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Ariane Web: Conseil d'État 497566, lecture du 30 septembre 2025, ECLI:FR:CECHR:2025:497566.20250930

Décision n° 497566
30 septembre 2025
Conseil d'État

N° 497566
ECLI:FR:CECHR:2025:497566.20250930
Mentionné aux tables du recueil Lebon
10ème - 9ème chambres réunies
Mme Alexandra Bratos, rapporteure
BALAT, avocats


Lecture du mardi 30 septembre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision implicite par laquelle le directeur de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) des Pyrénées-Atlantiques a rejeté sa demande de communication de documents administratifs du 3 avril 2018 et, d'autre part, la décision du 19 avril 2019 de refus de modification des informations contenues dans la synthèse pluridisciplinaire de visite à domicile de 2017 ainsi que dans les autres documents la concernant, dont le guide d'évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA) de 2017 et les synthèses des années précédentes, et d'enjoindre au directeur de la MDPH de faire droit à ses demandes. Par un jugement n° 1901455 du 13 juillet 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par une décision n° 456593 du 27 septembre 2022, le Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Bordeaux le jugement de la requête d'appel de Mme A....

Par un arrêt n° 22BX02572 du 4 juillet 2024, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par Mme A... contre le jugement du 13 juillet 2021.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 septembre et 5 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la maison départementale des personnes handicapées des Pyrénées-Atlantiques la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Alexandra Bratos, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Balat, avocat de Mme A... ;


Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., bénéficiaire d'une prestation de compensation du handicap, a demandé à la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) des Pyrénées-Atlantiques, d'une part, de lui communiquer certains documents, dont les fiches de synthèse de visite à domicile réalisées entre 2015 et 2017, et, d'autre part, de rectifier, sur le fondement de l'article 16 du règlement du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD), certaines données à caractère personnel la concernant figurant dans ces fiches de synthèse. Par un jugement du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Pau a prononcé un non-lieu à statuer partiel sur la demande de communication de documents, rejeté le surplus de cette demande et rejeté les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 19 avril 2019 par laquelle le directeur de la maison départementale a partiellement refusé de procéder à la rectification d'informations contenues dans les fiches de synthèse. Par une décision du 27 septembre 2022, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Bordeaux. Mme A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juillet 2024 par lequel cette cour a rejeté son appel formé contre le jugement, en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre la décision précitée du 19 avril 2019.

2. D'une part, en vertu des dispositions de l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles, une équipe pluridisciplinaire, après avoir entendu la personne handicapée, évalue ses besoins de compensation et son incapacité permanente sur la base de son projet de vie et de références définies par voie réglementaire et propose un plan personnalisé de compensation du handicap à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour lui permettre de prendre les décisions mentionnées à l'article L. 241-6 du même code. En vertu des dispositions de l'article R. 146-29 de ce code, la proposition de plan est transmise à la personne handicapée, qui dispose d'un délai de quinze jours pour faire connaître ses observations, lesquelles sont portées à la connaissance de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Celle-ci prend, en vertu des dispositions de l'article L. 146-9 du même code, sur la base de l'évaluation réalisée par l'équipe pluridisciplinaire et des souhaits exprimés par la personne concernée dans son projet de vie, les décisions relatives à l'ensemble des droits de cette personne, notamment en matière d'attribution de prestations et d'orientation. En vertu de l'article L. 245-3 du même code, la prestation de compensation du handicap peut être affectée à des charges liées à un besoin d'aides humaines, d'aides techniques, à l'aménagement du logement et du véhicule de la personne handicapée, à des charges spécifiques ou exceptionnelles, comme celles relatives à l'acquisition ou l'entretien de produits liés au handicap, ou liées à l'attribution et à l'entretien des aides animalières.

3. D'autre part, aux termes de l'article 16 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (RGPD) : " La personne concernée a le droit d'obtenir du responsable du traitement, dans les meilleurs délais, la rectification des données à caractère personnel la concernant qui sont inexactes. Compte tenu des finalités du traitement, la personne concernée a le droit d'obtenir que les données à caractère personnel incomplètes soient complétées, y compris en fournissant une déclaration complémentaire ". En vertu de l'article 50 de la loi du 6 janvier 1978, dans sa version applicable au litige, le droit de rectification s'exerce dans les conditions prévues à l'article 16 du règlement précité.

4. En vertu des dispositions rappelées au point précédent, la personne concernée a le droit d'obtenir du responsable du traitement, dans les meilleurs délais, la rectification des données à caractère personnel la concernant, pertinentes au regard des finalités du traitement et dont elle établit qu'elles sont entachées d'inexactitude matérielle, lorsque cette correction n'est pas de nature à affecter ces finalités. Le droit de rectification ouvert par ces dispositions ne s'étend pas, en revanche, aux appréciations ou aux autres données à caractère personnel subjectives, figurant dans le traitement. La personne concernée a également le droit d'obtenir que ses données à caractère personnel incomplètes soient complétées dans la mesure où une telle situation est de nature à compromettre les finalités du traitement.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les fiches de synthèse établies par la MDPH des Pyrénées-Atlantiques sont destinées à dresser un compte-rendu de la visite à domicile effectuée chez la personne handicapée par des membres de l'équipe pluridisciplinaire et de décrire la situation fonctionnelle de cette personne, son environnement et les entraves à sa participation à la vie sociale, en vue de préparer l'élaboration du plan personnalisé de compensation par l'équipe pluridisciplinaire. Il ressort de ces mêmes pièces qu'à l'occasion d'une révision de la situation de Mme A..., celle-ci a fait l'objet de visites à domicile de la part d'une ergothérapeute et d'une assistante sociale, qui ont donné lieu à l'élaboration de trois fiches de synthèse les 30 janvier 2015, 14 février 2016 et 30 juin 2017 et qu'à la suite des observations qu'elle avait émises, en septembre 2017, sur la proposition de plan personnalisé de compensation du handicap préparé par l'équipe pluridisciplinaire, elle a sollicité la rectification des fiches de synthèse dont elle avait obtenu la communication, en particulier celle du 30 juin 2017, au motif que des informations la concernant y figurant étaient inexactes ou incomplètes. La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a arrêté, le 11 octobre 2017, le plan personnalisé de compensation du handicap la concernant et fixé temporairement ses droits.

6. En premier lieu, en jugeant que les fiches de synthèse établies par des membres de l'équipe pluridisciplinaire de la MDPH des Pyrénées-Atlantiques à la suite de chaque visite à domicile de la personne handicapée n'avaient pas pour objet de réaliser un récapitulatif exhaustif de la situation administrative de celle-ci, la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a pas, eu égard aux modalités particulières d'établissement de ces documents et à leur finalité, commis d'erreur de droit. En jugeant, par ailleurs, que l'absence de mention, dans la fiche de synthèse du 30 juin 2017, des informations relatives à la reconnaissance, en 1995, de la qualité de travailleur handicapée de la requérante et à l'attribution à celle-ci, la même année, de l'allocation aux adultes handicapés par la MDPH de Haute-Garonne, dont, au demeurant, la MDPH des Pyrénées-Atlantiques n'avait pas eu connaissance lors de l'évaluation de la situation de l'intéressée en 2017, n'avait pas été de nature à compromettre la finalité de ce traitement, la cour a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

7. En deuxième lieu, en jugeant que, compte tenu de l'ensemble des éléments d'information déjà recueillis, l'absence, dans les fiches de synthèse de visite à domicile, de l'information relative aux douleurs chroniques invalidantes dont souffre la requérante, reconnues par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel depuis 1995, n'était pas de nature à compromettre la finalité du traitement, la cour a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation.

8. En troisième lieu, en estimant que les appréciations portées par les membres de l'équipe pluridisciplinaire dans la fiche de synthèse de visite à domicile du 30 juin 2017, en lien avec le type d'aides destinées à compenser le handicap, n'étaient pas, en elles-mêmes, au nombre des données à caractère personnel susceptibles de faire l'objet du droit de rectification, la cour, qui a porté sur ces faits une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a pas, au regard de ce qui a été dit au point 4, commis d'erreur de droit.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme A... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme A... est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A..., à la maison départementale des personnes handicapées des Pyrénées-Atlantiques et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et de la famille.
Délibéré à l'issue de la séance du 5 septembre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et Mme Alexandra Bratos, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 30 septembre 2025.


Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Alexandra Bratos
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaule



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