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Ariane Web: Conseil d'État 440007, lecture du 21 avril 2020, ECLI:FR:CEORD:2020:440007.20200421

Décision n° 440007
21 avril 2020
Conseil d'État

N° 440007
ECLI:FR:CEORD:2020:440007.20200421
Inédit au recueil Lebon

SCP SPINOSI, SUREAU, avocats


Lecture du mardi 21 avril 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'administration de la maison d'arrêt de Grasse, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer sa protection, durant l'épidémie de covid-19 et réduire le risque de contamination, telles que, premièrement, distribuer des produits d'hygiène et d'entretien, du savon et du gel hydroalcoolique en quantité suffisante, deuxièmement, assurer le lavage des draps avec la régularité indispensable aux conditions minimales d'hygiène ainsi que le nettoyage régulier du linge personnel des détenus, troisièmement, garantir un nettoyage régulier et renforcé de l'ensemble des équipements de l'établissement, (portes, barreaux, linge, téléphones dans les coursives, etc.), quatrièmement, distribuer des masques de protection à l'ensemble des détenus ou mettre à leur disposition un tutoriel de fabrication des masques alternatifs préconisés par l'Académie de médecine, par le biais de fiches, ainsi que le matériel nécessaire à la réalisation de ces masques, cinquièmement mettre en place des dépistages systématiques du covid-19 auprès des détenus, sixièmement, ordonner la communication du plan des mesures prévues en cas de diffusion rapide de l'épidémie au sein de la maison d'arrêt de Grasse ou, en l'absence d'un tel plan à ce stade, prévoir une série de plans au niveau de l'établissement pénitentiaire, en concertation avec les autorités et établissements sanitaires locaux ainsi qu'avec toute autre autorité publique compétente au niveau local, septièmement, mettre en place des modalités de service des repas adaptées à la situation sanitaire, enfin, prévoir que le recours aux fouilles des détenus durant la période de crise sanitaire doit être particulièrement exceptionnel et effectué en conformité avec les règles de sécurité sanitaire.

Par une ordonnance n° 2001637 du 6 avril 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 7, 10 et 17 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler cette ordonnance ;

3°) d'ordonner toutes mesures nécessaires pour assurer sa protection, durant l'épidémie de covid-19, et réduire le risque de contamination, en particulier, la distribution de produits d'hygiène et d'entretien, de savon et de gel hydroalcoolique en quantité suffisante, le lavage des draps du linge personnel des détenus, le nettoyage régulier et renforcé de l'ensemble des équipements de l'établissement, la distribution de masques de protection à l'ensemble des détenus ou la mise à disposition d'un tutoriel de fabrication des masques alternatifs ainsi que du matériel nécessaire à la réalisation de ces masques, la mise en place de dépistages systématiques du covid-19 auprès des détenus, la communication du plan des mesures prévues en cas de diffusion rapide de l'épidémie au sein de la maison d'arrêt de Grasse ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil.



Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie ;
- l'absence d'édiction, par l'administration, de mesures suffisantes pour le protéger de l'épidémie et réduire le risque de contamination révèle une carence qui porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit respect de la vie, au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants ainsi qu'au droit de recevoir les traitements et les soins appropriés à son état de santé. Une telle carence est caractérisée en particulier s'agissant de la distribution de matériels de protection, tels que les masques et gels hydro-alcooliques, et de produits d'hygiène et d'entretien en quantité suffisante.
Par une intervention, enregistrée le 13 avril 2020, la Section française de l'Observatoire international des prisons (OIP-SF) déclare intervenir au soutien de la requête.

Par mémoire en défense et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 13, 16 et 20 avril 2020, la garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la situation du requérant ne caractérise pas une situation d'urgence, au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, et qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution, et notamment son préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la santé publique ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
- la loi n° 91- du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 ;
- le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Les parties ont été informées, sur le fondement de l'article 9 de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, de ce qu'aucune audience ne se tiendrait et de ce que la clôture de l'instruction serait fixée le 20 avril 2020 à 18 heures.



Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 511-1 du code de justice administrative dispose que : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. " Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ".
Sur l'intervention :

2. La section française de l'Observatoire international des prisons justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la requête de M. B.... Son intervention est, par suite, recevable.

Sur les circonstances :

3. L'émergence d'un nouveau coronavirus (covid-19), de caractère pathogène et particulièrement contagieux et sa propagation sur le territoire français ont conduit le ministre des solidarités et de la santé à prendre, par plusieurs arrêtés à compter du 4 mars 2020, des mesures sur le fondement des dispositions de l'article L. 3131-1 du code de la santé publique. En particulier, par un arrêté du 14 mars 2020, un grand nombre d'établissements recevant du public ont été fermés au public, les rassemblements de plus de 100 personnes ont été interdits et l'accueil des enfants, élèves et étudiants dans les établissements les recevant et les établissements scolaires et universitaires a été suspendu. Puis, par un décret du 16 mars 2020 motivé par les circonstances exceptionnelles découlant de l'épidémie de covid-19, modifié par décret du 19 mars, le Premier ministre a interdit le déplacement de toute personne hors de son domicile, sous réserve d'exceptions limitativement énumérées et devant être dûment justifiées, à compter du 17 mars à 12h, sans préjudice de mesures plus strictes susceptibles d'être ordonnées par le représentant de l'Etat dans le département. Le ministre des solidarités et de la santé a pris des mesures complémentaires par des plusieurs arrêtés successifs.

4. Par l'article 4 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, a été déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois sur l'ensemble du territoire national. Par un nouveau décret du 23 mars 2020 pris sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique issu de la loi du 23 mars 2020, plusieurs fois modifié et complété depuis lors, le Premier ministre a réitéré les mesures précédemment ordonnées tout en leur apportant des précisions ou restrictions complémentaires. Leurs effets ont été prolongés en dernier lieu par décret du 14 avril 2020.

Sur le cadre juridique du litige, l'office du juge des référés et les libertés fondamentales en jeu :

5. Dans l'actuelle période d'état d'urgence sanitaire, il appartient aux différentes autorités compétentes, en particulier au Premier ministre, de prendre, en vue de sauvegarder la santé de la population, toutes dispositions de nature à prévenir ou à limiter les effets de l'épidémie. Ces mesures, qui peuvent limiter l'exercice des droits et libertés fondamentaux doivent, dans cette mesure, être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif de sauvegarde de la santé publique qu'elles poursuivent.

6. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative qu'il appartient au juge des référés, lorsqu'il est saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 et qu'il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, résultant de l'action ou de la carence de cette personne publique, de prescrire les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte, dès lors qu'existe une situation d'urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures de sauvegarde à très bref délai. Ces mesures doivent, en principe, présenter un caractère provisoire, sauf lorsque aucune mesure de cette nature n'est susceptible de sauvegarder l'exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte. Sur le fondement de l'article L. 521-2, le juge des référés peut ordonner à l'autorité compétente de prendre, à titre provisoire, des mesures d'organisation des services placés sous son autorité, dès lors qu'il s'agit de mesures d'urgence qui lui apparaissent nécessaires pour sauvegarder, à très bref délai, la liberté fondamentale à laquelle il est gravement, et de façon manifestement illégale, porté atteinte. Le caractère manifestement illégal de l'atteinte doit s'apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l'autorité administrative compétente et des mesures qu'elle a déjà prises.

7. Pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le droit au respect de la vie, le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants ainsi que le droit de recevoir les traitements et les soins appropriés à son état de santé constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de cet article.

8. Eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis à vis de l'administration, il appartient à celle-ci, et notamment au garde des sceaux, ministre de la justice et aux directeurs des établissements pénitentiaires, en leur qualité de chefs de service, de prendre les mesures propres à protéger leur vie, leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant ainsi qu'à leur permettre de recevoir les traitements et les soins appropriés à leur état de santé afin de garantir le respect effectif des libertés fondamentales énoncées au point précédent. Lorsque la carence de l'autorité publique crée un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes, les expose à être soumises, de manière caractérisée, à un traitement inhumain ou dégradant ou conduit à ce qu'elles soient privées, de manière caractérisée, des traitements et des soins appropriés à leur état de santé portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à ces libertés fondamentales, et que la situation permet de prendre utilement des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par l'article L. 521-2, prescrire, dans les conditions et les limites définies au point 6, les mesures de nature à faire cesser la situation résultant de cette carence.

Sur la demande en référé :

9. M. A... B..., détenu à .... Il relève appel de l'ordonnance du 6 avril 2020 par laquelle le juge des référés a rejeté cette demande au motif qu'aucune atteinte grave et manifestement illégale n'était portée au droit au respect de la vie, au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants ainsi qu'au droit de recevoir les traitements et les soins appropriés à son état de santé. Au soutien de son appel, il invoque la carence de l'administration pénitentiaire en ce qui concerne la fourniture de produits d'hygiène et d'entretien, de savon et de gel hydro-alcoolique, de masques de protection ainsi que de tests de dépistage. Outre les trois attestations d'avocats au barreau de Grasse produites en première instance, le requérant produit, au soutien de ses écritures d'appel, deux nouvelles attestations, en date du 16 avril 2020, émanant également d'avocats inscrits au barreau de Grasse.

10. Il résulte de l'instruction que, depuis que l'épidémie de covid-19 a atteint la France et au fur et à mesure de l'évolution des stades 1, 2 et 3 de l'épidémie, la ministre de la justice a édicté, au moyen de plusieurs instructions adressées aux services compétents, un certain nombre de mesures visant à prévenir le risque de propagation du virus au sein des établissements pénitentiaires. Ces instructions définissent des orientations générales et arrêtent des mesures d'organisation du service public pénitentiaire qu'il revient aux chefs des 187 établissements pénitentiaires de mettre en oeuvre et d'appliquer sous l'autorité des directions interrégionales des services pénitentiaires. Il appartient aux chefs d'établissements pénitentiaires responsables de l'ordre et de la sécurité au sein de ceux-ci, de s'assurer du respect des consignes données pour lutter contre la propagation du virus et de prendre, dans le champ de leurs compétences, toute mesure propre à garantir le respect effectif des libertés fondamentales des personnes détenues et des personnes y travaillant ou y intervenant.

11. Il résulte de l'instruction qu'à la date du 17 avril 2020, on ne recense, parmi les personnes détenues à la maison d'arrêt de Grasse, ni cas confirmé de contamination au virus du covid-19 ni cas symptomatique. En l'état de l'instruction, ne se trouvent placés en confinement sanitaire que les nouveaux arrivants au titre de la quatorzaine dont ils font l'objet à titre préventif.
12. En premier lieu, la ministre de la justice a demandé, dès le 27 février 2020, qu'il soit strictement veillé au respect des règles de sécurité sanitaire à l'intérieur des établissements pénitentiaires. Des consignes ont été données de veiller à ce que soient strictement respectés, tant par les personnes détenues que par les personnels pénitentiaires, les " gestes barrières " : lavage régulier des mains, limitation stricte des contacts physiques, distance minimale entre les personnes. A compter du 31 mars, le port d'un masque de protection a été imposé aux personnels en contact direct et prolongé avec les personnes détenues afin d'organiser, au sein de chaque établissement, un " anneau sanitaire ".

13. Il résulte de l'instruction, et en particulier des éléments et des pièces produites en appel par le ministère de la justice, en réponse à un supplément d'instruction, qui ne sont utilement contestés ni par les attestations produites en première instance qui concernent des situations antérieures au 16 mars 2020 ou des faits non datés ni par celles produites en appel qui portent sur les conditions de déroulement des audiences correctionnelles, que le chef d'établissement de la maison d'arrêt de Grasse applique effectivement, au sein de son établissement, la consigne générale d'effectuer un nettoyage renforcé et une aération régulière des locaux. Il apparaît que les locaux communs font l'objet d'un nettoyage quotidien, ainsi que cela ressort du planning de nettoyage versé au débat contradictoire, et qu'un certain nombre d'équipements sont nettoyés deux fois par jour. Il résulte également de l'instruction qu'outre les kits d'hygiène fournis aux personnes détenues dépourvues de ressources suffisantes, une quantité de produits d'hygiène et d'entretien (détergent, crème à récurer, eau de javel, éponges, sacs poubelle) est distribuée, sous forme de kit hebdomadaire, gratuitement aux personnes détenues à la maison d'arrêt de Grasse afin de les mettre à même d'appliquer correctement les règles d'hygiène et d'entretenir leur cellule. Il résulte de l'instruction que l'ensemble des personnes détenues ont accès, deux fois par mois, à la buanderie de l'établissement afin d'y faire laver leur linge et leurs vêtements. Une dose de lessive de 840 grammes a en outre été remise à chacune des personnes détenues afin de permettre un lavage de certains effets en cellule. Il résulte enfin de l'instruction qu'il a été décidé, à la maison d'arrêt de Grasse, de doter de masques de protection et de gants non seulement les personnels pénitentiaires en contact direct et prolongé avec les personnes détenues, ainsi que le prescrit la note précitée du 31 mars 2020, mais aussi toutes les personnes détenues affectées à des tâches collectives, telle la restauration ou le nettoyage des locaux.

14. En deuxième lieu, un protocole relatif au signalement et à la détection des cas symptomatiques a été défini, par une note du 6 avril 2020 et l'actualisation, à la même date, de la fiche intitulée " Etablissements pénitentiaires : organisation de la réponse sanitaire par les unités sanitaires en milieu pénitentiaire en collaboration avec les services pénitentiaires " afin que puissent être détectées, dans les meilleurs délais, les personnes détenues présentant les symptômes du covid-19. Ce protocole, qu'il appartient au chef d'établissement de la maison d'arrêt de Grasse de mettre en oeuvre au sein de son établissement, repose sur une responsabilité partagée entre les personnes détenues, le personnel pénitentiaire et les équipes des unités sanitaires en milieu pénitentiaire. Une information, régulièrement actualisée, sur les symptômes du virus doit être diffusée, notamment par voie d'affichage, afin de mettre les personnes détenues à même de repérer l'apparition de symptômes et de prendre rendez-vous avec l'unité sanitaire. Afin de permettre une plus grande réactivité, il est en outre demandé aux personnels de surveillance de prévenir, par téléphone, soit l'unité sanitaire soit, en dehors de ses horaires d'ouverture, le centre 15, de tout cas préoccupant porté à leur connaissance, à la suite d'un signalement par la personne concernée ou par un co-détenu ou sur la base de leur propre évaluation de la situation. Enfin, à titre préventif, il est recommandé aux équipes des unités sanitaires de faire montre d'une vigilance renforcée, en particulier auprès des personnes vulnérables, en organisant, le cas échéant, des consultations supplémentaires et en profitant du temps de distribution des médicaments en quartier de détention pour procéder au repérage d'éventuels symptômes afin de les signaler aux médecins.
15. Compte tenu des mesures effectivement prises par le chef d'établissement de la maison d'arrêt de Grasse pour limiter, conformément aux instructions de la ministre de la justice, les contacts avec l'extérieur et réduire les mouvements à l'intérieur des établissements, des consignes et des mesures effectivement prises pour assurer, au sein de cet établissement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que l'entretien et le nettoyage des locaux, en particulier s'agissant de la distribution des produits d'hygiène et d'entretien, ainsi que de l'application du protocole relatif au signalement et à la détection des cas symptomatiques, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que l'absence de distribution d'une quantité supplémentaire de produits d'hygiène et d'entretien, de gel hydro-alcoolique et, eu égard à la stratégie de gestion et d'utilisation maîtrisée des masques mise en place à l'échelle nationale, en l'état du nombre de masques de protection actuellement disponibles, l'absence de distribution de masques de protection révèleraient une carence portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées par M. B... dont il ne résulte pas de l'instruction qu'il présenterait le profil d'une personne spécifiquement vulnérable au virus covid-19. Il n'apparaît pas davantage, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que devraient être ordonnées, au motif d'une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées, la communication aux personnes détenues au sein de la maison d'arrêt de Grasse d'un mode d'emploi permettant la fabrication de masques de protection dits " alternatifs " et la distribution des matériels nécessaires à leur confection.

16. Compte tenu des éléments rappelés au point précédent et eu égard aux critères de priorité, constamment ajustés, en dernier lieu par une note du ministre des solidarités et de la santé en date du 9 avril 2020, retenus, en l'état des disponibilités, pour effectuer les tests de dépistage, les conclusions tendant à ce qu'il soit procédé à un dépistage systématique de toutes les personnes détenues à la maison d'arrêt de Grasse ne peuvent, en tout état de cause, en l'état de l'instruction et eu égard aux pouvoirs que le juge des référés tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, qu'être rejetées.

17. Il résulte de ce qui précède que M. B..., qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance du 6 avril 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.



O R D O N N E :
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Article 1er : L'intervention de la Section française de l'Observatoire international des prisons est admise.
Article 2 : La demande de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire est rejetée.
Article 3 : La requête de M. B... est rejetée.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B..., à la garde des sceaux, ministre de la justice et à la Section française de l'Observatoire international des prisons.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.