Base de jurisprudence


Décision n° 449533
22 avril 2022
Conseil d'État

N° 449533
ECLI:FR:CECHS:2022:449533.20220422
Inédit au recueil Lebon
5ème chambre
M. Alain Seban, rapporteur
Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public
SCP PIWNICA, MOLINIE, avocats


Lecture du vendredi 22 avril 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS




Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 février et 10 mai 2021, la société RMC Découverte demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision n° 2020-840 du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) du 9 décembre 2020 lui infligeant une sanction pécuniaire d'un montant de 80 000 euros ;

2°) de mettre à la charge du CSA la somme de 6 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Hortense Naudascher, auditrice,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteure publique.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société RMC Découverte.


Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que la société RMC Découverte, éditrice du service de télévision du même nom, a conclu le 3 juillet 2012 avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), sur le fondement de l'article 28 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dans sa version applicable au litige, une convention dont l'article 3-1-1 stipule que " les documentaires représentent annuellement au moins 75 % du temps total de diffusion et portent sur une grande variété de sujets ". Par une décision du 14 décembre 2016, le CSA, estimant que les documentaires n'avaient représenté que 59,4% du temps total de diffusion du service en 2015, a mis la société RMC Découverte en demeure de se conformer, à l'avenir, à ses obligations. Par une deuxième décision du 6 septembre 2017, le CSA, constatant que la diffusion de documentaires était en retrait de l'objectif fixé par la convention d'au moins 15 points en 2016, a de nouveau mis la société requérante en demeure de se conformer à ses obligations. Enfin, estimant qu'en 2017 la diffusion de documentaires ne représentait que 59,2% du temps total de diffusion et méconnaissait ainsi une nouvelle fois les obligations conventionnelles du service, le CSA a infligé à l'émetteur une sanction pécuniaire d'un montant de 80 000 euros, par une décision du 9 décembre 2020 dont la société RMC Découverte demande l'annulation.

2. En premier lieu, la société requérante soutient que la décision qu'elle attaque doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation, qu'elle a sollicitée par des requêtes enregistrées au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous les numéros 424065, 433701 et 442205, de décisions du CSA des 11 juillet 2018, 17 juin 2019 et 20 mai 2020 refusant la qualification de " documentaires " à certain des programmes qu'elle diffuse. Toutefois, par une décision du 29 octobre 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté ces requêtes. Le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, pour déterminer si les différents programmes présentés par la société comme des documentaires revêtaient bien cette qualité au sens de l'article 3-1-1 de la convention du 3 juillet 2012 cité au point 1, le CSA s'est livré, pour chacun d'entre eux, à une appréciation prenant en compte l'existence d'un point de vue d'auteur, la présence d'un apport de connaissances pour le spectateur, la présentation de faits ou de situations qui préexistent à la réalisation de l'émission, l'absence - sans interdire toute reconstitution - de mises en scène artificielles et, le cas échéant, l'obtention du soutien du Centre national du cinéma et de l'image animée au titre des oeuvres documentaires. En se fondant sur l'ensemble de ces critères, le CSA n'a pas commis d'erreur de droit. Par suite, la société requérante, qui se borne à invoquer l'application par le CSA de critères erronés, n'est pas fondée à soutenir que les documentaires diffusés par elle auraient représenté 72,45% du temps total de diffusion et non 59,2%, ainsi que l'a retenu le CSA dans les motifs de sa décision.

4. Enfin, eu égard à l'ampleur des manquements constatés et à leur caractère réitéré, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le montant de la sanction, qui ne revêt pas de caractère automatique, n'est pas proportionné à leur gravité.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société RMC Découverte n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :
--------------

Article 1er : La requête de la société RMC Découverte est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société RMC Découverte et à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique.
Copie en sera adressée à la ministre de la culture.
Délibéré à l'issue de la séance du 10 mars 2022 où siégeaient : M. Denis Piveteau, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et Mme Hortense Naudascher, auditrice-rapporteure.

Rendu le 22 avril 2022.
Le président :
Signé : M. Denis Piveteau
La rapporteure :
Signé : Mme Hortense Naudascher
La secrétaire :
Signé : Mme B... A...