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Ariane Web: Conseil d'État 446777, lecture du 17 février 2021, ECLI:FR:CECHR:2021:446777.20210217

Décision n° 446777
17 février 2021
Conseil d'État

N° 446777
ECLI:FR:CECHR:2021:446777.20210217
Inédit au recueil Lebon
10ème - 9ème chambres réunies
Mme Isabelle Lemesle, rapporteur
M. Alexandre Lallet, rapporteur public
SCP BUK LAMENT - ROBILLOT, avocats


Lecture du mercredi 17 février 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 6 juillet 2020 en vue de la désignation du maire délégué de la commune associée de Faaite et réclamé un titre d'adjoint pour cette dernière. Par un jugement n° 2000448 du 20 octobre 2010, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'élection de M.M. C... A... en qualité de maire délégué Faaite et rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 23 novembre 2020 et le 23 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule son élection ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la protestation de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :

- le code électoral ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
- la loi n° 2016-1658 du 5 décembre 2016, notamment son article 3 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme G... F..., conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buck Lament - Robillot, avocat de M. C... A... ;



Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 6 juillet 2020 en vue de la désignation du maire délégué de la commune associée de Faaite, le conseil municipal de Anaa a élu M. C... A.... Par un jugement du 20 octobre 2020, dont M. A... fait appel dans cette mesure, le tribunal administratif de la Polynésie française, saisi d'une demande tendant notamment à l'annulation de son élection par une protestation de M. D... B..., candidat à cette fonction, y a fait droit.

2. D'une part, en vertu des dispositions de l'article L. 438 du code électoral, dans sa version applicable en l'espèce, les chapitres II et III du titre IV du livre Ier du code électoral, dans leur rédaction à la date d'entrée en vigueur de la loi du 5 décembre 2016 relative à l'élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics, sont applicables en Polynésie française sous réserve des adaptations qu'il énonce. Selon l'article L. 252 du même code, applicable à l'élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 1 000 habitants : " Les membres des conseils municipaux des communes de moins de 1000 habitants sont élus au scrutin majoritaire ". Aux termes de l'article L. 260, applicable à l'élection des conseillers municipaux dans les communes de plus de 1 000 habitants : " Les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours, avec dépôt de listes comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir, sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l'ordre de présentation, sous réserve de l'application des dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 264./ Dans les communes composées de communes associées, chaque liste est constituée d'autant de sections qu'il y a de communes associées (...) ".

3. D'autre part, dans sa rédaction issue de la même loi du 5 décembre 2016, applicable en l'espèce, l'article L. 2573-3 du code général des collectivités territoriales précise notamment que, sous réserve d'adaptations qu'il énonce, les articles L. 2113-21 à L. 2113-25, dans leur rédaction antérieure à la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, sont applicables aux communes de la Polynésie française. Selon l'article L. 2113-22 du même code dans la version issue de la loi du 24 février 1996 relative à la partie législative du code général des collectivités territoriales : " Le maire de l'ancienne commune en fonction au moment de la fusion devient de droit maire délégué jusqu'au prochain renouvellement du conseil municipal./ Après ce renouvellement ou en cas de vacance, le maire délégué est choisi par le conseil municipal parmi les conseillers élus dans la section correspondante ou, à défaut, parmi les membres du conseil". L'article L. 2573-3 du code général des collectivités territoriales tel que modifié par la loi du 5 décembre 2016 remplace le deuxième alinéa de l'article L. 2113-22 du même code, pour l'application de cet article en Polynésie française, par les dispositions suivantes : " Après ce renouvellement ou en cas de vacance, pour quelque cause que ce soit, du siège de maire délégué, le maire délégué est désigné par le conseil municipal parmi les conseillers élus sur la liste ayant recueilli le plus de suffrages dans la section correspondante ou, à défaut de candidature d'un des conseillers municipaux élus sur la liste arrivée en tête dans la section, parmi les conseillers élus sur les autres listes de la section correspondante, ou, à défaut, parmi les autres membres du conseil./ Le maire délégué est élu par le conseil municipal parmi ses membres, dans les conditions fixées à l'article L. 2122-7 ". L'article L. 2122-7 dispose que : " Le maire et les adjoints sont élus au scrutin secret et à la majorité absolue (...) ".

4. Les dispositions citées aux points 2 et 3, qui prévoient que les maires délégués des communes associées doivent être désignés par le conseil municipal, après chaque renouvellement général, prioritairement parmi les conseillers élus sur la liste ayant recueilli le plus de suffrages dans la section correspondante ou, à défaut de candidature d'un des conseillers municipaux élus sur la liste arrivée en tête dans la section, parmi les conseillers élus sur les autres listes de la section correspondante, ou encore à défaut, parmi les autres membres du conseil municipal, ne peuvent trouver à s'appliquer que dans les communes où le conseil municipal est élu au scrutin de liste. Il s'ensuit que l'élection des maires délégués des communes de moins de 1000 habitants, dont les conseillers municipaux sont élus au scrutin majoritaire plurinominal à deux tours, n'entrent pas dans leur champ d'application.

5. Il résulte de l'instruction que la commune d'Anaa compte moins de 1000 habitants. Dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Polynésie française a annulé l'élection de M. A..., qui a recueilli avec 10 voix sur 14 suffrages exprimés la majorité absolue des suffrages au premier tour de scrutin, devant MM. B... et H..., lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 6 juillet 2020 en vue de l'élection du maire délégué de Faaite, au motif erroné que le conseil municipal était tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 2573-3 du code général des collectivités territoriales, de désigner en cette qualité M. B..., conseiller élu de la liste ayant recueilli le plus de suffrages dans la section électorale de Faaite. M. A... est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé son élection comme maire délégué, M B... ne soulevant aucun autre grief à l'encontre de cette élection devant les juges de première instance.

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er du jugement du 20 octobre 2020 du tribunal administratif de la Polynésie française est annulé.
Article 2 : La protestation de M. B... est rejetée en tant qu'elle demande l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 6 juillet 2020 en vue de la désignation du maire délégué de la commune associée Faaite.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... A..., M. D... B..., M. E... H....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur, au ministre des outre-mer et au haut-commissaire de la République en Polynésie française.