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Ariane Web: Conseil d'État 387799, lecture du 10 février 2015, ECLI:FR:CEORD:2015:387799.20150210

Décision n° 387799
10 février 2015
Conseil d'État

N° 387799
ECLI:FR:CEORD:2015:387799.20150210
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN, avocats


Lecture du mardi 10 février 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la requête, enregistrée le 9 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société ASSE Loire, représentée par son président, dont le siège social est situé 11 rue de Verdun, BP 109 à l'Etat (42580) ; la société requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de l'arrêté du ministre de l'intérieur du 6 février 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a interdit, le 10 février 2015 de zéro heure à minuit, jour de la rencontre entre le Red Star Football Club et l'AS Saint-Étienne, le déplacement individuel ou collectif, par tout moyen, de personnes se prévalant de la qualité de supporter de l'AS Saint-Étienne ou se comportant comme tel, entre, d'une part, les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire et, d'autre part, la ville de Paris


2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


elle soutient que :
- la condition d'urgence est remplie compte tenu du caractère imminent de la tenue de la compétition ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté litigieux ;
- le ministre de l'intérieur a méconnu l'étendue de ses compétences en s'estimant lié par la décision du préfet de police ;
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- la rencontre entre l'AS Saint-Etienne et le Red Star ne crée aucun risque de trouble grave à l'ordre public de nature à justifier l'interdiction litigieuse ;
- l'interdiction litigeuse présente un caractère manifestement disproportionné dès lors que d'autres mesures appropriées auraient été de nature à atteindre le même but ;


Vu l'arrêté dont la suspension de l'exécution est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation de cet arrêté ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 février 2015, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est de nature à susciter un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté litigieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code du sport ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société ASSE Loire, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 10 février 2015 à 14 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société ASSE Loire ;

- le représentant de la société ASSE Loire ;

- les représentants du ministre de l'intérieur ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;


1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés se prononce ;

2. Considérant que la société ASSE Loire, qui gère et administre l'AS Saint-Etienne, demande, sur le fondement des dispositions précitées, la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le ministre de l'intérieur a interdit, le 10 février 2015 de zéro heure à minuit, jour de la rencontre entre le Red Star Football Club et l'AS Saint-Étienne, le déplacement individuel ou collectif, par tout moyen, de personnes se prévalant de la qualité de supporter de l'AS Saint-Étienne ou se comportant comme tel, entre, d'une part, les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire et, d'autre part, la ville de Paris ; que, pour justifier de l'urgence qui s'attacherait à cette suspension, la société invoque, sans le chiffrer, le préjudice financier que l'arrêté litigieux lui porterait ; qu'elle fait également valoir la situation défavorable dans laquelle l'AS Saint-Etienne serait placée si son équipe devait jouer en l'absence d'une partie de ses supporters ; qu'elle invoque enfin, sans autrement les qualifier, les possibles tensions qu'engendrerait l'exécution de l'arrêté contesté ainsi que l'incertitude dans laquelle elle se trouve pour anticiper le nombre de supporters qui seront effectivement présents lors de la rencontre du 10 février 2015 ; que l'ensemble de ces circonstances ne suffit pas à caractériser l'existence d'une atteinte grave aux intérêts invoqués par la société requérante ; qu'il suit de là que la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, qu'il y a lieu de rejeter la requête de la société ASSE Loire y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la société ASSE Loire est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société ASSE Loire et au ministre de l'intérieur.