prestation en cause, qui met en représentation dans des cages des hommes et des femmes noirs, à l'instar des " zoos humains " de l'époque coloniale, constitue une atteinte grave et manifestement illégale à la dignité de la personne humaine ; que cette atteinte justifie que soit apportée une limite à la liberté d'expression ;


Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les nouvelles pièces, enregistrées le 11 décembre 2014, présentées par le Centre Dumas-Pouchkine des Diasporas et Cultures Africaines et autres ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

2. Considérant qu'après avoir relevé qu'eu égard aux conditions dans lesquelles il était présenté aux spectateurs le spectacle " Exhibit B " avait pour objet de dénoncer les pratiques et traitements inhumains ayant eu cours lors de la période coloniale ainsi qu'en Afrique du Sud, au moment de l'apartheid, le premier juge en a déduit que l'absence d'interdiction, par l'autorité administrative, de cette manifestation, ne portait aucune atteinte grave et manifestement illégale à la dignité de la personne humaine ; qu'aucun moyen de la requête n'est de nature à remettre en cause ni ces constatations ni cette appréciation ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il est manifeste que l'appel du Centre Dumas-Pouchkine des diasporas et cultures africaines et autres ne peut être accueilli ; qu'ainsi la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 de ce code ;


O R D O N N E :
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Article 1er : La requête du Centre Dumas-Pouchkine des diasporas et cultures africaines et autres est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Centre Dumas-Pouchkine des diasporas et cultures africaines, à l'association Alliance noire citoyenne, à l'association L'Amozaik et à Mme A...B....
Copie en sera adressée pour information à la ville de Paris, au ministre de l'intérieur et au préfet de police.