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Ariane Web: Tribunal des conflits C3828, lecture du 17 octobre 2011

Analyse n° C3828
17 octobre 2011
Tribunal des conflits

N° 3828 C3829
Publié au recueil Lebon

Lecture du lundi 17 octobre 2011



17-04-02 : Compétence- Compétences concurrentes des deux ordres de juridiction- Contentieux de l'appréciation de la légalité-

Contestation devant le juge judiciaire de la légalité, par la voie de l'exception, de décisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique - 1) Principe - Compétence du juge administratif - 2) Dérogation lorsque la contestation porte sur la comptabilité des dispositions contestées avec les engagements internationaux - Absence - 3) Exceptions - a) Hypothèse dans laquelle il apparaît manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal - b) Principe d'effectivité du droit de l'Union européenne - Conséquence - Compétence du juge judiciaire pour appliquer le droit de l'Union européenne ou renvoyer une question préjudicielle à la CJUE .




1) En vertu du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires posé par l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 et par le décret du 16 fructidor an III, sous réserve des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire et sauf dispositions législatives contraires, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître des recours tendant à l'annulation ou à la réformation des décisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique. De même, le juge administratif est en principe seul compétent pour statuer, le cas échéant par voie de question préjudicielle, sur toute contestation de la légalité de telles décisions, soulevée à l'occasion d'un litige relevant à titre principal de l'autorité judiciaire. 2) Les dispositions de l'article 55 de la Constitution conférant aux traités, dans les conditions qu'elles définissent, une autorité supérieure à celle des lois, ne prescrivent ni n'impliquent aucune dérogation à ces principes régissant la répartition des compétences entre ces juridictions, lorsque est en cause la légalité d'une disposition réglementaire, et que la contestation porte sur la compatibilité d'une telle disposition avec les engagements internationaux. 3) a) Toutefois, ces principes doivent être conciliés tant avec l'exigence de bonne administration de la justice qu'avec les principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions, en vertu desquels tout justiciable a droit à ce que sa demande soit jugée dans un délai raisonnable. Par conséquent, si, en cas de contestation sérieuse portant sur la légalité d'un acte administratif, les tribunaux de l'ordre judiciaire statuant en matière civile doivent surseoir à statuer jusqu'à ce que la question préjudicielle de la légalité de cet acte soit tranchée par la juridiction administrative, il en va autrement lorsqu'il apparaît manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal. b) D'autre part, s'agissant du cas particulier du droit de l'Union européenne, dont le respect constitue une obligation, tant en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qu'en application de l'article 88-1 de la Constitution, il résulte du principe d'effectivité issu des dispositions de ces traités, telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que le juge national chargé d'appliquer les dispositions du droit de l'Union a l'obligation d'en assurer le plein effet en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire. A cet effet, il doit pouvoir, en cas de difficulté d'interprétation de ces normes, en saisir lui-même la Cour de justice à titre préjudiciel ou, lorsqu'il s'estime en état de le faire, appliquer le droit de l'Union, sans être tenu de saisir au préalable la juridiction administrative d'une question préjudicielle, dans le cas où serait en cause devant lui, à titre incident, la conformité d'un acte administratif au droit de l'Union européenne.

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