Conseil d'État
N° 501632
ECLI:FR:CECHR:2025:501632.20251112
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
Mme Juliette Amar-Cid, rapporteure
SARL CABINET BRIARD, BONICHOT ET ASSOCIES, avocats
Lecture du mercredi 12 novembre 2025
Vu la procédure suivante :
La société à responsabilité limitée (SARL) Famar a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2021 et 2022 dans les rôles de la commune de Saint-Amand-Les-Eaux (Nord), assortie du versement des intérêts prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, et d'ordonner une expertise aux fins d'obtenir la production par le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED) des éléments comptables permettant d'estimer, à la date du vote des délibérations fixant le taux de la taxe, le montant de ses dépenses au titre du service d'enlèvement des ordures ménagères. Par un jugement nos 2206684, 2310051 du 19 décembre 2024, ce tribunal, après avoir admis les interventions de ce syndicat ainsi que de la communauté d'agglomération de la porte du Hainaut (CAPH), a rejeté ces demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 février, 16 mai et 3 octobre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société par actions simplifiée (SAS) Amandis, venant aux droits de la société Famar, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit aux demandes de la société Famar ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Juliette Amar-Cid, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Amandis ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut (CAPH), dont est membre la commune de Saint-Amand-Les-Eaux (Nord), a transféré, le 1er juillet 2016, les compétences de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés au syndicat mixte inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED). Par une délibération du 14 septembre 2020, l'assemblée délibérante de la CAPH a décidé d'instituer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) à compter du 1er janvier 2021 et d'en fixer le taux à 15,62 %. L'institution de cette taxe a été confirmée, à compter du 1er janvier 2022, par une délibération du 20 septembre 2021. La société Amandis, venant aux droits de la société Famar, propriétaire de locaux dans la commune de Saint-Amand-Les-Eaux, se pourvoit en cassation contre l'article 2 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles la société Famar a été assujettie dans les rôles de cette commune au titre des années 2021 et 2022, ainsi que sa demande tendant à ce que soit ordonnée une expertise afin que le SIAVED fournisse les éléments comptables permettant d'estimer, à la date du vote des délibérations fixant le taux de la taxe, le montant de ses dépenses au titre du service d'enlèvement des ordures ménagères.
2. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales. " En vertu des dispositions du VI de l'article 1379-0 bis de ce même code : " 1. Sont substitués aux communes pour l'application des dispositions relatives à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères : (...) / 2° (...) les communautés d'agglomération bénéficiant du transfert de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales et assurant au moins la collecte des déchets des ménages. (...) / 2. Par dérogation au 1, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui exercent la totalité de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales et qui adhèrent, pour l'ensemble de cette compétence, à un syndicat mixte, peuvent décider : / a) Soit d'instituer, avant le 15 octobre d'une année conformément à l'article 1639 A bis, et de percevoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour leur propre compte, en déterminant, le cas échéant, les différentes zones de perception, dans le cas où le syndicat mixte ne l'aurait pas instituée avant le 1er juillet de la même année par dérogation au même article 1639 A bis ; (...) / b) Soit de percevoir cette taxe en lieu et place du syndicat mixte qui l'aurait instituée sur l'ensemble du périmètre syndical ".
En ce qui concerne le jugement attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions relatives à l'année 2021 :
3. Aux termes du 1 du II de l'article 1639 A bis du code général des impôts : " Les délibérations des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale instituant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères conformément (...) au VI de l'article 1379-0 bis (...) doivent être prises avant le 15 octobre d'une année pour être applicables à compter de l'année suivante. Elles sont soumises à la notification prévue à l'article 1639 A au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour leur adoption ". Aux termes des dispositions du III de ce même article, dans leur version applicable du 31 décembre 2013 au 31 décembre 2020 : " L'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion en application de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales doit prendre les délibérations afférentes à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères jusqu'au 15 janvier de l'année qui suit celle de la fusion. / A défaut de délibération, le régime applicable en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale ayant fait l'objet de la fusion ou sur le territoire des communes incluses dans le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion, en application du sixième alinéa du I de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, est maintenu pour une durée qui ne peut excéder cinq années suivant la fusion. Pour l'application de ces dispositions, l'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion perçoit la taxe au lieu et place des établissements publics de coopération intercommunale ayant fait l'objet de la fusion. (...) ".
4. Il ressort, d'une part, des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si, par une délibération du 13 janvier 2001, la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut avait institué la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur son territoire, l'établissement public de coopération intercommunale existant à cette date est distinct de celui, homonyme, issu ultérieurement de sa fusion, effective au 31 décembre 2013, avec une communauté de communes. D'autre part, si, compte tenu des dispositions citées au point 3, le régime, issu de cette délibération applicable en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le territoire de l'ancienne communauté d'agglomération pouvait être maintenu au profit de celle qui l'avait absorbée, ce maintien ne pouvait excéder le terme de la cinquième année suivant la fusion, soit le 31 décembre 2018. Par suite, en jugeant que la circonstance que la délibération du 14 septembre 2020, par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut avait institué une taxe d'enlèvement des ordures ménagères à compter du 1er janvier 2021, avait été annulée pour excès de pouvoir par un jugement du 12 mars 2024 du tribunal administratif de Lille, devenu définitif, ne privait pas de base légale la taxe d'enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l'année 2021 sur le territoire de cet établissement, au motif que la délibération du 13 janvier 2001 constituait une telle base légale, le tribunal a commis une erreur de droit.
En ce qui concerne le jugement attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions relatives à l'année 2022 :
5. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères susceptible d'être instituée sur le fondement des dispositions citées au point 2 n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et non couvertes par des recettes non fiscales affectées à ces opérations. Il s'ensuit que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses exposées pour ce service, déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales, relatives à ces opérations. Dans l'hypothèse où un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre adhère pour l'exercice de la compétence en matière de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés à un syndicat mixte et décide, dans les conditions prévues au 2 du VI de l'article 1379-0 bis du code général des impôts précité, d'instituer et de percevoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour son propre compte, le caractère proportionné du taux de la taxe ainsi instituée s'apprécie, non au regard du montant de la contribution versée par cet établissement à ce syndicat, mais au regard du montant des dépenses exposées par le syndicat mixte pour assurer ce service sur le territoire de l'établissement public concerné.
6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Famar soutenait que le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères avait été fixé par la communauté d'agglomération en fonction du montant de la contribution versée au syndicat mixte auquel elle avait transféré cette compétence et qu'il présentait un caractère manifestement disproportionné. Elle se prévalait notamment, à l'appui de cette critique, des données d'exécution budgétaire du SIAVED versées à l'instance par la communauté d'agglomération et des excédents budgétaires courants constatés à la clôture des exercices concernés. En se fondant, pour écarter cette argumentation, sur ce que la CAPH avait pu à bon droit fixer le taux de la taxe en fonction de la contribution qu'elle versait au SIAVED et sur ce que le taux retenu, qui lui permettait de couvrir 82 % de cette contribution, n'était pas disproportionné, sans rechercher si le produit prévisionnel de la taxe résultant de ce taux n'était pas excessif au regard des coûts exposés par le SIAVED pour la collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés sur le territoire de la communauté d'agglomération, déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales relatives à ces opérations, le tribunal a méconnu son office et entaché son jugement d'erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, la société Amandis est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement qu'elle attaque.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à la société Amandis au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets, qui n'ont pas la qualité de parties dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'article 2 du jugement du 19 décembre 2024 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Lille.
Article 3 : L'Etat versera à la société Amandis une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Amandis et à la ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et au syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 octobre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat ; M. Benjamin Duca-Deneuve, maître des requêtes et Mme Juliette Amar-Cid, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 12 novembre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Juliette Amar-Cid
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle
N° 501632
ECLI:FR:CECHR:2025:501632.20251112
Mentionné aux tables du recueil Lebon
8ème - 3ème chambres réunies
Mme Juliette Amar-Cid, rapporteure
SARL CABINET BRIARD, BONICHOT ET ASSOCIES, avocats
Lecture du mercredi 12 novembre 2025
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société à responsabilité limitée (SARL) Famar a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2021 et 2022 dans les rôles de la commune de Saint-Amand-Les-Eaux (Nord), assortie du versement des intérêts prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, et d'ordonner une expertise aux fins d'obtenir la production par le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED) des éléments comptables permettant d'estimer, à la date du vote des délibérations fixant le taux de la taxe, le montant de ses dépenses au titre du service d'enlèvement des ordures ménagères. Par un jugement nos 2206684, 2310051 du 19 décembre 2024, ce tribunal, après avoir admis les interventions de ce syndicat ainsi que de la communauté d'agglomération de la porte du Hainaut (CAPH), a rejeté ces demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 18 février, 16 mai et 3 octobre 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société par actions simplifiée (SAS) Amandis, venant aux droits de la société Famar, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit aux demandes de la société Famar ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Juliette Amar-Cid, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Amandis ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut (CAPH), dont est membre la commune de Saint-Amand-Les-Eaux (Nord), a transféré, le 1er juillet 2016, les compétences de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés au syndicat mixte inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets (SIAVED). Par une délibération du 14 septembre 2020, l'assemblée délibérante de la CAPH a décidé d'instituer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) à compter du 1er janvier 2021 et d'en fixer le taux à 15,62 %. L'institution de cette taxe a été confirmée, à compter du 1er janvier 2022, par une délibération du 20 septembre 2021. La société Amandis, venant aux droits de la société Famar, propriétaire de locaux dans la commune de Saint-Amand-Les-Eaux, se pourvoit en cassation contre l'article 2 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles la société Famar a été assujettie dans les rôles de cette commune au titre des années 2021 et 2022, ainsi que sa demande tendant à ce que soit ordonnée une expertise afin que le SIAVED fournisse les éléments comptables permettant d'estimer, à la date du vote des délibérations fixant le taux de la taxe, le montant de ses dépenses au titre du service d'enlèvement des ordures ménagères.
2. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales. " En vertu des dispositions du VI de l'article 1379-0 bis de ce même code : " 1. Sont substitués aux communes pour l'application des dispositions relatives à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères : (...) / 2° (...) les communautés d'agglomération bénéficiant du transfert de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales et assurant au moins la collecte des déchets des ménages. (...) / 2. Par dérogation au 1, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui exercent la totalité de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales et qui adhèrent, pour l'ensemble de cette compétence, à un syndicat mixte, peuvent décider : / a) Soit d'instituer, avant le 15 octobre d'une année conformément à l'article 1639 A bis, et de percevoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour leur propre compte, en déterminant, le cas échéant, les différentes zones de perception, dans le cas où le syndicat mixte ne l'aurait pas instituée avant le 1er juillet de la même année par dérogation au même article 1639 A bis ; (...) / b) Soit de percevoir cette taxe en lieu et place du syndicat mixte qui l'aurait instituée sur l'ensemble du périmètre syndical ".
En ce qui concerne le jugement attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions relatives à l'année 2021 :
3. Aux termes du 1 du II de l'article 1639 A bis du code général des impôts : " Les délibérations des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale instituant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères conformément (...) au VI de l'article 1379-0 bis (...) doivent être prises avant le 15 octobre d'une année pour être applicables à compter de l'année suivante. Elles sont soumises à la notification prévue à l'article 1639 A au plus tard quinze jours après la date limite prévue pour leur adoption ". Aux termes des dispositions du III de ce même article, dans leur version applicable du 31 décembre 2013 au 31 décembre 2020 : " L'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion en application de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales doit prendre les délibérations afférentes à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères jusqu'au 15 janvier de l'année qui suit celle de la fusion. / A défaut de délibération, le régime applicable en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale ayant fait l'objet de la fusion ou sur le territoire des communes incluses dans le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion, en application du sixième alinéa du I de l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, est maintenu pour une durée qui ne peut excéder cinq années suivant la fusion. Pour l'application de ces dispositions, l'établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion perçoit la taxe au lieu et place des établissements publics de coopération intercommunale ayant fait l'objet de la fusion. (...) ".
4. Il ressort, d'une part, des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si, par une délibération du 13 janvier 2001, la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut avait institué la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur son territoire, l'établissement public de coopération intercommunale existant à cette date est distinct de celui, homonyme, issu ultérieurement de sa fusion, effective au 31 décembre 2013, avec une communauté de communes. D'autre part, si, compte tenu des dispositions citées au point 3, le régime, issu de cette délibération applicable en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur le territoire de l'ancienne communauté d'agglomération pouvait être maintenu au profit de celle qui l'avait absorbée, ce maintien ne pouvait excéder le terme de la cinquième année suivant la fusion, soit le 31 décembre 2018. Par suite, en jugeant que la circonstance que la délibération du 14 septembre 2020, par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut avait institué une taxe d'enlèvement des ordures ménagères à compter du 1er janvier 2021, avait été annulée pour excès de pouvoir par un jugement du 12 mars 2024 du tribunal administratif de Lille, devenu définitif, ne privait pas de base légale la taxe d'enlèvement des ordures ménagères établie au titre de l'année 2021 sur le territoire de cet établissement, au motif que la délibération du 13 janvier 2001 constituait une telle base légale, le tribunal a commis une erreur de droit.
En ce qui concerne le jugement attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions relatives à l'année 2022 :
5. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères susceptible d'être instituée sur le fondement des dispositions citées au point 2 n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et des déchets mentionnés à l'article L. 2224-14 du code général des collectivités territoriales et non couvertes par des recettes non fiscales affectées à ces opérations. Il s'ensuit que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses exposées pour ce service, déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales, relatives à ces opérations. Dans l'hypothèse où un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre adhère pour l'exercice de la compétence en matière de collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés à un syndicat mixte et décide, dans les conditions prévues au 2 du VI de l'article 1379-0 bis du code général des impôts précité, d'instituer et de percevoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour son propre compte, le caractère proportionné du taux de la taxe ainsi instituée s'apprécie, non au regard du montant de la contribution versée par cet établissement à ce syndicat, mais au regard du montant des dépenses exposées par le syndicat mixte pour assurer ce service sur le territoire de l'établissement public concerné.
6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Famar soutenait que le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères avait été fixé par la communauté d'agglomération en fonction du montant de la contribution versée au syndicat mixte auquel elle avait transféré cette compétence et qu'il présentait un caractère manifestement disproportionné. Elle se prévalait notamment, à l'appui de cette critique, des données d'exécution budgétaire du SIAVED versées à l'instance par la communauté d'agglomération et des excédents budgétaires courants constatés à la clôture des exercices concernés. En se fondant, pour écarter cette argumentation, sur ce que la CAPH avait pu à bon droit fixer le taux de la taxe en fonction de la contribution qu'elle versait au SIAVED et sur ce que le taux retenu, qui lui permettait de couvrir 82 % de cette contribution, n'était pas disproportionné, sans rechercher si le produit prévisionnel de la taxe résultant de ce taux n'était pas excessif au regard des coûts exposés par le SIAVED pour la collecte et de traitement des déchets ménagers et assimilés sur le territoire de la communauté d'agglomération, déduction faite, le cas échéant, du montant des recettes non fiscales relatives à ces opérations, le tribunal a méconnu son office et entaché son jugement d'erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, la société Amandis est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement qu'elle attaque.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à la société Amandis au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets, qui n'ont pas la qualité de parties dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'article 2 du jugement du 19 décembre 2024 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Lille.
Article 3 : L'Etat versera à la société Amandis une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et le syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Amandis et à la ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la communauté d'agglomération de la Porte du Hainaut et au syndicat inter-arrondissement de valorisation et d'élimination des déchets.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 octobre 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat ; M. Benjamin Duca-Deneuve, maître des requêtes et Mme Juliette Amar-Cid, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 12 novembre 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Juliette Amar-Cid
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle