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Ariane Web: Conseil d'État 493896, lecture du 8 octobre 2025, ECLI:FR:CECHR:2025:493896.20251008

Décision n° 493896
8 octobre 2025
Conseil d'État

N° 493896
ECLI:FR:CECHR:2025:493896.20251008
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Lionel Ferreira, rapporteur
SARL CABINET BRIARD, BONICHOT ET ASSOCIES, avocats


Lecture du mercredi 8 octobre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une décision du 31 octobre 2024, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société LG Services dirigées contre l'arrêt du 27 février 2024 de la cour administrative d'appel de Paris en tant seulement que cet arrêt s'est prononcé sur la remise en cause de la déduction de la provision pour dépréciation des titres de la société GDI constituée par la société Colombey au titre de l'exercice clos en 2013.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de la société LG Services ;



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Colombey, l'administration fiscale a remis en cause le caractère déductible de certaines provisions qu'elle avait constituées au titre de ses exercices clos de 2011 à 2014. Des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, assorties de pénalités, ont en conséquence été mises en recouvrement au nom de la société LG Services, en sa qualité de société mère du groupe fiscalement intégré dont la société Colombey était membre, au titre de ces mêmes exercices. Par un arrêt du 27 février 2024, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société LG Services contre le jugement du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires ainsi que des pénalités correspondantes. Par une décision du 31 octobre 2024, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société LG Services dirigées contre cet arrêt en tant seulement qu'il s'est prononcé sur la remise en cause de la déduction de la provision pour dépréciation des titres de la société GDI constituée par la société Colombey au titre de l'exercice clos en 2013.

2. Aux termes du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " (...) la provision pour dépréciation qui résulte éventuellement de l'estimation du portefeuille est soumise au régime fiscal des moins-values à long terme défini au 2 du I de l'article 39 quindecies ". Toutefois, le a sexies-0 bis du I de l'article 219 du code général des impôts dispose que : " Le régime des plus et moins-values à long terme cesse de s'appliquer à la plus ou moins-value provenant des cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées réalisées à compter du 26 septembre 2007. Sont considérées comme des sociétés à prépondérance immobilière les sociétés dont l'actif est, à la date de la cession de ces titres ou a été à la clôture du dernier exercice précédant cette cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles, des droits portant sur des immeubles, des droits afférents à un contrat de crédit-bail conclu dans les conditions prévues au 2 de l'article L. 313-7 du code monétaire et financier ou par des titres d'autres sociétés à prépondérance immobilière. Pour l'application de ces dispositions, ne sont pas pris en considération les immeubles ou les droits mentionnés à la phrase précédente lorsque ces biens ou droits sont affectés par l'entreprise à sa propre exploitation industrielle, commerciale ou agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale. / Les provisions pour dépréciation afférentes aux titres exclus du régime des plus et moins-values à long terme en application du premier alinéa cessent d'être soumises à ce même régime (...) ".

3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les provisions pour dépréciation de titres de participation dans une société à prépondérance immobilière non cotée constituées au titre des exercices clos à compter du 26 septembre 2007 sont soustraites au régime du long terme et sont, par suite, déductibles des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun au titre de l'exercice de leur constitution. Si ces dispositions prévoient que le caractère de société à prépondérance immobilière s'apprécie compte tenu de la valeur réelle des éléments de l'actif, notamment des titres détenus dans d'autres sociétés à prépondérance immobilière non cotées, l'administration fiscale est fondée à retenir la valeur comptable de ces titres en l'absence de toute argumentation du contribuable tendant à démontrer que la valeur réelle des éléments d'actif de la société s'écarte de leur valeur comptable.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour réintégrer aux bénéfices de la société Colombey soumis à l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun la provision que celle-ci avait constituée au titre de son exercice clos en 2013 pour dépréciation des titres détenus dans la société GDI, l'administration fiscale s'est fondée sur ce que cette dernière n'avait pas le caractère de société à prépondérance immobilière, de sorte que cette provision relevait du régime du long terme. En jugeant qu'il résultait des dispositions citées au point 2 que, pour déterminer si la société GDI revêtait un tel caractère, il convenait de retenir la valeur comptable pour laquelle des titres de la société Les Hérissons, dont il était allégué qu'elle était elle-même à prépondérance immobilière, figuraient à son bilan, alors qu'elle était saisie d'une argumentation de la contribuable qui tendait à démontrer que la valeur réelle de ces titres s'écartait de cette valeur comptable, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que la société LG Services est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il s'est prononcé sur la remise en cause de la déduction de la provision pour dépréciation des titres de la société GDI constituée par la société Colombey au titre de l'exercice clos en 2013.



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 27 février 2024 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il s'est prononcé sur la remise en cause de la déduction de la provision pour dépréciation des titres de la société GDI constituée par la société Colombey au titre de l'exercice clos en 2013.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation prononcée à l'article 1er, à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société LG Services et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique.

Délibéré à l'issue de la séance du 12 septembre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Lionel Ferreira, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 8 octobre 2025.


Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Lionel Ferreira
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :



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