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Ariane Web: Conseil d'État 383459, lecture du 16 octobre 2017, ECLI:FR:Code Inconnu:2017:383459.20171016

Décision n° 383459
16 octobre 2017
Conseil d'État

N° 383459
ECLI:FR:CECHR:2017:383459.20171016
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 5ème chambres réunies
Mme Sara-Lou Gerber, rapporteur
Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public


Lecture du lundi 16 octobre 2017
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 383459, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire, quatre mémoires en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 août et 4 novembre 2014, les 4 mai et 26 novembre 2015, ainsi que les 8 et 14 mars 2016 et 17 janvier 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. U... E...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du jury du concours interne de recrutement d'ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts du 5 juin 2014 déclarant admis, sur liste principale et complémentaire, MM. H... Y...et H...J..., AC...V..., MM. A... L...et P...N..., AB...K..., MM. Z...W..., H...C..., A...D..., F...O..., M...Q...et X...B..., AD...G...AA...et M. I...S....


2° Sous le n° 395480, par une requête, six mémoires en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 22 décembre 2015, les 14 mars, 4 avril, 29 juin, 20 et 29 septembre 2016 et le 17 janvier et 16 mai 2017, M. U...E...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du Président de la République du 7 septembre 2015 en tant qu'il nomme et titularise ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts MM. H...Y...et H...J..., AD...T...V..., MM. A... L...et P...N..., AB...K..., MM. Z...W..., H...C..., A...D..., F...O..., M...Q..., X...B...et I...S....


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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;
- le décret n° 2009-1106 du 10 septembre 2009 ;
- l'arrêté du 3 décembre 2009 fixant les modalités d'organisation, la nature et le programme des épreuves des concours d'ingénieurs-élèves des ponts, des eaux et des forêts, du concours externe sur titres et travaux et du concours interne à caractère professionnel pour le recrutement dans le corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, auditeur,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 28 septembre 2017, présentée par M. E... ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 10 septembre 2009 portant statut particulier du corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts : " Les ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts sont nommés et titularisés par décret du Président de la République et recrutés selon les modalités suivantes : / (...) 3° Parmi les fonctionnaires ayant satisfait aux épreuves d'un concours interne à caractère professionnel (...) " ; que, par les deux requêtes analysées ci-dessus, M.E..., candidat aux épreuves de ce concours interne organisées en 2014, demande l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la délibération du jury de ce concours, en date du 5 juin 2014, fixant la liste des treize candidats admis et du candidat admis sur liste complémentaire et, d'autre part, par voie de conséquence, du décret du Président de la République du 7 septembre 2015 en tant qu'il nomme et titularise les treize candidats admis ; qu'il y a lieu de joindre ces requêtes pour statuer par une seule décision ;

Sur les moyens tirés des ruptures d'égalité entre les candidats :

2. Considérant qu'il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction ; que cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes ; que, s'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la conviction du juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

3. Considérant que M. E...soutient, en premier lieu, que certains candidats ont été favorisés par le jury du concours au motif qu'ils étaient issus des " aires urbaines " de Paris ou de Lyon ; que, toutefois, ni la circonstance que les membres du jury avaient leur résidence administrative dans l'une ou l'autre de ces deux zones géographiques ni le fait que le taux d'admission sur liste principale et complémentaire des vingt et un candidats admissibles qui résidaient dans l'une ou l'autre de ces deux zones géographiques s'élève à 57,14 % alors que ce taux n'est que de 16,67% pour les douze admissibles qui n'y résidaient pas, ne sont de nature à faire présumer une atteinte au principe d'égalité de traitement ;

4. Considérant que M. E...soutient, en second lieu, que le jury a illégalement introduit dans son appréciation un critère lié à l'âge des candidats ; qu'il fonde son affirmation sur le fait que, selon lui, la probabilité qu'aucun des dix candidats âgés de plus de 35 ans déclarés admissibles ne figure pas sur la liste des admis n'avait, eu égard au nombre des admissibles et des admis, qu'une chance sur mille de se produire ; que, toutefois, ce calcul, qui repose sur plusieurs hypothèses statistiques non établies quant à la valeur des candidats, ne constitue pas en l'espèce, compte tenu, en outre, du petit nombre de candidats sur lequel repose ce calcul de probabilités, une circonstance susceptible de faire présumer une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats à ce concours ;

Sur les autres moyens :

5. Considérant que M. E...soutient qu'aucune disposition ne permet d'imposer, ainsi que cela a été fait par le jury, que les candidats admissibles remplissent en vue de l'épreuve orale d'admission une " fiche de renseignements " comportant leur date de naissance ; qu'il résulte toutefois des dispositions de l'article 12 de l'arrêté du 3 décembre 2009 fixant les modalités d'organisation, la nature et le programme des épreuves des concours d'ingénieurs-élèves des ponts, des eaux et des forêts, du concours externe sur titres et travaux et du concours interne à caractère professionnel pour le recrutement dans le corps des ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts que, pour conduire l'entretien de l'épreuve orale d'admission, le jury dispose du " dossier de reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle " du candidat dans lequel, en vertu de l'article 13 de ce même arrêté et de l'annexe à laquelle il renvoie, doivent figurer la date et le lieu de naissance du candidat ; que, dès lors que cette information devait légalement être communiquée au jury avant l'épreuve orale, la circonstance qu'elle l'ait été par une " fiche de renseignement " et non dans le dossier prévu par les dispositions mentionnées ci-dessus est sans incidence sur la régularité de cette épreuve ;

6. Considérant, enfin, que si M. E...soutient que les rubriques du " dossier de reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle " que les candidats admissibles ont été invités à remplir en 2014 différaient de celles exigées par l'arrêté du 3 décembre 2009 mentionné ci-dessus, il n'assortit cette affirmation d'aucune précision permettant d'apprécier la portée et, par suite, le bien fondé de son moyen ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées en défense, M. E...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions qu'il attaque ; que ses requêtes doivent, par suite, être rejetées ;


D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de M. E...sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. U... E..., à M. H... Y..., à M. H...J..., à Mme T...V..., M. A... L..., à M. P...N..., à Mme R...K..., à M. Z...W..., à M. A...D..., à M. H...C..., à M. F... O..., à M. M... Q..., à M. X...B..., à Mme G...AA..., à M. I... S..., au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.


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