Conseil d'État
N° 495066
ECLI:FR:CECHR:2025:495066.20251008
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Benoît Chatard, rapporteur
SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER, avocats
Lecture du mercredi 8 octobre 2025
Vu la procédure suivante :
La société BNP Paribas a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises, des taxes additionnelles à ces cotisations ainsi que des frais de gestion de ces cotisations qu'elle a primitivement acquittés au titre des années 2018 et 2019. Par un jugement n° 2107730 du 26 janvier 2023, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 23PA01377 du 12 avril 2024, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société BNP Paribas contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 juin et 12 septembre 2024 et le 30 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société BNP Paribas demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord intergouvernemental concernant le transfert et la mutualisation des contributions au fonds de résolution unique (ensemble deux déclarations), signé à Bruxelles le 21 mai 2014 ;
- la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 ;
- le règlement (UE) n° 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 ;
- le règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission du 21 octobre 2014 ;
- le règlement d'exécution (UE) 2015/81 du Conseil du 19 décembre 2014 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code monétaire et financier ;
- le règlement n° 2014-03 du 5 juin 2014 de l'Autorité des normes comptables ;
- le règlement n° 2014-07 du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société BNP Paribas ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 septembre 2025, présentée par la société BNP Paribas ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir acquitté les cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises relatives aux années 2018 et 2019 établies à son nom, la société BNP Paribas a présenté à l'administration fiscale une réclamation tendant à leur restitution partielle au motif que les sommes qu'elle avait versées en 2018 et 2019 au titre de sa contribution au Fonds de résolution unique européen devaient, selon elle, venir en déduction pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à ces cotisations. Par un jugement du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations en cause. La société BNP Paribas se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 avril 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
Sur le cadre juridique :
2. D'une part, à la suite de la crise financière de 2008, qui a notamment mis en évidence le risque que la défaillance d'une banque dans un seul Etat membre compromette la stabilité des marchés financiers de l'Union européenne dans son ensemble, le règlement (UE) n° 806/2014 du 15 juillet 2014 a établi des règles et une procédure uniformes en matière de résolution des établissements de crédit. Dans le cadre de ce mécanisme de résolution unique (MRU), un pouvoir de décision centralisé est confié au conseil de résolution unique (CRU), agence de l'Union européenne dotée de la personnalité morale. L'article 18 du règlement prévoit que le CRU adopte un dispositif de résolution à l'égard d'un établissement de crédit lorsque sa défaillance est avérée ou prévisible, que les mesures privées ou prudentielles apparaissent insuffisantes pour y remédier et qu'une mesure de résolution est nécessaire dans l'intérêt public, c'est-à-dire lorsqu'elle est nécessaire pour atteindre un ou plusieurs des objectifs de la résolution alors qu'une liquidation de l'entité selon les procédures normales d'insolvabilité ne le permettrait pas dans la même mesure. Ces objectifs consistent, aux termes de l'article 14 du règlement, à assurer la continuité des fonctions critiques de l'établissement, à éviter les effets négatifs significatifs sur la stabilité financière, à protéger les ressources de l'État par une réduction maximale du recours à un soutien financier public exceptionnel, à protéger les déposants ainsi que les investisseurs et à protéger les fonds et les actifs des clients.
3. Aux fins de financer le recours par le CRU aux différents instruments de résolution susceptibles d'être mis en oeuvre, le même règlement du 15 juillet 2014 institue un Fonds de résolution unique (FRU), abondé par les établissements de crédit établis dans les Etats membres participant au MRU. L'article 69 du règlement prévoit que la dotation initiale du FRU doit atteindre, au terme d'une période de huit ans débutant en 2016, un montant au moins égal à 1 % du total des dépôts des établissements de crédit. Pour atteindre ce niveau cible, les établissements de crédit des Etats membres participants doivent, aux termes de l'article 70 du règlement, verser des contributions individuelles ex ante composées, d'une part, d'une contribution forfaitaire proportionnelle au montant du passif de l'établissement, hors fonds propres et dépôts couverts, rapporté au total du passif, hors fonds propres et dépôts couverts, de l'ensemble des établissements agréés sur le territoire des Etats membres participants et, d'autre part, d'une contribution déterminée en fonction du profil de risque de l'établissement, fondée sur les critères fixés à l'article 103, paragraphe 7 de la directive 2014/59/UE du 15 mai 2014. Ces mêmes établissements peuvent également être soumis, en vertu de l'article 71 du règlement, à des contributions ex post extraordinaires, calculées et réparties entre eux selon les mêmes modalités, lorsque les moyens financiers disponibles ne suffisent pas à couvrir les pertes, coûts ou autres frais liés au recours au FRU.
4. D'autre part, aux termes du 1 du II de l'article 1586 ter du code général des impôts : " La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies. / (...) ". Aux termes du III de cet article : " Pour les établissements de crédit (...) : / 1. Le chiffre d'affaires comprend l'ensemble des produits d'exploitation bancaires et des produits divers d'exploitation (...). / 2. La valeur ajoutée est égale à la différence entre : / a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1 (...) ; / b) Et, d'autre part : / - les charges d'exploitation bancaires (...) ; / - les services extérieurs (...) ; / - les charges diverses d'exploitation (...) ". Ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. A la lumière des travaux préparatoires de la loi de finances pour 2010 dont elles sont issues, il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, de se reporter, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée, au règlement du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif aux comptes des entreprises du secteur bancaire ainsi qu'au plan comptable des établissements de crédit.
5. Le règlement du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif aux comptes des entreprises du secteur bancaire dispose que " les établissements assujettis doivent respecter les dispositions du plan comptable général, sous réserve des adaptations prévues par le présent règlement ". Selon l'article 514-1 du règlement du 5 juin 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif au plan comptable général : " Les impôts, taxes et versements assimilés sont des charges correspondant : / d'une part, à des versements obligatoires à l'État et aux collectivités locales pour subvenir aux dépenses publiques ; / d'autre part, à des versements institués par l'autorité publique, notamment pour le financement d'actions d'intérêt économique ou social ". Le plan comptable des établissements de crédit, distingue, quant à lui, les " impôts et taxes " comptabilisés au poste 62, tout à la fois, des " charges d'exploitation bancaire " comptabilisées aux postes 6011 à 6099, des " services extérieurs " comptabilisés aux postes 631 à 639 et des " charges diverses d'exploitation " comptabilisées aux postes 641 à 649, auxquels renvoient respectivement les " charges d'exploitation bancaires ", les " services extérieurs " et les " charges diverses d'exploitation " mentionnés au b du 2 du III de l'article 1586 sexies du code général des impôts.
6. Les contributions individuelles au FRU mentionnées au point 3 sont dues par les établissements de crédit en exécution d'une obligation légale, dans l'objectif de financer un mécanisme de résolution bancaire au niveau européen et, compte tenu des modalités de recours, dans ce cadre, au dispositif de résolution décrites au point 2, elles sont dépourvues de contrepartie directe pour ces établissements. Elles doivent par suite être regardées comme étant au nombre des " versements institués par l'autorité publique, notamment pour le financement d'actions d'intérêt économique ou social " au sens des dispositions de l'article 514-1 du règlement du 5 juin 2014 relatif au plan comptable général mentionnées au point 5 et relèvent ainsi de la catégorie comptable des " impôts, taxes et versements assimilés " au sens de ces dispositions et, au regard du plan comptable des établissements de crédit, du poste 62 " impôts et taxes ". Il suit de là que ces contributions individuelles ne relèvent d'aucune des catégories comptables, limitativement énumérées par les dispositions 2 du III de l'article 1586 sexies du code général des impôts mentionnées au point 4, dont le montant doit venir en déduction pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
Sur le litige :
7. En premier lieu, en se fondant, pour écarter l'argumentation de la société requérante selon laquelle, en raison de l'analogie entre les contributions individuelles au FRU et des primes d'assurance obligatoire, ces contributions devaient être admises en déduction de l'assiette de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, soit en tant que " charges d'exploitation bancaire ", soit en tant que " charges diverses d'exploitation ", sur le motif tiré de ce que l'intervention du FRU ne revêtait aucun caractère automatique et n'impliquait aucune indemnisation systématique des établissements de crédit contributeurs en difficulté, même en cas de perte subie, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point et n'a pas méconnu son office, n'a pas, eu égard à ce qui a été dit au point 6, commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
8. En second lieu, les motifs de l'arrêt attaqué rappelés au point précédent justifiant nécessairement, à eux seuls, le dispositif de rejet adopté par la cour administrative d'appel, les autres motifs de l'arrêt que critique le pourvoi ne peuvent qu'être regardés comme surabondants. Les autres moyens du pourvoi, tirés de ce que ces motifs seraient entachés d'insuffisance de motivation, d'erreur de droit et de contradiction de motifs ne sauraient dès lors, quel qu'en soit le bien-fondé, entraîner l'annulation de l'arrêt attaqué.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société BNP Paribas doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société BNP Paribas est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société BNP Paribas et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 septembre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 8 octobre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :
N° 495066
ECLI:FR:CECHR:2025:495066.20251008
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Benoît Chatard, rapporteur
SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER, avocats
Lecture du mercredi 8 octobre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société BNP Paribas a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la réduction des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises, des taxes additionnelles à ces cotisations ainsi que des frais de gestion de ces cotisations qu'elle a primitivement acquittés au titre des années 2018 et 2019. Par un jugement n° 2107730 du 26 janvier 2023, ce tribunal a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 23PA01377 du 12 avril 2024, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société BNP Paribas contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 juin et 12 septembre 2024 et le 30 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société BNP Paribas demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'accord intergouvernemental concernant le transfert et la mutualisation des contributions au fonds de résolution unique (ensemble deux déclarations), signé à Bruxelles le 21 mai 2014 ;
- la directive 2014/59/UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 ;
- le règlement (UE) n° 806/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 juillet 2014 ;
- le règlement délégué (UE) 2015/63 de la Commission du 21 octobre 2014 ;
- le règlement d'exécution (UE) 2015/81 du Conseil du 19 décembre 2014 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code monétaire et financier ;
- le règlement n° 2014-03 du 5 juin 2014 de l'Autorité des normes comptables ;
- le règlement n° 2014-07 du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de M. Bastien Lignereux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société BNP Paribas ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 septembre 2025, présentée par la société BNP Paribas ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir acquitté les cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises relatives aux années 2018 et 2019 établies à son nom, la société BNP Paribas a présenté à l'administration fiscale une réclamation tendant à leur restitution partielle au motif que les sommes qu'elle avait versées en 2018 et 2019 au titre de sa contribution au Fonds de résolution unique européen devaient, selon elle, venir en déduction pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à ces cotisations. Par un jugement du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations en cause. La société BNP Paribas se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 avril 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
Sur le cadre juridique :
2. D'une part, à la suite de la crise financière de 2008, qui a notamment mis en évidence le risque que la défaillance d'une banque dans un seul Etat membre compromette la stabilité des marchés financiers de l'Union européenne dans son ensemble, le règlement (UE) n° 806/2014 du 15 juillet 2014 a établi des règles et une procédure uniformes en matière de résolution des établissements de crédit. Dans le cadre de ce mécanisme de résolution unique (MRU), un pouvoir de décision centralisé est confié au conseil de résolution unique (CRU), agence de l'Union européenne dotée de la personnalité morale. L'article 18 du règlement prévoit que le CRU adopte un dispositif de résolution à l'égard d'un établissement de crédit lorsque sa défaillance est avérée ou prévisible, que les mesures privées ou prudentielles apparaissent insuffisantes pour y remédier et qu'une mesure de résolution est nécessaire dans l'intérêt public, c'est-à-dire lorsqu'elle est nécessaire pour atteindre un ou plusieurs des objectifs de la résolution alors qu'une liquidation de l'entité selon les procédures normales d'insolvabilité ne le permettrait pas dans la même mesure. Ces objectifs consistent, aux termes de l'article 14 du règlement, à assurer la continuité des fonctions critiques de l'établissement, à éviter les effets négatifs significatifs sur la stabilité financière, à protéger les ressources de l'État par une réduction maximale du recours à un soutien financier public exceptionnel, à protéger les déposants ainsi que les investisseurs et à protéger les fonds et les actifs des clients.
3. Aux fins de financer le recours par le CRU aux différents instruments de résolution susceptibles d'être mis en oeuvre, le même règlement du 15 juillet 2014 institue un Fonds de résolution unique (FRU), abondé par les établissements de crédit établis dans les Etats membres participant au MRU. L'article 69 du règlement prévoit que la dotation initiale du FRU doit atteindre, au terme d'une période de huit ans débutant en 2016, un montant au moins égal à 1 % du total des dépôts des établissements de crédit. Pour atteindre ce niveau cible, les établissements de crédit des Etats membres participants doivent, aux termes de l'article 70 du règlement, verser des contributions individuelles ex ante composées, d'une part, d'une contribution forfaitaire proportionnelle au montant du passif de l'établissement, hors fonds propres et dépôts couverts, rapporté au total du passif, hors fonds propres et dépôts couverts, de l'ensemble des établissements agréés sur le territoire des Etats membres participants et, d'autre part, d'une contribution déterminée en fonction du profil de risque de l'établissement, fondée sur les critères fixés à l'article 103, paragraphe 7 de la directive 2014/59/UE du 15 mai 2014. Ces mêmes établissements peuvent également être soumis, en vertu de l'article 71 du règlement, à des contributions ex post extraordinaires, calculées et réparties entre eux selon les mêmes modalités, lorsque les moyens financiers disponibles ne suffisent pas à couvrir les pertes, coûts ou autres frais liés au recours au FRU.
4. D'autre part, aux termes du 1 du II de l'article 1586 ter du code général des impôts : " La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies. / (...) ". Aux termes du III de cet article : " Pour les établissements de crédit (...) : / 1. Le chiffre d'affaires comprend l'ensemble des produits d'exploitation bancaires et des produits divers d'exploitation (...). / 2. La valeur ajoutée est égale à la différence entre : / a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1 (...) ; / b) Et, d'autre part : / - les charges d'exploitation bancaires (...) ; / - les services extérieurs (...) ; / - les charges diverses d'exploitation (...) ". Ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. A la lumière des travaux préparatoires de la loi de finances pour 2010 dont elles sont issues, il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, de se reporter, dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée, au règlement du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif aux comptes des entreprises du secteur bancaire ainsi qu'au plan comptable des établissements de crédit.
5. Le règlement du 26 novembre 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif aux comptes des entreprises du secteur bancaire dispose que " les établissements assujettis doivent respecter les dispositions du plan comptable général, sous réserve des adaptations prévues par le présent règlement ". Selon l'article 514-1 du règlement du 5 juin 2014 de l'Autorité des normes comptables relatif au plan comptable général : " Les impôts, taxes et versements assimilés sont des charges correspondant : / d'une part, à des versements obligatoires à l'État et aux collectivités locales pour subvenir aux dépenses publiques ; / d'autre part, à des versements institués par l'autorité publique, notamment pour le financement d'actions d'intérêt économique ou social ". Le plan comptable des établissements de crédit, distingue, quant à lui, les " impôts et taxes " comptabilisés au poste 62, tout à la fois, des " charges d'exploitation bancaire " comptabilisées aux postes 6011 à 6099, des " services extérieurs " comptabilisés aux postes 631 à 639 et des " charges diverses d'exploitation " comptabilisées aux postes 641 à 649, auxquels renvoient respectivement les " charges d'exploitation bancaires ", les " services extérieurs " et les " charges diverses d'exploitation " mentionnés au b du 2 du III de l'article 1586 sexies du code général des impôts.
6. Les contributions individuelles au FRU mentionnées au point 3 sont dues par les établissements de crédit en exécution d'une obligation légale, dans l'objectif de financer un mécanisme de résolution bancaire au niveau européen et, compte tenu des modalités de recours, dans ce cadre, au dispositif de résolution décrites au point 2, elles sont dépourvues de contrepartie directe pour ces établissements. Elles doivent par suite être regardées comme étant au nombre des " versements institués par l'autorité publique, notamment pour le financement d'actions d'intérêt économique ou social " au sens des dispositions de l'article 514-1 du règlement du 5 juin 2014 relatif au plan comptable général mentionnées au point 5 et relèvent ainsi de la catégorie comptable des " impôts, taxes et versements assimilés " au sens de ces dispositions et, au regard du plan comptable des établissements de crédit, du poste 62 " impôts et taxes ". Il suit de là que ces contributions individuelles ne relèvent d'aucune des catégories comptables, limitativement énumérées par les dispositions 2 du III de l'article 1586 sexies du code général des impôts mentionnées au point 4, dont le montant doit venir en déduction pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
Sur le litige :
7. En premier lieu, en se fondant, pour écarter l'argumentation de la société requérante selon laquelle, en raison de l'analogie entre les contributions individuelles au FRU et des primes d'assurance obligatoire, ces contributions devaient être admises en déduction de l'assiette de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, soit en tant que " charges d'exploitation bancaire ", soit en tant que " charges diverses d'exploitation ", sur le motif tiré de ce que l'intervention du FRU ne revêtait aucun caractère automatique et n'impliquait aucune indemnisation systématique des établissements de crédit contributeurs en difficulté, même en cas de perte subie, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point et n'a pas méconnu son office, n'a pas, eu égard à ce qui a été dit au point 6, commis d'erreur de droit ni inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.
8. En second lieu, les motifs de l'arrêt attaqué rappelés au point précédent justifiant nécessairement, à eux seuls, le dispositif de rejet adopté par la cour administrative d'appel, les autres motifs de l'arrêt que critique le pourvoi ne peuvent qu'être regardés comme surabondants. Les autres moyens du pourvoi, tirés de ce que ces motifs seraient entachés d'insuffisance de motivation, d'erreur de droit et de contradiction de motifs ne sauraient dès lors, quel qu'en soit le bien-fondé, entraîner l'annulation de l'arrêt attaqué.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société BNP Paribas doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société BNP Paribas est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société BNP Paribas et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 septembre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 8 octobre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et énergétique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :