Conseil d'État
N° 498180
ECLI:FR:CECHR:2025:498180.20251016
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Benoît Chatard, rapporteur
SAS BOUCARD, CAPRON, MAMAN, avocats
Lecture du jeudi 16 octobre 2025
Vu la procédure suivante :
Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme procédant d'une mise en demeure de payer émise le 9 octobre 2015 par le comptable public de Cannes. Par une ordonnance n° 1602229 du 2 octobre 2018, le président de ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19MA00111 du 16 juin 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Nice.
Par une seconde demande, Mme B... a demandé à ce tribunal de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme procédant d'une mise en demeure de payer émise le 11 avril 2019 par le comptable public de Cannes, de l'obligation de payer une somme procédant de deux saisies administratives à tiers détenteur émises le 30 mars 2021 par le même comptable, et de l'obligation de payer une somme procédant de trois saisies administratives à tiers détenteur émises le 20 avril 2021 et le 29 juin 2021 par ce même comptable.
Par un jugement n°s 2002418, 2104569 du 16 juin 2022, ce tribunal, après les avoir jointes, a rejeté les deux demandes présentées par Mme B....
Par un arrêt n° 22MA02733 du 6 juin 2024, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 septembre et 20 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros à verser à la société Boucard, Capron, Maman, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la consommation ;
- la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boucard, Capron, Maman, avocat de Mme B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation personnelle portant sur les années 1989 à 1991, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme B... a été assujettie au titre de ces années ont été mises en recouvrement le 31 mai 1994. Par un jugement du 5 avril 2001, le tribunal administratif de Nice a accordé le dégrèvement total des impositions concernant l'année 1991 et rejeté la demande de la requérante pour les années 1989 et 1990. Par un arrêt du 19 octobre 2004, la cour administrative d'appel de Marseille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requérante relatives à l'année 1989 et rejeté le surplus de ses conclusions tendant à annuler le jugement du tribunal et accorder la décharge demandée. La requérante s'est vu notifier de 2006 à 2021 plusieurs actes successifs pour obtenir le règlement du reliquat d'impôt restant dû pour l'année 1990. Elle a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes dont le paiement lui a été réclamé à ce titre, en dernier lieu, par deux mises en demeure de payer émises par le comptable public le 9 octobre 2015 et le 11 avril 2019, ainsi que par cinq saisies administratives à tiers détenteurs émises par ce comptable les 30 mars, 20 avril et 29 juin 2021. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 juin 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur la prescription :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 331-7 du code de la consommation, relatif à la commission de surendettement des particuliers, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, recommander tout ou partie des mesures suivantes : / 1° Rééchelonner, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie des dettes, le paiement des dettes autres que fiscales, parafiscales ou envers les organismes de sécurité sociale, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder huit ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ; / (...) / La demande du débiteur formée en application du premier alinéa interrompt la prescription et les délais pour agir ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 331-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La commission dresse l'état d'endettement du débiteur. Celui-ci est tenu de lui déclarer les éléments actifs et passifs de son patrimoine ".
3. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et en particulier des courriers de la commission de surendettement des particuliers des Alpes-Maritimes des 29 juillet et 14 octobre 2002, que la demande de Mme B..., présentée le 29 juillet 2002, tendant à l'adoption par la commission, à l'égard d'un créancier privé, des recommandations prévues à l'article L. 331-7 du code de la consommation, reposait sur des éléments actifs et passifs de son patrimoine comprenant notamment sa dette fiscale, déclarée à la commission ainsi qu'elle en avait l'obligation aux termes des dispositions de l'article L. 331-3 du même code. Par suite, alors qu'en application de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales une telle demande valait, ainsi que le soutenait l'administration fiscale devant les juges du fond, reconnaissance de dette interruptive de prescription, le moyen tiré de l'erreur de droit commise en jugeant que la prescription de l'action en recouvrement des créances fiscales en litige avait été interrompue le 29 juillet 2002 par la demande de Mme B... tendant au bénéfice des mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers doit être écarté.
Sur le conflit négatif :
5. Aux termes du second alinéa de l'article 32 du décret du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles : " Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que le litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision du tribunal ".
6. Il ressort des pièces du dossier que si, par son arrêt du 17 novembre 2022, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dit l'ordre judiciaire incompétent pour statuer sur la contestation de Mme B... relative à la prescription de l'action en recouvrement de la créance ayant fait l'objet d'une mise en demeure du 11 avril 2019, tirée de ce que l'administration fiscale n'avait jamais procédé à l'envoi de la lettre de rappel qui lui incombait préalablement à un commandement de payer en date du 19 juin 2001, la Cour de cassation, par arrêt du 28 mai 2025, après avoir jugé que cette contestation se rattachait à la régularité en la forme du commandement de payer du 19 juin 2001 et relevait, par suite, de la compétence du juge de l'exécution, a annulé l'arrêt du 17 novembre 2022 puis renvoyé l'affaire devant les juges du fond. Il en résulte que les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel attaqué en tant qu'après avoir lui-même déclaré le juge de l'impôt et la juridiction administrative incompétents pour connaître du même moyen, il n'a pas, conformément aux dispositions citées au point 5 et en prévention de conflit négatif, saisi le Tribunal des conflits, sont devenues sans objet.
Sur la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires :
7. En vertu des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, les juridictions peuvent, dans les causes dont elles sont saisies, prononcer, même d'office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires. Dans le cas où une juridiction administrative y procède d'office, les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ne sont pas applicables. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Marseille aurait entaché son arrêt d'irrégularité en procédant d'office à la suppression de passages de la requête de Mme B... et de ses mémoires du 9 février 2023 et du 8 mai 2024, sans avoir invité la requérante, au préalable, à présenter ses observations, ne peut qu'être écarté.
8. En l'espèce la cour, qui ne s'est pas méprise sur la portée des passages litigieux des écritures de la requérante, ne les a pas inexactement qualifiés en les regardant comme outrageants et diffamatoires et en prononçant en conséquence leur suppression en application de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, s'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la saisine du Tribunal des conflits, Mme B... n'est pas fondée à demander, pour le surplus, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
Sur les frais de l'instance :
10. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la société Boucard, Capron, Maman, avocat de Mme B....
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêt du 6 juin 2024 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la saisine du Tribunal des conflits.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré à l'issue de la séance du 29 septembre 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Christophe Barthélemy, conseillers d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 16 octobre 2025.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Planchette
La République mande et ordonne à la ministre de l'action et des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :
N° 498180
ECLI:FR:CECHR:2025:498180.20251016
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
M. Benoît Chatard, rapporteur
SAS BOUCARD, CAPRON, MAMAN, avocats
Lecture du jeudi 16 octobre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une première demande, Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme procédant d'une mise en demeure de payer émise le 9 octobre 2015 par le comptable public de Cannes. Par une ordonnance n° 1602229 du 2 octobre 2018, le président de ce tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19MA00111 du 16 juin 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Nice.
Par une seconde demande, Mme B... a demandé à ce tribunal de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme procédant d'une mise en demeure de payer émise le 11 avril 2019 par le comptable public de Cannes, de l'obligation de payer une somme procédant de deux saisies administratives à tiers détenteur émises le 30 mars 2021 par le même comptable, et de l'obligation de payer une somme procédant de trois saisies administratives à tiers détenteur émises le 20 avril 2021 et le 29 juin 2021 par ce même comptable.
Par un jugement n°s 2002418, 2104569 du 16 juin 2022, ce tribunal, après les avoir jointes, a rejeté les deux demandes présentées par Mme B....
Par un arrêt n° 22MA02733 du 6 juin 2024, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 septembre et 20 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros à verser à la société Boucard, Capron, Maman, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la consommation ;
- la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2015-233 du 27 février 2015 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoît Chatard, auditeur,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boucard, Capron, Maman, avocat de Mme B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation personnelle portant sur les années 1989 à 1991, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme B... a été assujettie au titre de ces années ont été mises en recouvrement le 31 mai 1994. Par un jugement du 5 avril 2001, le tribunal administratif de Nice a accordé le dégrèvement total des impositions concernant l'année 1991 et rejeté la demande de la requérante pour les années 1989 et 1990. Par un arrêt du 19 octobre 2004, la cour administrative d'appel de Marseille a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requérante relatives à l'année 1989 et rejeté le surplus de ses conclusions tendant à annuler le jugement du tribunal et accorder la décharge demandée. La requérante s'est vu notifier de 2006 à 2021 plusieurs actes successifs pour obtenir le règlement du reliquat d'impôt restant dû pour l'année 1990. Elle a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes dont le paiement lui a été réclamé à ce titre, en dernier lieu, par deux mises en demeure de payer émises par le comptable public le 9 octobre 2015 et le 11 avril 2019, ainsi que par cinq saisies administratives à tiers détenteurs émises par ce comptable les 30 mars, 20 avril et 29 juin 2021. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 juin 2024 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel qu'elle a formé contre le jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur la prescription :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 331-7 du code de la consommation, relatif à la commission de surendettement des particuliers, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas d'échec de sa mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir mis les parties en mesure de fournir leurs observations, recommander tout ou partie des mesures suivantes : / 1° Rééchelonner, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie des dettes, le paiement des dettes autres que fiscales, parafiscales ou envers les organismes de sécurité sociale, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder huit ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours ; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui restait à courir avant la déchéance ; / (...) / La demande du débiteur formée en application du premier alinéa interrompt la prescription et les délais pour agir ". Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 331-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La commission dresse l'état d'endettement du débiteur. Celui-ci est tenu de lui déclarer les éléments actifs et passifs de son patrimoine ".
3. D'autre part, aux termes des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. / Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, et en particulier des courriers de la commission de surendettement des particuliers des Alpes-Maritimes des 29 juillet et 14 octobre 2002, que la demande de Mme B..., présentée le 29 juillet 2002, tendant à l'adoption par la commission, à l'égard d'un créancier privé, des recommandations prévues à l'article L. 331-7 du code de la consommation, reposait sur des éléments actifs et passifs de son patrimoine comprenant notamment sa dette fiscale, déclarée à la commission ainsi qu'elle en avait l'obligation aux termes des dispositions de l'article L. 331-3 du même code. Par suite, alors qu'en application de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales une telle demande valait, ainsi que le soutenait l'administration fiscale devant les juges du fond, reconnaissance de dette interruptive de prescription, le moyen tiré de l'erreur de droit commise en jugeant que la prescription de l'action en recouvrement des créances fiscales en litige avait été interrompue le 29 juillet 2002 par la demande de Mme B... tendant au bénéfice des mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers doit être écarté.
Sur le conflit négatif :
5. Aux termes du second alinéa de l'article 32 du décret du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles : " Lorsqu'une juridiction de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif a, par une décision qui n'est plus susceptible de recours, décliné la compétence de l'ordre de juridiction auquel elle appartient au motif que le litige ne ressortit pas à cet ordre, toute juridiction de l'autre ordre, saisie du même litige, si elle estime que le litige ressortit à l'ordre de juridiction primitivement saisi, doit, par une décision motivée qui n'est susceptible d'aucun recours même en cassation, renvoyer au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ainsi soulevée et surseoir à toute procédure jusqu'à la décision du tribunal ".
6. Il ressort des pièces du dossier que si, par son arrêt du 17 novembre 2022, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dit l'ordre judiciaire incompétent pour statuer sur la contestation de Mme B... relative à la prescription de l'action en recouvrement de la créance ayant fait l'objet d'une mise en demeure du 11 avril 2019, tirée de ce que l'administration fiscale n'avait jamais procédé à l'envoi de la lettre de rappel qui lui incombait préalablement à un commandement de payer en date du 19 juin 2001, la Cour de cassation, par arrêt du 28 mai 2025, après avoir jugé que cette contestation se rattachait à la régularité en la forme du commandement de payer du 19 juin 2001 et relevait, par suite, de la compétence du juge de l'exécution, a annulé l'arrêt du 17 novembre 2022 puis renvoyé l'affaire devant les juges du fond. Il en résulte que les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel attaqué en tant qu'après avoir lui-même déclaré le juge de l'impôt et la juridiction administrative incompétents pour connaître du même moyen, il n'a pas, conformément aux dispositions citées au point 5 et en prévention de conflit négatif, saisi le Tribunal des conflits, sont devenues sans objet.
Sur la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires :
7. En vertu des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, les juridictions peuvent, dans les causes dont elles sont saisies, prononcer, même d'office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires. Dans le cas où une juridiction administrative y procède d'office, les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ne sont pas applicables. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Marseille aurait entaché son arrêt d'irrégularité en procédant d'office à la suppression de passages de la requête de Mme B... et de ses mémoires du 9 février 2023 et du 8 mai 2024, sans avoir invité la requérante, au préalable, à présenter ses observations, ne peut qu'être écarté.
8. En l'espèce la cour, qui ne s'est pas méprise sur la portée des passages litigieux des écritures de la requérante, ne les a pas inexactement qualifiés en les regardant comme outrageants et diffamatoires et en prononçant en conséquence leur suppression en application de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, s'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la saisine du Tribunal des conflits, Mme B... n'est pas fondée à demander, pour le surplus, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
Sur les frais de l'instance :
10. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces dispositions par la société Boucard, Capron, Maman, avocat de Mme B....
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêt du 6 juin 2024 de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la saisine du Tribunal des conflits.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré à l'issue de la séance du 29 septembre 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Christophe Barthélemy, conseillers d'Etat et M. Benoît Chatard, auditeur-rapporteur.
Rendu le 16 octobre 2025.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Benoît Chatard
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Planchette
La République mande et ordonne à la ministre de l'action et des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :