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Ariane Web: Conseil d'État 426528, lecture du 30 décembre 2020, ECLI:FR:CECHR:2020:426528.20201230

Décision n° 426528
30 décembre 2020
Conseil d'État

N° 426528
ECLI:FR:CECHR:2020:426528.20201230
Inédit au recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
Mme Catherine Moreau, rapporteur
M. Stéphane Hoynck, rapporteur public


Lecture du mercredi 30 décembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 426528, par une requête, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 décembre 2018, 20 janvier 2020 et 8 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association One Voice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2018-900 du 22 octobre 2018 modifiant la nomenclature es installations classées pour la protection de l'environnement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



2° Sous le n° 429429, par une requête, un mémoire complémentaire et des mémoires, enregistrés les 4 avril et 8 juillet 2019 et 28 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association France Nature Environnement demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet opposée à sa demande de retrait du décret n° 2018-900 du 22 octobre 2018 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2018-900 du 22 octobre 2018 modifiant la nomenclature des installations classées pour l'environnement, en tant qu'il modifie les rubriques 2120, 2140, 2220, 2260, 2515-1 et 2731-3 de la nomenclature en fixant des seuils inadaptés de soumission au régime de l'autorisation ;
3°) de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la directive n° 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-146 du 18 novembre 2020 ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme B... A..., conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :

1. L'association One Voice et l'association France nature environnement (FNE) demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 22 octobre 2018 modifiant la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement qui modifie notamment le régime applicable aux installations relevant des rubriques ou sous-rubriques n° 2120, 2140, 2260, 2515-2 et 2731-3. Ces requêtes étant dirigées contre le même décret, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.


Sur le cadre juridique :

2. En application du premier alinéa de l'article L. 511-2 du code de l'environnement, la soumission des installations classées pour la protection de l'environnement à l'un des régimes d'autorisation, d'enregistrement ou de déclaration résulte de leur inscription, suivant la gravité des dangers et des inconvénients que peut présenter leur exploitation pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, dans les rubriques correspondantes d'une nomenclature. La répartition entre ces différents régimes est opérée en fonction de seuils et de critères, prenant en compte notamment les caractéristiques de ces installations et leur impact potentiel sur l'environnement. Ainsi, en vertu du premier alinéa de l'article L. 512-1 du même code, " Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 " tandis que l'article L. 512-7 du même code permet de soumettre " à autorisation simplifiée, sous la dénomination d'enregistrement, les installations qui présentent des dangers ou inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, lorsque ces dangers et inconvénients peuvent, en principe, eu égard aux caractéristiques des installations et de leur impact potentiel, être prévenus par le respect de prescriptions générales édictées par le ministre chargé des installations classées ". Le deuxième alinéa de l'article L. 512-7 précise que " Les activités pouvant, à ce titre, relever du régime d'enregistrement concernent les secteurs ou technologies dont les enjeux environnementaux et les risques sont bien connus, lorsque les installations ne sont soumises ni à la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles au titre de son annexe I, ni à une obligation d'évaluation environnementale systématique au titre de l'annexe I de la directive 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ". L'article L. 512-7-2 du code de l'environnement prévoit cependant que le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon les règles de procédure prévues par le chapitre unique du titre VIII du livre Ier pour les autorisations environnementales, c'est-à-dire selon le régime de l'autorisation, au vu de trois séries de considérations tenant à la sensibilité environnementale du milieu, au cumul des incidences du projet avec celles d'autres projets d'installations, ouvrages ou travaux et à la nécessité, à la demande de l'exploitant, d'aménager les prescriptions générales applicables à l'installation. Enfin, l'article L. 512-8 de ce code prévoit que " Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1, doivent néanmoins respecter les prescriptions générales édictées par le préfet en vue d'assurer dans le département la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 ". L'article L. 512-10 du même code prévoit cependant que le ministre chargé des installations classées peut fixer, par arrêté, après consultation des ministres intéressés et du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, des prescriptions générales applicables à certaines catégories d'installations soumises à déclaration.


Sur la légalité externe :

3. En premier lieu, aux termes du II. de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 123-19-6, le projet d'une décision mentionnée au I, accompagné d'une note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs de ce projet, est mis à disposition du public par voie électronique et, sur demande présentée dans des conditions prévues par décret, mis en consultation sur support papier dans les préfectures et les sous-préfectures en ce qui concerne les décisions des autorités de l'Etat, y compris les autorités administratives indépendantes, et des établissements publics de l'Etat, ou au siège de l'autorité en ce qui concerne les décisions des autres autorités (...) / Le projet de décision ne peut être définitivement adopté avant l'expiration d'un délai permettant la prise en considération des observations et propositions déposées par le public et la rédaction d'une synthèse de ces observations et propositions ".

4. Une consultation du public sur le projet de décret attaqué a été menée par voie électronique sur le site internet du ministère chargé de l'environnement du 15 mars au 6 avril 2018. La circonstance que la majorité des observations formulées à l'occasion de cette consultation du public aient été défavorables au relèvement du seuil en-dessous duquel il est recouru au régime de la déclaration pour l'activité d'élevage de chiens n'est pas de nature à rendre illégal le décret attaqué.

5. En second lieu, il ressort de l'avis du Conseil supérieur de prévention des risques technologiques, en date du 22 mai 2018, que deux votes spécifiques ont eu lieu sur le seuil haut à fixer pour le régime de déclaration des élevages de chiens figurant dans la rubrique 2120, l'un pour maintenir ce seuil à 50 animaux, l'autre pour l'élever à 100. Par suite, le moyen tiré de ce que le Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques n'aurait pas rendu un avis sur cette question manque en fait.


Sur la légalité interne :

En ce qui concerne la méconnaissance de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 :

6. D'une part, en vertu du paragraphe 1 de l'article 4 de la directive du 13 décembre 2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, les projets énumérés à l'annexe I de la directive sont soumis à une évaluation systématique, sous réserve des exemptions exceptionnelles prévues au paragraphe 4 de l'article 2. Sous la même réserve, le paragraphe 2 de l'article 4 de la directive dispose que " pour les projets énumérés à l'annexe II, les Etats membres déterminent si le projet doit être soumis à une évaluation conformément aux articles 5 à 10. Les Etats membres procèdent à cette détermination : / a) sur la base d'un examen cas par cas ; / ou / b) sur la base des seuils ou critères fixés par l'État membre. / Les Etats membres peuvent décider d'appliquer les deux procédures visées aux points a) et b). " En vertu du paragraphe 3 du même article : " Pour l'examen au cas par cas ou la fixation des seuils ou critères en application du paragraphe 2, il est tenu compte des critères de sélection pertinents fixés à l'annexe III. Les États membres peuvent fixer des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets n'ont pas à être soumis à la détermination prévue aux paragraphes 4 et 5 ou à une évaluation des incidences sur l'environnement, et/ou des seuils ou des critères pour déterminer quand les projets font l'objet, en tout état de cause, d'une évaluation des incidences sur l'environnement sans être soumis à la détermination prévue aux paragraphes 4 et 5. " L'annexe III de la directive fixe trois séries de critères visant à déterminer si les projets figurant à l'annexe II devraient faire l'objet d'une évaluation des incidences sur l'environnement, relatifs à la caractéristique des projets, à leur localisation et aux types et caractéristiques de l'impact potentiel.

7. Par ailleurs, en vertu du paragraphe 1 de l'article 6 de la même directive, " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement ou de leurs compétences locales et régionales, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation, en tenant compte, le cas échéant, des cas visés à l'article 8 bis, paragraphe 3. A cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. Celles-ci reçoivent les informations recueillies en vertu de l'article 5. Les modalités de cette consultation sont fixées par les Etats membres. ". En outre, aux termes de l'article 9 bis de la même directive : " Les États membres veillent à ce que l'autorité ou les autorités compétentes accomplissent les missions résultant de la présente directive de façon objective et ne se trouvent pas dans une position donnant lieu à un conflit d'intérêts. / Lorsque l'autorité compétente est aussi le maître d'ouvrage, les États membres appliquent au minimum, dans leur organisation des compétences administratives, une séparation appropriée entre les fonctions en conflit lors de l'accomplissement des missions résultant de la présente directive ".

8. D'autre part, en vertu du II de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition de la directive du 13 décembre 2011, " Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale. / Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant d'un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l'annexe III de la directive 2011/92/UE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. " En vertu de I de l'article R. 122-2 du même code, " Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l'article L. 122-1, en fonction des critères et des seuils précisés dans ce tableau ". Le tableau annexé à cet article prévoit, à sa ligne 1, que les projets d'installations classées pour la protection de l'environnement soumises à enregistrement relèvent de l'examen au cas par cas, en précisant que pour ces installations, " l'examen au cas par cas est réalisé dans les conditions et formes prévues à l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement ".

9. Ainsi qu'il a été dit au point 3, l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement prévoit que le préfet peut décider que la demande d'enregistrement sera instruite selon le régime de l'autorisation au vu de trois séries de considérations, et notamment " 1° Si, au regard de la localisation du projet, en prenant en compte les critères mentionnés au point 2 de l'annexe III de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, la sensibilité environnementale du milieu le justifie ".

10. L'association FNE soutient que le décret attaqué méconnait les objectifs de la directive 2011/92/UE en ce qu'il soumet des activités au régime de l'enregistrement prévu aux articles L. 512-7 et suivants, alors que l'examen au cas par cas de la nécessité d'une évaluation environnementale que comporte ce régime ne satisfait pas aux objectifs de cette directive, d'une part, parce que cet examen est effectué par le préfet par ailleurs compétent pour statuer sur la demande d'autorisation, d'autre part, parce ce qu'il ne prend pas en compte l'ensemble des critères définis dans l'annexe III de la directive, visant à déterminer si le projet d'exploitation doit faire l'objet d'une évaluation de ses incidences sur l'environnement.

11. En premier lieu, il résulte de la combinaison de l'article L. 512-7-2 et du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement que le préfet, par ailleurs compétent pour statuer sur la demande d'enregistrement effectuée au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, est chargé d'effectuer l'examen au cas par cas propre à ce type de projets, destiné à déterminer s'ils doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences sur l'environnement. Si les dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 citées au point 7 ont pour finalité de garantir que l'avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement soit rendu, avant leur approbation ou leur autorisation afin de permettre la prise en compte de ces incidences, par une autorité compétente et objective en matière d'environnement, il résulte clairement de ces mêmes dispositions que cette autorité est distincte de celle mentionnée à l'article 4, chargée de procéder à la détermination de la nécessité d'une évaluation environnementale par un examen au cas par cas. Par ailleurs, aucune disposition de la directive ne fait obstacle à ce que l'autorité chargée de procéder à cet examen au cas par cas soit l'autorité compétente pour statuer sur l'autorisation administrative requise pour le projet sous réserve qu'elle ne soit pas chargée de l'élaboration du projet ou en assure la maîtrise d'ouvrage.

12. En second lieu, si, dans le cadre du régime de l'enregistrement, la nécessité d'une évaluation environnementale résulte d'un examen au cas par cas réalisé par le préfet dans les conditions et formes prévues à l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement et si, par ailleurs, ce dernier article ne mentionne à son 1° que le critère de la localisation du projet, il résulte tant de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, qui précise de façon générale que pour la détermination des projets relevant d'un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l'annexe III de la directive du 13 décembre 2011, que des dispositions citées au point 1, dont il résulte que la répartition entre les différents régimes d'installations classées pour la protection de l'environnement est opérée en fonction de seuils et de critères, qui sont au nombre de ceux qui sont mentionnés à l'annexe III de la directive, prenant en compte notamment les caractéristiques de ces installations et leur impact potentiel sur l'environnement, que le préfet, saisi d'une demande d'enregistrement d'une installation, doit se livrer à un examen du dossier afin d'apprécier, tant au regard de la localisation du projet que des autres critères mentionnés à l'annexe III de la directive, relatifs à la caractéristique des projets et aux types et caractéristiques de l'impact potentiel, si le projet doit faire l'objet d'une évaluation environnementale, ce qui conduit alors, en application de l'article L. 512-7-2, à le soumettre au régime de l'autorisation environnementale.

13. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, le moyen portant sur la conformité du régime de l'enregistrement avec les objectifs de la directive du 13 décembre 2011 peut être écarté.


En ce qui concerne la méconnaissance du principe de non-régression de la protection de l'environnement :

14. Aux termes du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, les autorités s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du " principe de non-régression, selon lequel la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment ".


S'agissant des modifications auxquelles procède le décret attaqué ayant pour objet de substituer un régime d'enregistrement à un régime d'autorisation :

15. En premier lieu, le décret attaqué a pour effet de faire relever certaines des activités susceptibles d'affecter l'environnement du régime de l'enregistrement, les soumettant ainsi à l'obligation de réaliser une évaluation environnementale après un examen au cas par cas par le préfet. Alors même que certaines d'entre elles étaient auparavant au nombre des activités devant faire l'objet d'une évaluation environnementale de façon systématique, le décret ne méconnaît pas, par lui-même, le principe de non-régression de la protection de l'environnement énoncé au II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement dès lors que, dans les deux cas, les activités susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement doivent faire l'objet, en application de l'article L. 122-1 du code de l'environnement combinées avec celles de l'article L. 512-7-2 s'agissant de celles soumises au régime de l'enregistrement, d'une évaluation environnementale. Le moyen tiré de l'atteinte au principe de non-régression de la protection de l'environnement doit, par suite, être écarté.

16. En second lieu, s'il n'est pas contesté que, en 2017, sur 539 demandes d'enregistrement, 4 demandes seulement ont été instruites selon le régime d'autorisation en application des dispositions de l'article L. 512-7-2, ces éléments statistiques, qui portent sur une période antérieure à l'entrée en vigueur du décret attaqué, ne permettent pas, en tout état de cause, d'établir que le décret attaqué a méconnu le principe de non régression de la protection de l'environnement.

17. Il résulte de ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le décret attaqué a méconnu le principe de non régression de la protection de l'environnement en faisant relever du régime de l'enregistrement des installations qui relevaient jusqu'alors de celui de l'autorisation.


S'agissant des modifications auxquelles procède le décret attaqué ayant pour objet de substituer un régime de déclaration ou l'absence de toute formalité à un régime d'autorisation :

18. Une réglementation exemptant de toute évaluation environnementale un type de projets antérieurement soumis, de manière systématique ou après un examen au cas par cas, à l'obligation d'évaluation environnementale ne méconnaît pas le principe de non-régression de la protection de l'environnement si ce type de projets, eu égard à sa nature, à ses dimensions et à sa localisation et compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, n'est pas susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine.

19. D'une part, en vertu des seuils fixés dans la rubrique 2120 de l'annexe I du décret attaqué, les projet d'activités d'élevage, de vente ou de garde de plus de 250 chiens doivent faire l'objet d'une autorisation, ceux portant sur un effectif de 101 à 250 chiens d'un enregistrement et ceux relatifs à des élevages de 10 à 100 chiens d'une simple déclaration ayant pour effet de dispenser les projets concernés de toute évaluation environnementale alors que, sous l'empire de la réglementation antérieurement en vigueur, les projets de création de ces établissements devaient faire l'objet d'une autorisation, et donc d'une évaluation environnementale systématique, dès qu'ils détenaient au moins 50 chiens. D'autre part, il résulte de la rubrique 2140 de la même annexe I du décret attaqué que les installations fixes et permanentes de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques doivent faire l'objet d'une autorisation lorsque la quantité totale d'azote produite par les animaux est supérieure à 10 tonnes par an, d'une simple déclaration lorsque cette quantité est supérieure à 2 tonnes par an, mais inférieure ou égale à 10 tonnes et d'aucune formalité lorsque cette quantité totale d'azote est inférieure ou égale à 2 tonnes par an, alors qu'en l'état antérieur de la réglementation, toutes ces installations devaient faire l'objet d'une autorisation et donc d'une évaluation environnementale systématique. Enfin, il résulte du 3. de la rubrique 2731 de la même annexe que les installations de dépôt ou de transit de sous-produits animaux doivent faire l'objet d'une autorisation lorsque la quantité de farines de viande et d'os susceptible d'être présente dans l'installation est supérieure à 3 000 tonnes et d'une simple déclaration lorsque cette quantité est supérieure à 500 kg mais inférieure ou égale à 3 000 tonnes, alors que, en l'état antérieur de la réglementation, ces installations devaient bénéficier d'une autorisation, et donc d'une évaluation environnementale systématique, dès que la quantité de farines animales susceptible d'être détenue était égale ou supérieure à 500 kg.

20. Dès lors qu'il résulte du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement que les projets d'installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration ne font l'objet d'aucune évaluation environnementale, les modifications mentionnées ci-dessus apportées à la nomenclature de ces installations ont pour effet d'exempter de toute évaluation environnementale des projets qui étaient, auparavant, susceptibles d'y être soumis soit de manière systématique soit après un examen au cas par cas. Faute pour l'administration de faire état d'éléments permettant d'établir que ces installations ne font pas courir de risque à l'environnement ou à la santé humaine ou que la nature d'un tel risque a changé ou que la procédure de déclaration, exempte de toute évaluation environnementale, offrirait une protection équivalente à celle qu'assurait la procédure d'autorisation, les associations requérantes sont fondées à soutenir que ces dispositions méconnaissent le principe de non-régression de la protection de l'environnement.

21. Il résulte de ce qui précède que l'association One Voice et l'association France nature environnement sont seulement fondées à demander l'annulation des dispositions indivisibles figurant dans les rubriques 2120 et 2140 et au 3. de la rubrique 2731 de l'annexe I du décret attaqué.

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à l'association One Voice et la somme de 3 000 euros à verser à l'association France nature environnement, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



D E C I D E :
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Article 1er : Les dispositions figurant dans les rubriques 2120 et 2140 et au 3. de la rubrique 2731 de l'annexe I du décret attaqué sont annulées.
Article 2 : L'Etat versera à l'association One Voice une somme de 2 000 euros et à l'association France nature environnement une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 4: La présente décision sera notifiée à l'Association One Voice, à l'Association France nature environnement, au Premier ministre et à la ministre de la transition écologique et solidaire.