Le rôle consultatif du Conseil d’Etat

Par Jean-Marc Sauvé, Vice-président du Conseil d'État
Discours
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Intervention devant le Parlement de la République de Croatie le 3 mars 2015.

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Conseiller les pouvoirs publics :le rôle consultatif du Conseil d’État de France
Parlement de la République de Croatie
mardi 3 mars 2015
Intervention de Jean-Marc Sauvé[i], vice-président du Conseil d’État

Messieurs les ministres,

Monsieur le président du comité d’amitié franco-croate,

Madame la présidente de la Cour constitutionnelle,

Mesdames et Messieurs les membres du Sabor,

Monsieur le président du Haut tribunal administratif,        

Mesdames et Messieurs les professeurs et les juges,

Mesdames et Messieurs,

Je remercie les organisateurs de cette rencontre de m’offrir l’occasion de m’exprimer aujourd’hui devant le Parlement de la République de Croatie, mais aussi devant le ministre de l’administration publique, les présidents des hautes juridictions et la communauté académique de Croatie. Les liens que le Conseil d’Etat de France noue avec ses homologues européens, les associations internationales de juges et de juristes, mais aussi la communauté académique et les pouvoirs publics des Etats membres de l’Union Européenne revêtent à ses yeux une grande importance. Il est aussi très attaché au développement de la coopération franco-croate dans les domaines de la justice et de l’administration publique.

« Des deux fonctions du Conseil d’État [de France] – conseiller et juger – c’est la seconde qui est la plus connue, et la jurisprudence est généralement considérée comme la contribution principale, sinon exclusive, de l’institution à la formation du droit »[ii]. Ainsi s’exprimait, au début des années 1990, Guy Braibant, illustre président de section du Conseil d’État, qui a co-présidé la convention chargée d’élaborer la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le constat de Guy Braibant demeure vrai : si « la première fonction du Conseil d’État fut consultative »[iii], il est néanmoins difficile de mesurer son ampleur, de suivre ses procédures, d’identifier ses acteurs, de connaître ses avis, dont la règle a longtemps été de ne pas les rendre publics. Alors que la section du contentieux du Conseil d’Etat est comme une maison de verre qui ne connaît que les secrets de l’instruction et du délibéré, les portes des formations consultatives ne s’entrouvrent qu’avec parcimonie et, sur elles, se pose le regard sinon suspicieux, du moins extérieur d’une démocratie soucieuse de transparence, de consultation publique et de participation directe. Et pourtant, l’œuvre accomplie avec discrétion par les formations consultatives du Conseil d’État au service de la qualité des normes et de l’Etat de droit est considérable et elle ne cesse pas de l’être dans un environnement marqué par la multiplicité des sources juridiques et l’instabilité normative. Grâce à sa mission consultative, le Conseil d’État contribue à satisfaire l’une des plus puissantes aspirations de notre démocratie, à savoir l’exigence de sécurité juridique, prise en ses différentes facettes : clarté, accessibilité, intelligibilité, prévisibilité, stabilité et loyauté des rapports juridiques. Il faut ainsi mettre en lumière les apports contemporains de cette fonction consultative, tout en soulignant la pertinence maintenue d’une institution qui exerce en son sein deux fonctions, l’une consultative et l’autre juridictionnelle. Ce modèle a dépassé le cadre qui l’a vu naître et il marche aujourd’hui sur ces deux jambes : d’un côté, conseiller les pouvoirs publics et, de l’autre, juger les administrations souverainement et avec toutes les garanties d’indépendance et d’impartialité.

Je montrerai d’abord la diversité de la mission consultative du Conseil d’État et la spécificité de son expertise (I), avant d’examiner l’évolution de cette mission et l’approfondissement actuel de ses pratiques (II).

I. La mission consultative du Conseil d’État : « à la frontière de la consultation et de la décision »[iv].

Les attributions consultatives du Conseil d’État couvrent un large éventail de missions et se caractérisent par leur « polymorphisme »[v] (A). Sous le pavillon de ses « avis », se rangent aussi bien des expertises et des recommandations que la contribution à la rédaction des textes qui lui sont soumis (B).

A. Le Conseil d’État est et a d’abord été le conseiller du Gouvernement, qu’il réponde à des questions ponctuelles (1) ou qu’il soit saisi de projets de texte (2). Dans tous les cas, il veille, dans l’exercice de ses missions consultative et juridictionnelle, au respect du principe d’impartialité (3).

1. Le Conseil d’État répond en premier lieu, à l’instar d’un « bureau d’études juridiques »[vi], aux demandes d’avis présentées par le Premier ministre ou les ministres  concernés  « sur les difficultés qui s’élèvent en matière administrative »[vii]. Ces avis « ont des finalités variées : éclairer le Gouvernement sur la portée de dispositions anciennes ou nouvelles (…), provoquer une interprétation (…) palliant une éventuelle censure juridictionnelle (…), répondre à une question qui suscite des débats dans l’opinion publique »[viii]. L’avis rendu le 27 novembre 1989 sur le port du foulard islamique à l’école est représentatif de cette pratique. De nombreux exemples sont donnés chaque année dans le rapport public du Conseil d’État : en 2014, ce dernier s’est ainsi prononcé sur la réglementation des contrats de fourniture de gaz naturel[ix] et sur les modalités de reconnaissance de l’expérience professionnelle des titulaires d’un doctorat[x]. Dans le passé, le Conseil d’État a aussi eu l’occasion de se prononcer sur des questions juridiques et économiques délicates, comme par exemple les conditions d’accès de nouveaux opérateurs à des marchés s’ouvrant à la concurrence dans les secteurs des télécommunications, de l’énergie ou de la construction d’autoroutes. A la demande du Gouvernement, des études récentes ont par ailleurs porté sur le développement du « rescrit » et des procédures assimilées – c’est-à-dire sur les conditions dans lesquelles une « pré-décision » ou une interprétation de la loi donnée par l’administration peut lui être opposée par un administré ou une entreprise - ou encore sur la mise en œuvre du nouveau principe selon lequel le silence de l’administration vaut accord et non plus rejet de la demande de l’administré. La dernière étude commandée au Conseil d’État et qui sera délibérée à la fin du mois de mars concerne les moyens les plus simples et pratiques, tout en restant juridiquement sûrs, de transposition des directives de l’Union européenne.

Enfin, le Conseil d’État peut appeler, de sa propre initiative, « l’attention des pouvoirs publics sur des réformes d’ordre législatif, réglementaire ou administratif, qui lui paraissent conformes à l’intérêt général[xii] », ou encore désigner un membre pour « assister [une] administration dans l’élaboration d’un projet de texte déterminé »[xiii]. Il réalise aussi chaque année, par l’intermédiaire de sa section du rapport et des études, une étude sur un thème général sur lequel il présente des recommandations. Les études de 2013 et 2014 ont été respectivement consacrées aux sujets suivants : « Le droit souple » et « Le numérique et les droits fondamentaux ». L’étude de 2015 portera sur « L’action économique des personnes publiques »[xiv].

2. En dehors de ces consultations et études, le Conseil d’État émet, en second lieu, des avis sur les projets de texte élaborés par le Gouvernement. En moyenne[xv], ses cinq formations consultatives[xvi] examinent chaque année[xvii] de 1000 à 1200 projets de texte, dont 10% sont des projets de loi et 63% des décrets réglementaires. Il se prononce sur ces textes dans un délai le plus souvent inférieur à un mois pour les projets de loi et à deux mois pour les autres textes.

En vertu d’une obligation constitutionnelle[xviii], le Conseil d’État doit donner un avis sur tous les projets de loi, « sans distinction d’objet - lois ordinaires, lois organiques,  lois de finances - ni de procédure - lois votées par le Parlement ou référendaires - »[xix], ainsi que sur tous les projets de texte – les « ordonnances » - par lesquels le Gouvernement prend des mesures dans le domaine de la loi sur habilitation du Parlement[xx]. Si, postérieurement à cet examen, le Gouvernement peut modifier le contenu des projets de loi[xxi], l'ensemble des questions posées par eux doivent, à peine d’irrégularité, avoir été soumises au Conseil d’État lors de sa consultation[xxii].

S’agissant des règlements d’application des lois,  il revient en principe à chaque loi[xxiii] de préciser si ces actes doivent être soumis pour avis au Conseil d’État. Dans le silence de la loi, le Gouvernement a cependant toujours la faculté de procéder à cette consultation[xxiv] et aussi de lui conférer un caractère obligatoire pour toute modification ultérieure du texte examiné[xxv]. En dehors de simples erreurs matérielles ou de pure forme[xxvi], le texte finalement retenu par le Gouvernement ne peut être différent à la fois du projet soumis au Conseil d’État et du projet adopté par ce dernier[xxvii] : si le Gouvernement retenait un « tiers texte », cela signifierait que le Conseil d’État n’a pas été consulté[xxviii]et le texte serait donc pour ce motif illégal. Lorsque le Gouvernement veut modifier substantiellement le texte en cours d’examen au Conseil d’État, il doit procéder à une saisine rectificative ou complémentaire[xxix]. Eu égard au rôle ainsi dévolu au Conseil d’État, l’omission de sa consultation, lorsqu’elle est obligatoire, constitue un vice de procédure[xxx] - que le juge doit au besoin soulever lui-même d’office [xxxi] - qui entache la légalité de l’acte dont le projet aurait dû lui être soumis. Le même régime s’applique aux projets d’actes non réglementaires pris en Conseil d’État, avec cette particularité cependant que, dans certains cas touchant notamment à la nationalité ou au droit de propriété[xxxii], l’avis rendu doit obligatoirement être suivi par l’autorité administrative compétente, celle-ci disposant toutefois de la faculté de renoncer à son projet.

3. Au sein du Conseil d’État, les deux fonctions, juridictionnelle et consultative, s’épaulent, s’enrichissent et se renforcent mutuellement, les liens et les échanges entre leurs membres respectifs ayant toutefois été aménagés pour que soit pleinement respecté le principe d’impartialité. Il résulte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme que le cumul de ces deux types de fonctions au sein d’une même institution n’emporte pas par lui-même violation du principe d’impartialité, consacré notamment par l’article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l’Homme[xxxiii]. En revanche, les mêmes personnes ne sauraient exercer successivement, à propos des mêmes décisions, ces deux fonctions, consultative et juridictionnelle[xxxiv]. Il convient par conséquent de s’assurer de l’absence de pré-jugement d’une affaire au contentieux grâce à des règles d’organisation et de fonctionnement claires et strictes. Les formations de jugement sont donc composées exclusivement ou très majoritairement, comme l’Assemblée du contentieux[xxxv], de membres issus de la section du contentieux.

En outre, selon une pratique coutumière désormais codifiée[xxxvi], « les membres du Conseil d’État ne peuvent participer au jugement des recours dirigés contre les actes pris après avis du Conseil d’État, s'ils ont pris part à la délibération de cet avis ». Cette règle est assortie d’une double garantie complémentaire : d’une part, la liste des membres ayant pris part à cette délibération est communiquée au requérant qui en fait la demande[xxxvii] et, d’autre part, les membres qui participent au jugement d’une affaire ne peuvent accéder ni aux avis rendus sur les actes contestés devant eux, lorsque ces avis n’ont pas été rendus publics, ni aux dossiers de ces avis[xxxviii]. Grâce à ces aménagements et à ces garde-fous, est assurée la pérennité du modèle français[xxxix], dont la compatibilité avec la convention européenne des droits de l’Homme a été pleinement reconnue[xl].

B. Lorsqu’il est saisi d’un projet de texte, le Conseil d’État « ne se contente nullement de donner un avis favorable ou défavorable (…) : il va jusqu’à entreprendre la réécriture du projet (…) qui lui est soumis »[xli], apparaissant, selon les termes d’un de mes illustres prédécesseurs, Edouard Laferrière, comme un « assistant du législateur »[xlii]. En cela, bien qu’il ne le fasse que d’une manière consultative, le Conseil d’État intervient avec l’autorité que lui confèrent son expérience contentieuse et sa connaissance de l’administration, selon une méthode qui le conduit à examiner la qualité rédactionnelle (1), la régularité juridique (2) mais aussi l’ « opportunité administrative »[xliii] des textes qui lui sont soumis (3).

1. En premier lieu, le contrôle de la qualité rédactionnelle des textes ne se limite pas à la vérification de leur correction formelle, ce qui ne va pas toujours de soi, vu l’irrépressible tendance des ministères à produire des rédactions de moins en moins souvent brèves, générales, stables et prescriptives, et de plus en plus longues, techniques, floues, malléables et changeantes. Il s’agit donc, dans ce cadre, de vérifier qu’aucune ambiguïté sérieuse n’entache les dispositions soumises à l’examen du Conseil d’État et n’est susceptible de méconnaître l’objectif à valeur constitutionnelle d’« accessibilité et d’intelligibilité » de la loi[xliv] ou, d’une manière générale, le principe de sécurité juridique. S’il arrive que soit critiquée l’obscurité des lois promulguées, il faut mesurer l’effort considérable de clarification et d’amélioration de la qualité des textes poursuivi sans relâche dans les formations consultatives du Conseil d’État.

2. En deuxième lieu, le Conseil d’État veille à la régularité juridique des projets de texte qui lui sont soumis. Sa tâche s’est à ce titre sensiblement enrichie, à mesure que les exigences inhérentes à la hiérarchie des normes sont devenues plus techniques et plus contraignantes : elles excèdent aujourd’hui notablement les questions liées au partage de compétence entre la loi et le règlement, la vigilance requise vis-à-vis des incompétences négatives du législateur[xlv] - c’est-à-dire les cas dans lesquels celui-ci n’exerce pas pleinement sa compétence - ou la chasse aux dispositions non normatives que nous nommons les « neutrons » législatifs[xlvi].

La gamme des normes supra-législatives de contrôle s’est en effet élargie et les marges d’appréciation du législateur se sont rétrécies. L’examen auquel procède le Conseil d’Etat au regard de la hiérarchie des normes s’est par conséquent complexifié et son enjeu est devenu très sensible. L’expérience contentieuse du Conseil d’État, sa participation active au dialogue des juges à l’échelle européenne et ses structures d’expertise spécialisées dans le droit de l’Union européenne[xlvii] lui permettent de prévenir efficacement beaucoup de risques contentieux et, partant, de garantir la sécurité juridique des normes nationales. Dans l’exercice de cette mission cruciale, le Conseil a renoncé depuis longtemps au confort tout relatif d’une attitude consistant à jauger les projets de texte qui lui sont soumis à l’aune de sa seule pensée. Car il n’est pas le juge ultime de ces textes et il répond de moins en moins à la demande suivante : « Qu’en pense le Conseil d’État? »,  mais bien plutôt à cette question : « Que pense le Conseil d’État de ce que pensera demain de ce texte le Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’homme ou la Cour de justice de l’Union ? » Ce changement de perspective a profondément transformé son office et sa vision des projets de texte qui lui sont soumis. Bien qu’il ne soit pas maître de l’issue des procédures, le Conseil d’État se garde, dans son travail, de sacrifier à une sorte de principe de précaution juridique. Il n’émet d’avis défavorable, qu’il motive avec soin, que si, en l’état de la jurisprudence et compte tenu de son orientation, il existe un doute sérieux quant à la constitutionnalité ou la compatibilité d’un projet de loi avec le droit européen ou international ou quant à la légalité d’un règlement. Inversement, il procède de plus en plus souvent à la rédaction d’opinions par lesquelles il expose les raisons qui l’ont déterminé à donner un avis favorable à une disposition dont il apparaît clairement qu’elle sera ultérieurement contestée, en particulier au regard de la Constitution.

3. En troisième lieu, si le Conseil d’État ne discute pas les choix politiques qui ont inspiré un texte et qui relèvent de la responsabilité de l’autorité qui l’a saisi, il « n’a jamais considéré qu’il était contraint de s’en tenir à un avis strictement juridique »[xlviii], comme l’a souligné mon prédécesseur, Renaud Denoix de Saint Marc. Il entre en effet dans son rôle d’apprécier « l’opportunité administrative »[xlix] d’un texte et ceci à un double niveau. D’une part, il vérifie si celui-ci se fondra « correctement dans l’environnement juridique » existant[l], en analysant la nécessité de créer un nouveau dispositif et, le cas échéant, son raccordement aux prescriptions déjà applicables et les risques d’atteinte à la sécurité juridique. Il est aussi souvent conduit à recommander, pour des raisons de cohérence, que soient complétés des textes qui font l’impasse sur des dispositions nécessaires au regard des objectifs fixés. A ce titre, quand les dispositions absentes sont brèves et n’impliquent pas de choix d’opportunité, il les rédige lui-même. Dans les autres cas, il invite le Gouvernement à compléter son texte. D’autre part, le Conseil d’État prend en compte les conditions de mise en œuvre des textes, ce qui le conduit à s’interroger sur la pertinence et l’efficience des moyens choisis au regard des buts poursuivis et des capacités dont disposent les services administratifs[li] ou les juridictions.

Par cette méthode d’expertise, le Conseil d’État contribue activement à l’élaboration des lois et des principaux décrets, dont il a pu être considéré, à différents degrés, comme le co-auteur[lii]. Bien que ses avis soient en principe secrets et qu’ils ne lient pas le Gouvernement, celui-ci les suit presque toujours lorsque le Conseil d’État fait des observations sur la régularité juridique des textes. Il en tient le plus grand compte, lorsqu’est en cause leur qualité rédactionnelle. Il suit moins fréquemment les avis fondés sur des considérations d’opportunité administrative, mais il se garde toutefois de les ignorer. Dans le cadre de ces pratiques, la contribution du Conseil d’Etat à l’élaboration de la norme s’est récemment enrichie depuis, en particulier, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

II. Les évolutions récentes de la mission consultative du Conseil d’État.               

Dans l’exercice de ses fonctions consultatives, le Conseil d’État est désormais chargé d’évaluer la qualité des études d’impact qui accompagnent les projets de loi (A). Ses avis reflètent le rôle important de cette nouvelle exigence constitutionnelle, alors que le cercle de leurs commanditaires, comme de leurs destinataires, s’est élargi (B).

A. Si l’évaluation ex ante des effets économiques et sociaux des projets de loi a été instituée dès 1995[liii], elle n’est devenue une règle réellement contraignante et même, comme l’avait préconisé le Conseil d’État dans son rapport public de 2006[liv], une exigence constitutionnelle pour le Gouvernement que depuis l’entrée en vigueur de la révision du 23 juillet 2008. Désormais, en application de l’article 39 de la Constitution, le Gouvernement assortit les projets de lois d’une étude d’impact dont l’objet est de préciser les objectifs poursuivis, de recenser les options possibles en dehors de l’intervention de règles de droit nouvelles et d’indiquer les motifs du recours à une nouvelle législation. Cette étude expose avec précision notamment l’articulation d’un projet de loi avec le droit européen en vigueur ou en cours d’élaboration, son impact sur l’ordre juridique interne, ses modalités d’application dans le temps, ses effets économiques, financiers, sociaux ou environnementaux ainsi que leur méthode de calcul, ou encore ses conséquences sur l’emploi public[lv]. Des modalités particulières sont prévues pour les projets de loi d’habilitation en application de l’article 38 de la Constitution[lvi], les projets de loi autorisant la ratification ou l’approbation de certains traités ou accords internationaux et, enfin, les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale[lvii]. S’agissant des actes réglementaires, une obligation de bonne administration, précisée par plusieurs circulaires du Premier ministre, prévoit d’accompagner d’une fiche d’impact les projets de normes concernant les entreprises, les collectivités territoriales[lviii] et désormais le public[lix].

Les formations administratives du Conseil d’État donnent leur pleine et efficace portée à ces obligations, en précisant leur contenu (1) et en exerçant un contrôle attentif des études d’impact fournies par le Gouvernement (2), en complément de celui que peut exercer le Parlement (3). Le Conseil d’État consacre d’ailleurs à ces questions chaque année depuis 2010 un développement particulier dans son rapport public.

1. Le Conseil d’État veille au caractère complet et suffisant des études d’impact. D’une part, il s’assure qu’elles comportent le résultat des consultations préalablement ou concomitamment menées[lx], l’ensemble des éléments nécessaires à l’examen du bien-fondé juridique du projet comme, par exemple, les éléments expliquant la méthode de calcul utilisée[lxi]. D’autre part, le Conseil d’État examine le caractère suffisant des études d’impact, en ce qui concerne les effets des règles proposées sur l’ordonnancement juridique[lxii], les formalités, démarches et procédures administratives et, plus largement, leurs conséquences financières, économiques et sociales. S’agissant en particulier des dispositions des projets de loi de finances, leurs effets économiques et financiers doivent être chiffrés[lxiii] et, le cas échéant, la finalité d’une nouvelle imposition doit être précisément identifiée, soit qu’elle poursuive un objectif de rendement budgétaire, soit qu’elle cherche à dissuader ou, au contraire, à encourager certains comportements[lxiv]. Ces études qui ont vocation à être renforcées, contrôlées et validées au sein du Gouvernement, notamment en ce qui concerne l’incidence des réformes proposées sur les entreprises, doivent être l’un des leviers d’une politique de maîtrise de l’inflation normative et de meilleure qualité de la loi.

2. Selon le degré de gravité des insuffisances relevées, le Conseil d’État invite le Gouvernement à procéder à des régularisations adaptées et proportionnées. Même si l’étude d’impact est conforme aux exigences constitutionnelles, le Conseil d’État peut estimer qu’elle pourrait être « utilement complétée avant son dépôt devant le Parlement »[lxv], afin que ce dernier soit éclairé au mieux. Lorsqu’une étude d’impact est globalement conforme, sans l’être parfaitement, le Conseil d’État demande de la compléter « par des informations de nature à permettre d’apprécier correctement l’incidence de certains aspects du projet de texte examiné »[lxvi] et il précise naturellement lesquelles. Enfin, lorsque l’étude d’impact n’est pas conforme aux exigences constitutionnelles, il indique nettement au Gouvernement la nécessité de procéder à une régularisation avant le dépôt du projet de loi. Il n’est nullement exclu qu’il puisse rejeter le texte dont il est saisi, en raison du caractère totalement lacunaire ou indigent de l’étude d’impact. Toutefois, ce cas de figure ne s’est présenté qu’une seule fois à ce jour depuis 2009 à propos du projet de loi de ratification d’une ordonnance relative à certaines installations classées pour la protection de l’environnement comportant des dispositions nouvelles dépourvues de toute étude d’impact. Naturellement, si une omission grave est constatée dans une étude d’impact, le Gouvernement peut, de son côté, procéder, à la suite des premières remarques du rapporteur du Conseil d’État, à une saisine rectificative et déposer une nouvelle version de cette étude[lxvii].

3. Le Conseil d’État n’est pas le seul gardien de ces exigences constitutionnelles. Le Parlement dispose en effet d’un pouvoir spécifique de blocage d’un projet de loi non conforme : le 4ème alinéa de l’article 39 de la Constitution prévoit à ce titre que «  les projets de loi ne peuvent être inscrits à l'ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues ». Cette procédure de blocage a été récemment mise en œuvre pour la première fois à l’occasion de l’examen d’un projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. La Conférence des présidents du Sénat ayant estimé, contre l’avis du Premier ministre, que l’étude d’impact produite était insuffisante, le Conseil constitutionnel a été appelé à se prononcer sur ce point[lxviii] : cette étude a ainsi été contrôlée au regard des objectifs poursuivis par le projet de loi, avec cependant « la plus grande retenue »[lxix]. En effet, elle a été jugée suffisante, en dépit des doutes que l’on pouvait nourrir à ce sujet.

Parce que les exigences de sécurité juridique et de qualité de la loi se sont renforcées pour faire face à l’inflation et l’instabilité normatives, la contribution du Conseil d’État à l’élaboration des textes est devenue plus utile et nécessaire qu’elle ne l’a jamais été et les pouvoirs publics trouvent dans les avis du Conseil un cadre clair et sûr leur permettant d’agir.

B.Aujourd’hui, de nouvelles perspectives se dessinent pour la fonction consultative du Conseil d’État avec l’élargissement de ses modalités de saisine (1) et la publicité croissante de ses avis (2).

1. Alors qu’il était le conseiller exclusif du Gouvernement, le Conseil d’État peut aussi être consulté par des membres du Parlement depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008[lxx]. Le président d’une assemblée parlementaire peut en effet soumettre pour avis au Conseil d’État, avant son examen en commission, une proposition de loi déposée par l’un des membres de cette assemblée, sauf si ce dernier s’y oppose[lxxi]. Depuis 2009, quinze propositions de loi ont ainsi été examinées par le Conseil d’État, soit en moyenne deux par an. Dès lors que ces textes ont déjà été déposés, le Conseil s’abstient de les réécrire, mais il fournit à leur auteur des éléments d’appréciation et, chaque fois que c’est utile, des indications pour surmonter les difficultés identifiées. Dans certains cas, il suggère des rédactions aux fins d’explorer des voies de conciliation entre les problèmes qu’il relève et les objectifs poursuivis par les membres du Parlement.

2. Dans les prochaines années, nos méthodes de travail continueront à s’adapter dans la mesure où la règle selon laquelle les avis du Conseil d’État sont secrets est appelée à s’assouplir. Le secret des avis est historiquement lié au secret des délibérations du Gouvernement et du conseil des ministres, pour la préparation desquelles ils sont rendus. Toutefois, en pratique, « soit spontanément, soit à la demande du Conseil, le Gouvernement (…) accepte de plus en plus de rendre publics les avis qu’il a reçus. Il arrive même qu’il prenne l’initiative d’une publicité officielle en reproduisant ces avis dans des circulaires ou instructions (…) »[lxxii]. Cette pratique qui concernait à titre principal les avis rendus sur des questions de droit s’est considérablement renforcée en 2014. En outre, le Président de la République vient d’annoncer – le 20 janvier 2015 – la décision d’étendre ces mesures de publicité aux avis rendus sur les projets de loi. Ces avis vont, à partir de la semaine prochaine, être rendus publics à la date de leur adoption par le conseil des ministres, c’est-à-dire le jour de leur transmission au Parlement. Cette innovation vise à éclairer les débats parlementaires et à mieux informer l’ensemble des citoyens sur des sujets d’intérêt public[lxxiii]. Elle va impliquer un ajustement de nos méthodes de travail : le Conseil d’État sera en effet conduit à développer et enrichir, d’une manière systématique, son opinion sur chacune des questions majeures que soulève le texte examiné par lui, alors qu’aujourd’hui son avis est principalement consacré aux points de désaccord avec le Gouvernement. Cependant, il procèdera toujours à ce qui est, à ses yeux, son apport essentiel, c’est-à-dire à la réécriture des projets de texte dont il est saisi.

Il est à noter que cette publicité élargie des avis du Conseil d’Etat s’inscrit dans le sillage d’autres mesures de valorisation et de diffusion de son activité consultative. A cet égard, depuis le 19 janvier dernier, un service en ligne - ConsiliaWeb – met gratuitement à la disposition du public sur le site internet du Conseil près de 3 500 avis, en particulier ceux rendus entre 1947 et 1989 et, pour les plus récents, ceux pour lesquels l’autorité qui les a sollicités a autorisé leur divulgation. Cette publication s’étend aussi aux synthèses des avis sur les projets de textes, qui sont publiées chaque année dans notre rapport public. Cette nouvelle base de données est bien sûr appelée à s’enrichir au fil du temps.

Vous le voyez, la plus ancienne de nos missions reste en mouvement. Elle démontre à quel point notre institution entend comprendre, accompagner et réaliser les aspirations démocratiques contemporaines, dans la fidélité à son histoire et à ses missions au service de l’Etat de droit.

[i]Texte écrit en collaboration avec Stéphane Eustache, conseiller de tribunal administratif et de cour administrative d’appel, chargé de mission auprès du vice-président du Conseil d’État.

[ii] G. Braibant, « Le rôle du Conseil d’État  dans l’élaboration du droit », Mélanges René Chapus, éd. Montchrestien, 1992, p. 91.

[iii]Y. Gaudemet, B. Stirn, T. Dal Farra et F. Rolin, Les grands avis du Conseil d’État , éd. Dalloz, 3e éd., 2008, p. 3.

[iv] M. Long, « Le Conseil d’État  et la fonction consultative : de la consultation à la décision », RFDA, 8 (5), sept.-oct. 1992, p. 787.

[v] Y. Gaudemet, B. Stirn, T. Dal Farra et F. Rolin, Les grands avis du Conseil d’État , éd. Dalloz, 3e éd., 2008, p. 15.

[vi] Daniel Chabanol, Code de justice administrative, éd. Le Moniteur, 4ème éd., p. 38.

[vii] Selon la formule de l’article 52 de la Constitution du 22 frimaire an VIII reprise à l’article L. 112-2 du code de justice administrative, lui-même issu de l’art. 23 §1 de l’ordonnance  n° 45-1708 du 31 juillet 1945 portant sur le Conseil d’État.

[viii]H. Heopffner, « Les avis du Conseil d’État. Essai de synthèse », RFDA, 2009, p. 895.

[ix] http://www.conseil-etat.fr/Actualites/Communiques/Contrats-de-fourniture-de-gaz-naturel

[x]http://www.conseil-etat.fr/Actualites/Communiques/Reconnaissance-de-l-experience-professionnelle

[xii]Art. L. 112-3 du code de justice administrative, issu de l’art. 24 de l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945  portant sur le Conseil d’État.

[xiii]Art. L. 112-4 du code de justice administrative, issu de l’art. 23 § 2 de l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945  portant sur le Conseil d’État.

[xiv]L’étude de 2011 a porté sur les procédures de consultation et de participation du public à la prise des décisions publiques sous le titre : « Consulter autrement, participer effectivement. » Celle de 2012 a traité sous le titre « Les agences » des conditions dans lesquelles le recours aux agences peut être pertinent pour gérer des services public ou des politiques publiques. Elle a aussi traité de la gouvernance et du pilotage des agences ainsi que des rapports qui devraient s’établir entre l’État et ces opérateurs.

[xv]Sur la période 2008-2014.

[xvi]Par ordre alphabétique, la section de l’administration, la section des finances, la section de l’intérieur, la section des travaux publics, la section sociale.

[xvii]En 2014, le Conseil d’État  a été saisi de 96 projets de loi, 1 proposition de loi, 54 ordonnances, 13 lois du pays, 756 décrets réglementaires et 209 décrets individuels, arrêtés, décisions et remises gracieuses.

[xviii] Al. 2 de l’art. 39 de la Constitution. Rendue obligatoire par la Constitution du 22 frimaire An VIII, cette consultation sur les projets de loi est devenue facultative sous la Restauration et la monarchie de Juillet entre 1815 et 1852, puis sous la IIIe République entre 1872 et 1945. L’ordonnance n°45-1708 du 31 juillet 1945 portant sur le Conseil d’État  (art. 21) rétablit le caractère obligatoire de cette consultation.

[xix]Y. Gaudemet, « Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État  dans le processus législatif », in Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État, éd. Montchrestien, 1988, p.

[xx] Ordonnances de l’al. 2 art. 38 de la Constitution et de l’al. 2 de l’art. 74-1 de la Constitution.

[xxi] Par commodité, pour les projets de loi, le texte initial soumis au Conseil d’État  est imprimé sur papier rose, le texte adopté par le Conseil d’État  sur papier vert et le texte transmis au Parlement, après délibération du conseil des ministres, sur papier bleu (il s’agit alors de « la bleue », à distinguer « des bleus » qui arrêtent les arbitrages rendus par le Premier ministre en réunions interministérielles).

[xxii]Voir, en ce qui concerne une loi adoptée à la suite d’une procédure irrégulière : CC n°2003-468 du 3 avril 2003, Loi relative à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques, cons. 7.

[xxiii]Sauf exception : Al. 2 de l’art. 37 de la Constitution.

[xxiv] « Dans les cas où la consultation du Conseil d’État n’est pas obligatoire, le Gouvernement peut toujours, en raison de la complexité ou de la nature de la matière traitée, soumettre un texte au Conseil d’État afin qu’il donne son avis. Dans le cas d’un projet de décret, la mention « après avis du Conseil d’État, » en lieu et place de « le Conseil d’État entendu, » dans les visas signifie que la consultation du Conseil d’État n’était pas obligatoire, et que le décret reste un décret « simple » qui pourra être modifié à l’avenir sans consultation du Conseil d’État. », extrait du Guide de légistique, http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Guide-de-legistique/II.-Etapes-de-l-elaboration-des-textes/2.1.-Regles-generales/2.1.3.-Consultations-prealables

[xxv] CE, Ass., 3 juillet 1998, Syndicat national de l’environnement CFDT et autres, n°177248.

[xxvi]Voir, par ex. CE 7 mai 2012, Syndicat CFDT des personnels de l’administration centrale du ministère de la justice et de la Légion d’Honneur, n°337700.

[xxvii]Voir par ex. l’annulation d’un décret  modifiant l’économie générale du texte adopté par le Conseil d’État, sans pour autant correspondre au projet initialement présenté par le Gouvernement : CE 10 janvier 2007, Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles, n°283175.

[xxviii]Cette règle s’apprécie « par ensemble de dispositions ayant un rapport entre elles », c’est-à-dire par article ou par alinéa, voir par ex. CE 16 octobre 1968, Union nationale des grandes pharmacies de France, n°69186 ou encore CE 20 décembre 2013, Fédération française des artisans coopérateurs du bâtiment, n°357198.

[xxix]Comme le souligne le Guide de légistique, co-édité par le Secrétariat général du Gouvernement et le Conseil d’État  et publié sur le site internet Légifrance, lorsque le Gouvernement veut apporter des modifications d’ampleur limitée au texte initial, il peut suggérer « au rapporteur [du texte au Conseil d’État ] de reprendre à son compte certaines des modifications envisagées ou, si celles-ci ne semblent pas devoir recueillir l'accord du Conseil d'État, en les faisant consigner comme des amendements verbalement apportés par le Gouvernement à son texte initial. » cf. http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Guide-de-legistique/II.-Etapes-de-l-elaboration-des-textes/2.4.-Decret/2.4.2.-Elaboration-d-un-decret-en-Conseil-d-Etat.

[xxx]CE 28 décembre 2009, Syndicat de la magistrature, n°312314.

[xxxi]CE 17 juillet 2013, Syndicat national des professionnels de santé au travail et autres, n°358109.

[xxxii]H. Belrhali-Bernard, « Les avis conformes du Conseil d’État  », AJDA, 2008, p. 1181.

[xxxiii]CEDH, Grande Chambre, 6 mai 2003, Kleyn c. Pays-Bas, n°39343/98 ; CEDH 9 novembre 2006, Sacilor Lormines c/ France, n°65411/01. Confirmé récemment par CEDH 8 mars 2011, Escoffier c. France, n°8615/08.

[xxxiv]CEDH 28 septembre 2005, Procola c. Luxembourg, Série A, n°326.

[xxxv]Art. R. 122-20 du code de justice administrative.

[xxxvi]L’art. R. 122-21-1 du code de justice administrative a été créé par le décret n°2008-225 du 6 mars 2008, qui est une reprise presque littérale de l’art. 20 de la loi du 24 mai 1872, abrogé par l’art. 84 de la loi du 18 décembre 1940. Cette règle d’incompatibilité était cependant observée dans la pratique avant l’adoption de ce décret et avait déjà été consacrée par la jurisprudence (CE 11 juillet 2007, USMA). Le 5e alinéa de l’art. R. 122-21 du code de justice administrative dispose également que « Lorsque l'assemblée du contentieux est saisie d'un recours contre un acte pris après avis du Conseil d’État, le président de la section administrative qui a eu à délibérer de cet avis ne siège pas. Il est suppléé par le plus ancien dans l'ordre du tableau des présidents adjoints des autres sections administratives, à l'exception de ceux siégeant en application du premier et du troisième alinéas. »

[xxxvii]Art. R. 122-21-2 du code de justice administrative.

[xxxviii]Art. R. 122-21-3 du code de justice administrative.

[xxxix] Voir not. G. Marcou, « Une cour administrative suprême : particularité française ou modèle en expansion ? », Pouvoirs, 123, 2007 ; A. Gaillet, « Le Conseil d’État  français : histoire d’une exportation difficile en Europe », RFDA, 2013, p. 793.

[xl]CEDH 30 juin 2009, Union fédérale des consommateurs Que Choisir de Côte d’Or c. France, n°39699/03.

[xli]H. Heopffner, « Les avis du Conseil d’État . Essai de synthèse », RFDA, 2009, p. 895 

[xlii]Cité par H. Heopffner, « Les avis du Conseil d’État . Essai de synthèse », RFDA, 2009, p. 895 

[xliii] M. Long, « Le Conseil d’État et la fonction consultative : de la consultation à la décision », RFDA, n°8, 1992, p. 790.

[xliv] CC n°99-421 DC du 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes, cons. 13 ; voir, sur ce point, l’avis défavorable délivré sur certaines dispositions du projet de loi de décentralisation et de réforme de l’action publique, en raison de l’obscurité de la notion de « pôles de compétitivité » ou de l’excessive complexité du « pacte de gouvernance territoriale », Rapport public 2014, p. 197.

[xlv]Qui sont contraires à la Constitution (CC n°85-198 DC du 13 décembre 1985, Loi modifiant la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 et portant diverses dispositions relatives à la communication audiovisuelle), à la différence des incompétences positives par lesquelles une loi intervient dans le domaine du règlement (CC n°82-143 DC, du 30 juillet 1982, Loi sur les prix et les revenus). Dans ce dernier cas, le Premier ministre dispose en effet de procédures spécifiques lui permettant, sur le fondement de l’art. 41 ou de l’art. 37 al. 2 de la Constitution, d’assurer la protection du domaine réglementaire contre d’éventuels empiètements de la loi (voir CC n°2012-649 DC du 15 mars 2012,  Loi relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, cons. 10 : une telle délégalisation ne peut ainsi être demandée à l’occasion d’un contrôle de constitutionnalité a priori de la loi, sur le fondement de l’art. 61 de la Constitution).

[xlvi]Qui sont contraires à la Constitution, voir CC n°2005-512 du 21 avril 2005, Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, cons. 8 : « Il résulte de [l’article 6 de la Déclaration de 1789] comme de l'ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l'objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative ».

[xlvii]La cellule de veille européenne au sein de la délégation au droit européen.

[xlviii] R. Denoix de Saint Marc, « Le rôle du Conseil d’État dans la préparation et l’application des lois », Revue de jurisprudence commerciale, 1997, p. 178 : « il considère qu’en dehors des choix relevant de la pure opportunité politique, ses avis peuvent se fonder sur ce qu’on pourrait appeler les ‘bonnes pratiques législatives ». 

[xlix]M. Long, « Le Conseil d’État et la fonction consultative : de la consultation à la décision », RFDA, n°8, 1992, p. 790.

[l]M. Long, « Mon expérience de la fonction consultative du Conseil d’État de 1987 à 1995 », RDP, n°5/6, 1998, p. 1427.

[li]  Par exemple, c’est en ce sens qu’en 2013, ont été estimées « inopportunes » certaines obligations nouvelles prévues par le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, cf. Rapport public 2014, p. 171. Ces dispositions concernent la transmission systématique des déclarations d’intérêts de certaines catégories de fonctionnaires à la Commission de déontologie de la fonction publique et la possibilité de demander à cette commission une deuxième délibération sur les demandes de cumul d’activité.

[lii]Même si, en droit, cette ancienne conception a été clairement abandonnée, s’agissant des décrets en Conseil d’État : CE 11 juillet 2007, Union syndicale des magistrats administratifs (USMA), n° 302040.

[liii]Circulaire du 21 novembre 1995 relative à l'expérimentation d'une étude d'impact accompagnant les projets de loi et de décret en Conseil d'État ; voir également : circulaire du 26 janvier 1998 relative à l'étude d'impact des projets de loi et de décret en Conseil d'État ; circulaire du 26 août 2003 relative à la maîtrise de l'inflation normative et à l'amélioration de la qualité de la réglementation ; circulaire du 30 septembre 2003 relative à la qualité de la réglementation.

[liv] Rapport disponible en ligne : http://www.conseil-État.fr/media/document//rapportpublic2006.pdf ; voir également, le rapport remis au Premier ministre par le secrétariat général du Gouvernement sur les suites du rapport public 2006 du Conseil d’État, disponible en ligne : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/074000100/0000.pdf

[lv] Voir art. 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

[lvi]Voir al. 2 de l’art. 11 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution Voir également la réserve d’interprétation émise par le Conseil constitutionnel, CC 9 avril 2009, n°2009-579 DC, § 21 : « Considérant, en premier lieu, que le deuxième alinéa de l'article 11 dispose que les projets de loi tendant à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures qui sont normalement du domaine de la loi doivent être accompagnés " des documents visés aux deuxième à septième alinéas et à l'avant-dernier alinéa de l'article 8 " ; que cette disposition ne saurait, sans méconnaître l'article 38 de la Constitution, être interprétée comme imposant au Gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu'il entend prendre sur le fondement de l'habilitation qu'il demande pour l'exécution de son programme ».

[lvii]Comme en dispose l’article 11 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009, le régime « général » d’études d’impact, prévu à l’art. 8 de la même loi, ne s’applique ni aux projets de loi de finances, ni aux projets de loi de financement de la sécurité sociale, ni aux projets de loi ayant pour objet la ratification ou l’approbation de certains traités ou accords internationaux. Toutefois, le 8e de l’art. 51 de la loi organique n°2001-692 du 1er août 2001 modifiée prévoit une obligation d’étude d’impact pour certaines dispositions des projets de loi de finances (ces dispositions sont énumérées au 2° du I et au 7° du II de l’art. 34 de la même loi organique). En outre, l’art. LO 111-4 du code de la sécurité sociale prévoit une obligation d’étude d’impact pour certaines dispositions des projets de loi de financement de la sécurité sociale (ces dispositions sont énumérées au V de l’art. LO 111-3 du même code) ; enfin, s’agissant des projets de loi ayant pour objet la ratification ou l’approbation de certains traités ou accords internationaux, le 3e alinéa de l’art. 11 de la loi organique n°2009-403 du 15 avril 2009 prévoit un régime « spécial » d’étude d’impact et énumère les éléments devant y figurer.

[lviii]Circulaire du 17 février 2011 relative à la simplification des normes concernant les entreprises et les collectivités territoriales.

[lix]Circulaire du 17 juillet 2013 relative à la mise en œuvre du gel de la réglementation.

[lx]Rapport public 2010, p. 98.

[lxi]Rapport public 2013, p. 182.

[lxii]Rapport public 2014, pp. 162-163.

[lxiii] Voir par ex., Rapport public 2013, pp. 182 et Rapport public 2012, pp. 137-138.

[lxiv]Rapport public 2013, p.183

[lxv]Rapport public 2011, p.97.

[lxvi]Rapport public 2011, p. 97.

[lxvii] Voir par ex. Rapport public 2013, p.181.

[lxviii]CC n°2014-12 FNR du 1er juillet 2014, Présentation du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

[lxix]B.-L. Combrade, « Cinq ans plus tard : première (et dernière ?) application de l’article 39, alinéa 4 de la Constitution », Petites affiches, 27 août 2014, n°171, p.6.

[lxx]Ce dispositif s’inspire de celui prévu par la loi lois du 3 mars 1849 sur le Conseil d’État  (articles 2 et 3) et celle du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d’État  (article 8), et répond aux propositions formulées en ce sens (voir not. R. Cassin, Le Conseil d’État  1799-1974, éd. CNRS, 1974, p. 852 ; voir également les rapports des comités présidés par G. Vedel en 1992 et E. Balladur en 2007). Voir sur ce point : P. Gonod, « Le Conseil d’État, conseil du Parlement. A propos de l’article 39 alinéa 3 nouveau de la Constitution », RFDA, 2008, p. 871 ; P. Gonod, « L’examen des propositions de loi par le Conseil d’État : procédure novatrice ou simple gadget ? », RFDA, 2009, p. 890.

[lxxi] Al. 5 de l’art. 39 de la Constitution. Voir pour les modalités de mise en œuvre de cette procédure : loi n° 2009-689 du 15 juin 2009 tendant à modifier l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et à compléter le code de justice administrative et décret n° 2009-926 du 29 juillet 2009 relatif à l'examen par le Conseil d’État  des propositions de loi.

[lxxii]Y. Gaudemet, B. Stirn, T. Dal Farra et F. Rolin, Les grands avis du Conseil d’État , éd. Dalloz, 3e éd., 2008, p.50.

[lxxiii]Voir, Discours du Président de la République, mardi 20 janvier 2015, à l’occasion des vœux aux corps constitués, p. 7.