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Ariane Web: Conseil d'État 455349, lecture du 31 mai 2022

Analyse n° 455349
31 mai 2022
Conseil d'État

N° 455349
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du mardi 31 mai 2022



19-01-03-03 : Contributions et taxes- Généralités- Règles générales d'établissement de l'impôt- Abus de droit et fraude à la loi-

Sursis d'imposition bénéficiant à une soulte n'excédant pas 10 % qui assortit une opération d'apport (art. 150-0 B du CGI, dans sa version antérieure à la loi du 29 décembre 2016) - 1) a) Objectif - Favoriser les restructurations d'entreprise, alors que le contribuable ne dispose pas de liquidités (1) - b) Conséquence - Abus de droit - Stipulation d'une soulte dans le but exclusif d'appréhender des liquidités en franchise d'impôt (2) - 2) Notion de soulte - 3) Espèce - Abus de droit - Contribuable qui, ayant immédiatement donné les titres reçus en rémunération de son apport, ne subit pas les conséquences de leur moindre liquidité.




1) a) En instituant un mécanisme de sursis d'imposition à l'article 150-0 B du code général des impôts (CGI), le législateur a entendu favoriser les restructurations d'entreprises susceptibles d'intervenir par échange de titres en évitant que l'imposition immédiate de la plus-value constatée à l'occasion d'une telle opération, alors que le contribuable ne dispose pas des liquidités lui permettant d'acquitter cet impôt, fasse obstacle à sa réalisation. b) Si, dans la version du texte antérieure à la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, le sursis d'imposition bénéficie à la totalité de la plus-value résultant d'une opération d'apport avec soulte lorsque le montant de celle-ci n'excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus en rémunération de l'apport, le but ainsi poursuivi par le législateur n'est pas respecté si la stipulation d'une soulte au profit de l'apporteur en complément de l'attribution de titres de la société bénéficiaire de l'apport n'a aucune autre finalité que de permettre à celui-ci d'appréhender, en franchise immédiate d'impôt, des liquidités détenues par cette société ou par celle dont les titres sont apportés. Dans ce cas, l'administration est fondée, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF), à considérer qu'en stipulant l'octroi de cette soulte, les parties à l'opération d'apport ont recherché le bénéfice d'une application littérale de l'article 150-0 B du CGI à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur, dans le seul but d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'apporteur aurait normalement supportées. 2) Une somme dont le traité d'apport stipule qu'elle est versée en rémunération des apports, en complément de l'attribution de titres de la société bénéficiaire, constitue une soulte au sens de l'article 150-0 B du CGI. 3) Opération d'apport à une société des titres et droits démembrés d'une société détenus par le contribuable. Compte tenu des statuts respectifs de ces sociétés, liquidité des titres de la société bénéficiaire de l'apport remis en rémunération de l'apport étant moindre que celle des titres apportés. Toutefois, contribuable ayant, dès le lendemain de ces opérations, fait donation à ses cinq filles de la nue-propriété et à ses douze petits-enfants de la pleine propriété de la quasi-totalité des titres qu'il avait reçus en pleine propriété lors de l'échange, lesquels représentaient plus de 47 % du total des titres ou droits qu'il avait reçus, si bien qu'il n'a personnellement été exposé, pour la part substantielle correspondant aux titres ou droits dont il a fait donation, à aucune conséquence liée à la perte de liquidité des titres en cause. Par suite, la perte de liquidité des titres subie à la suite de l'opération d'échange ne justifie pas l'octroi d'une soulte au contribuable, de sorte que la stipulation de cette soulte puisse être regardée comme poursuivant un but autre que celui d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé aurait normalement dû supporter à l'occasion de cette opération.





19-04-02-08-01 : Contributions et taxes- Impôts sur les revenus et bénéfices- Revenus et bénéfices imposables règles particulières- Plusvalues des particuliers- Plusvalues mobilières-

Sursis d'imposition bénéficiant à une soulte n'excédant pas 10 % qui assortit une opération d'apport (art. 150-0 B du CGI, dans sa version antérieure à la loi du 29 décembre 2016) - 1) a) Objectif - Favoriser les restructurations d'entreprise, alors que le contribuable ne dispose pas de liquidités (1) - b) Conséquence - Abus de droit - Stipulation d'une soulte dans le but exclusif d'appréhender des liquidités en franchise d'impôt (2) - 2) Notion de soulte - 3) Espèce - Abus de droit - Contribuable qui, ayant immédiatement donné les titres reçus en rémunération de son apport, ne subit pas les conséquences de leur moindre liquidité.




1) a) En instituant un mécanisme de sursis d'imposition à l'article 150-0 B du code général des impôts (CGI), le législateur a entendu favoriser les restructurations d'entreprises susceptibles d'intervenir par échange de titres en évitant que l'imposition immédiate de la plus-value constatée à l'occasion d'une telle opération, alors que le contribuable ne dispose pas des liquidités lui permettant d'acquitter cet impôt, fasse obstacle à sa réalisation. b) Si, dans la version du texte antérieure à la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016, le sursis d'imposition bénéficie à la totalité de la plus-value résultant d'une opération d'apport avec soulte lorsque le montant de celle-ci n'excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus en rémunération de l'apport, le but ainsi poursuivi par le législateur n'est pas respecté si la stipulation d'une soulte au profit de l'apporteur en complément de l'attribution de titres de la société bénéficiaire de l'apport n'a aucune autre finalité que de permettre à celui-ci d'appréhender, en franchise immédiate d'impôt, des liquidités détenues par cette société ou par celle dont les titres sont apportés. Dans ce cas, l'administration est fondée, sur le fondement de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF), à considérer qu'en stipulant l'octroi de cette soulte, les parties à l'opération d'apport ont recherché le bénéfice d'une application littérale de l'article 150-0 B du CGI à l'encontre des objectifs poursuivis par le législateur, dans le seul but d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'apporteur aurait normalement supportées. 2) Une somme dont le traité d'apport stipule qu'elle est versée en rémunération des apports, en complément de l'attribution de titres de la société bénéficiaire, constitue une soulte au sens de l'article 150-0 B du CGI. 3) Opération d'apport à une société des titres et droits démembrés d'une société détenus par le contribuable. Compte tenu des statuts respectifs de ces sociétés, liquidité des titres de la société bénéficiaire de l'apport remis en rémunération de l'apport étant moindre que celle des titres apportés. Toutefois, contribuable ayant, dès le lendemain de ces opérations, fait donation à ses cinq filles de la nue-propriété et à ses douze petits-enfants de la pleine propriété de la quasi-totalité des titres qu'il avait reçus en pleine propriété lors de l'échange, lesquels représentaient plus de 47 % du total des titres ou droits qu'il avait reçus, si bien qu'il n'a personnellement été exposé, pour la part substantielle correspondant aux titres ou droits dont il a fait donation, à aucune conséquence liée à la perte de liquidité des titres en cause. Par suite, la perte de liquidité des titres subie à la suite de l'opération d'échange ne justifie pas l'octroi d'une soulte au contribuable, de sorte que la stipulation de cette soulte puisse être regardée comme poursuivant un but autre que celui d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé aurait normalement dû supporter à l'occasion de cette opération.


(1) Rappr., s'agissant de l'objectif de l'article 150-0 B du CGI, Cons. const., 16 juin 2017, n° 2017-638 QPC, cons. 6 ; s'agissant de l'objectif de l'article 150-0 B ter du CGI, CE, décision du même jour, M. , n° 454288, à mentionner aux Tables. (2) Rappr., s'agissant de l'apport de titres à une société contrôlée, suivi de leur cession immédiate sans réinvestissement économique, CE, 27 juillet 2012, M. et Mme , n° 327295, T. pp. 685-710 ; CE, 12 février 2020, M. et Mme , n° 421444, p. 43.

Voir aussi