Ouverture d’un recours contre les rescrits fiscaux

Décision de justice
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Le Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles les rescrits fiscaux peuvent être contestés

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L’essentiel :

•    La procédure de rescrit permet à un contribuable de demander à l’administration de prendre position sur l’application d’un texte fiscal à sa situation, et de se prévaloir ensuite de cette réponse dans le cadre de la procédure d’imposition.

•    Après avoir rappelé que les rescrits fiscaux ne peuvent en principe pas être contestés par le contribuable, le Conseil d’État a posé une exception à ce principe lorsque l’application de la position prise par l’administration entraînerait des effets notables autres que fiscaux.

•    Dans ce cas, le contribuable auteur de la demande de rescrit doit préalablement demander à l’administration de procéder à un second examen de sa situation dans les conditions prévues par l’article L. 80 CB du livre des procédures fiscales.

Les faits et la procédure :

La société Export Press a demandé à l’administration fiscale, sur le fondement de la procédure générale de rescrit prévu au 1° de l’article L.80 B du livre des procédures fiscales, si elle pouvait légalement soumettre les ventes de huit revues qu’elle édite au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux livres. Par huit lettres, le directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris a répondu que ces différentes revues relevaient du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée et non du taux réduit.

La société Export Press a formé des recours devant le tribunal administratif de Paris contre ces réponses. Ce dernier a rejeté ses demandes. La cour administrative d’appel de Paris a annulé ces jugements ainsi que les décisions du directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France, estimant que la société pouvait bénéficier du taux réduit.

Le Conseil d’État était saisi des pourvois en cassation formés par le ministre de l’économie et des finances contre ces arrêts de la cour administrative d’appel de Paris.

La décision du Conseil d’État :

Le Conseil d’État a rappelé qu’il n’était en principe pas possible de former un recours direct contre ces décisions compte tenu de la possibilité pour le contribuable de contester les impositions mises à sa charge. Il a cependant estimé qu’il en allait autrement lorsque la prise de position de l’administration, à supposer que le contribuable s’y conforme, entraînerait des effets notables autres que fiscaux et qu’ainsi, aucune autre voie de recours ne lui permettrait pas d’obtenir un résultat équivalent.

Tel est par exemple le cas lorsque le fait de se conformer à la prise de position de l’administration aurait pour effet, en pratique, de faire peser sur le contribuable de lourdes sujétions, de le pénaliser significativement sur le plan économique ou encore de le faire renoncer à un projet important pour lui ou de l’amener à le modifier substantiellement. Ainsi, le Conseil d'État a précisé que, eu égard aux enjeux économiques qui les motivent, les prises de position défavorables de l’administration dans le cadre de certaines procédures spécifiques de rescrit étaient réputées pouvoir faire l’objet d’un recours.

Lorsque les conditions d’ouverture du recours remplies, le contribuable qui entend contester une prise de position de l’administration en réponse à sa demande de rescrit doit préalablement la saisir d’une demande de second examen de cette demande sur le fondement de l’article L. 80 CB du livre des procédures fiscales. Le Conseil d’État précise que cette demande de second examen sera un préalable obligatoire à un recours contre le rescrit.
Dans la mesure où il était raisonnable de penser que les contribuables n’avaient pu anticiper le caractère obligatoire de ce recours préalable à la saisine du juge avant sa décision, il a toutefois décidé que cette formalité ne serait exigée que pour les demandes présentées postérieurement à celle-ci.

En l’espèce, l’application du taux normal de taxe sur la valeur ajoutée aux revues éditées par la société Export Press était de nature à pénaliser significativement ses ventes. Le Conseil d’État a donc estimé que les réponses apportées par le directeur des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris à ses demandes de rescrit étaient susceptibles de faire l’objet d’un recours.
Le Conseil d’État confirme les arrêts de la cour administrative d’appel de Paris et rejette les huit pourvois du ministre de l’économie et des finances contre les arrêts de la cour. La société pourra donc bénéficier du taux réduit.