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Ariane Web: Conseil d'État 388948, lecture du 25 mars 2015, ECLI:FR:CEORD:2015:388948.20150325

Décision n° 388948
25 mars 2015
Conseil d'État

N° 388948
ECLI:FR:CEORD:2015:388948.20150325
Inédit au recueil Lebon



Lecture du mercredi 25 mars 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

L'Union Nationale Inter-Universitaire (UNI) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'annuler la décision du 19 mars 2015 du président de l'université de Lorraine interdisant la réunion organisée par elle à la faculté de droit de Nancy le 26 mars 2015 et de lui enjoindre d'autoriser cette réunion. Par une ordonnance n° 1500860 du 24 mars 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Par une requête enregistrée le 24 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union Nationale Inter-Universitaire demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Université de Lorraine la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :
- la condition d'urgence est remplie, dès lors que la conférence doit se tenir le 26 mars 2015 ;
- la décision litigieuse porte une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés d'expression et de réunion ;
- elle est entachée d'une violation de la loi, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a entaché son ordonnance d'une dénaturation des faits et de contradictions de motifs.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de tenir compte des éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction menée en première instance que l'Union nationale Inter-Universitaire (UNI) a demandé le 2 mars 2015 à la faculté de droit de Nancy la mise à disposition de locaux pour une manifestation intitulée " l'école manipulée " qui devait se dérouler le 26 mars 2015 ; que le doyen de la faculté a donné son accord le 9 mars à l'organisation de cette conférence ; qu'après avoir eu connaissance de l'intitulé réel de la manifestation, le doyen est revenu sur sa décision et a informé l'UNI, par un courriel du 19 mars 2015, de l'opposition de la présidence de l'université ; que le même jour, le président de l'université de Lorraine a informé l'UNI, par la même voie, que compte tenu d'une " période de réserve électorale " qui s'appliquerait selon lui jusqu'au 29 mars 2015, la réunion prévue ne pouvait se tenir et a demandé au doyen de prendre les dispositions nécessaires à cet effet ; que, par l'ordonnance attaquée du 24 mars 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mars 2015 et à ce qu'il soit enjoint au président de l'université d'autoriser cette réunion ;

3. Considérant que, lorsqu'un requérant fonde son action sur la procédure particulière instituée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative, il lui appartient de justifier de circonstances caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par cette disposition soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures ; que, pour rejeter la demande de l'UNI, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a notamment relevé que l'université de Lorraine ne s'opposait pas à la tenue de la réunion en cause dans ses locaux à une date postérieure au 29 mars 2015 ; qu'à l'appui de son appel, l'association requérante ne conteste pas ce point et se borne à faire valoir, en ce qui concerne la condition d'urgence, que la réunion annulée devait se tenir le 26 mars ; qu'elle ne fait état d'aucun autre élément, tenant aux conditions d'organisation de cette réunion ou aux mesures qu'elle aurait déjà prises afin de pouvoir la tenir à la date initialement fixée, de nature à caractériser l'existence d'une situation d'urgence imminente pouvant conduire le juge des référés à ordonner, à très bref délai, une mesure tendant à sauvegarder la liberté de réunion ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, quel que soit le bien fondé des critiques adressées aux motifs par lesquels le président de l'université a estimé pouvoir refuser que la réunion en cause se tienne à la date prévue, la condition particulière d'urgence exigée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative n'est pas remplie ; que, dès lors, l'UNI n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande dont elle l'avait saisi sur ce fondement ; que son appel ne peut en conséquence qu'être rejeté selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 de ce code ;


O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de l'Union Nationale Inter-Universitaire est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Union Nationale Inter-Universitaire.
Copie en sera adressée à l'université de Lorraine.