Lettre de la justice administrative n°67
LJA N°67 : Printemps 2022
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À la Une
Éditorial

Édito de Didier-Roland Tabuteau, vice-président du Conseil d’État
Le service public n’est toutefois ni une abstraction théorique, ni une curiosité historique que l’on devrait scruter comme un archéologue les ornements d’une sépulture antique.
Au contraire, il est plus que jamais au cœur du pacte républicain. Il est le ciment de la cohésion sociale. Il est ce qui permet à la société de résister, de surmonter les épreuves, de dépasser les tensions qui la traversent, aussi intenses soient-elles, et de se projeter dans l’avenir : pensons ainsi au rôle déterminant qu’ont joué, pendant la crise sanitaire, les hôpitaux et les services de santé, les services sanitaires et sociaux de l’État et des collectivités locales, les écoles et les universités, les mairies et les préfectures. Et rappelons-nous aussi que le service public est quotidiennement incarné par des femmes et des hommes animés par un profond attachement à la chose publique, par le sens de l’intérêt général et la volonté de servir.
Par son histoire et sa place dans les institutions, la juridiction administrative a, dans ce contexte, une responsabilité particulière.
Elle est, bien sûr, une garante incontournable de l’État de droit, qui vérifie que ne sont méconnus ni la hiérarchie des normes, ni les droits et libertés. Le juge administratif est ainsi là pour sanctionner l’administration toutes les fois qu’elle s’écarte de la règle de droit ; les sections consultatives et l’Assemblée générale du Conseil d’État veillent quant à elles, en amont, à la régularité juridique des projets de texte qui lui sont transmis.
Mais la juridiction administrative n’est pas qu’un indispensable « gendarme » du droit.
Elle est aussi une vigie, qui oriente les pouvoirs publics en leur indiquant les récifs à contourner pour tenir le cap qu’ils ont fixé, en restant fidèles aux principes qui fondent notre contrat social. La jurisprudence, par exemple, est tout empreinte de rappels, de signaux, d’indications que le juge exprime afin d’aider les responsables publics à naviguer et à identifier à l’avance les risques qu’ils encourent, ce qui favorise à la fois la sécurité juridique et l’efficacité des politiques publiques.
La juridiction administrative contribue, ensuite, à la traduction effective de ces politiques publiques sur le terrain : tout en restant fermes quant aux bornes à ne pas dépasser, le Conseil d’État, les cours administratives d’appel et les tribunaux administratives veillent ainsi à rendre des avis et des décisions réalistes, pragmatiques, qui agissent concrètement sur la vie quotidienne des citoyens, car le droit ne doit pas être un obstacle mais un outil au service de l’action publique et du bon fonctionnement de la société.
Elle est enfin une sorte d’éclaireuse, qui par ses études explore et défriche des sujets d’avenir, des sujets de société, des sujets d’intérêt général qui nous concernent toutes et tous : ainsi la laïcité, la bioéthique, la citoyenneté, le sport, l’évaluation des politiques publiques, les états d’urgence ou encore les conditions de ressources dans les prestations sociales. Dans chacune de ses études, le Conseil d’État vise à la fois à délivrer une information fiable et impartiale qui puisse utilement nourrir le débat démocratique, et à formuler des propositions opérationnelles de nature à accroître la pertinence et l’efficacité des politiques publiques.
C’est en faisant du service public sa boussole que la juridiction administrative a bâti sa légitimité. Et quelques semaines après mon arrivée à la vice-présidence du Conseil d’État, je peux vous assurer que je ferai tout mon possible pour qu’elle continue d’avancer et de se réformer, en recherchant à être toujours plus accessible, toujours plus compréhensible, toujours plus ouverte vers l’extérieur et vers la société qu’elle sert. Toujours mue par le sens du service et la poursuite de l’intérêt général.
La justice administrative en actes
Contentieux
Droits civils et individuels
Le Conseil d’État confirme les deux amendes d’un montant total de 100 millions d’euros infligées à l’encontre de Google. Il estime que Google n’a pas respecté ses obligations en matière de recueil du consentement de ses utilisateurs pour le dépôt de cookies et juge que les amendes infligées par la CNIL ne sont pas disproportionnées pour Google, compte tenu notamment des bénéfices importants produits par les cookies publicitaires.

Procédure
Lorsqu’il juge en cassation après une décision d’un juge des référés d’un tribunal administratif, le Conseil d'État peut rejeter une QPC qui serait déposée la première fois devant lui, sans avoir à motiver ce rejet. Cela est possible si le Conseil d’État estime que le juge des référés du tribunal a légitimement estimé que le recours initial était irrecevable, ne relevait pas de la justice administrative ou ne présentait pas un caractère d’urgence.
Commerce et industrie
Lorsqu’il est saisi d’un référé « secret des affaires » concernant l’intervention d’un assistant à maîtrise d’ouvrage dans la procédure de passation d’un marché public, le juge administratif doit prendre en compte, pour mesurer le risque d’atteinte imminente au secret des affaires, l’obligation professionnelle de confidentialité à laquelle est soumis l’intervenant.
Urbanisme
Le Conseil d’État précise le régime contentieux qui s’applique, après que le juge administratif a sursis à statuer pour permettre la régularisation d’une autorisation d’urbanisme.
Étrangers
Les conditions de délivrance d’une carte de séjour portant la mention « étudiant », détaillées par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), ne sont pas applicables à la demande d’un visa de long séjour « étudiant ».
Plan local d’urbanisme
La cour administrative d’appel de Paris juge que, dès lors qu’une commune est dessaisie de la compétence à établir un plan local d’urbanisme (PLU) au profit d’un établissement de coopération intercommunale, le tribunal administratif n’est pas tenu de lui demander de présenter des observations en cas de recours contre ce PLU. Et si la commune a été appelée à fournir des observations, cela ne lui donne pas le droit de faire appel du jugement du tribunal.
Responsabilité
Écartant les fautes invoquées à l’encontre du Grand port maritime de Marseille (GPMM) dans l’exercice de ses pouvoirs de police portuaire en matière d’amarrage et d’intervention des remorqueurs et considérant l’évènement sans lien avec les ouvrages et installations portuaires, la cour administrative d’appel de Marseille rejette le recours indemnitaire introduit par le mandataire liquidateur et les assureurs de la SNCM contre le GPMM à la suite de l’accident ayant affecté le navire Napoléon Bonaparte dans la nuit du 27 au 28 octobre 2012.
Congé de formation professionnelle
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise juge que le congé de formation professionnelle d’un fonctionnaire prolongé au-delà de douze mois doit être assimilé à un congé sans solde, ne lui permettant pas de bénéficier du revenu de solidarité active (RSA), qui est réservé aux personnes dans l’incapacité de travailler.
Conditions de détention
Le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a condamné l’État à verser une indemnisation à huit détenus de la maison d’arrêt d’Évreux en réparation du préjudice moral engendré par leurs conditions de détention.
Logement locatif – Carence de la commune
Le tribunal administratif de Toulon annule l’arrêté du préfet du Var qui a prononcé la carence de la commune de Vinon-sur-Verdon en matière de logement sociaux. Il juge que, lors de la phase préalable à cette décision, le comité régional de l'habitat et de l'hébergement n’a pas été suffisamment éclairé par les services de l’État sur les raisons conduisant à proposer de retenir la carence de la commune de Vinon-sur-Verdon.
Exclusion du bénéfice de la Convention de Genève d’un haut gradé de l’armée coupable de crimes de guerre
Les exactions commises à l’encontre de civils par des milices placées sous le commandement du requérant entre juin et octobre 1997 lors des conflits du Congo, sont des crimes de guerre au regard des différents instruments internationaux pertinents (Charte du tribunal militaire international annexé à l’Accord de Londres du 8 août 1945, Protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 août 1949 adopté le 8 juin 1977, Statut de Rome de la Cour pénale internationale). Ces crimes l’excluent de fait du bénéfice de la Convention de Genève.
Refus de l’asile d’un demandeur afghan en raison de sa simple présence dans un État occidental
La Cour écarte l’idée que la simple présence d’un demandeur d’asile en France ou dans un Etat « occidental » suffirait à caractériser un profil occidentalisé du demandeur, lui faisant courir le risque de subir des persécutions en cas de retour en Afghanistan. La décision n’écarte pas l’existence d’un risque lié à un tel profil mais précise qu’il revient au demandeur de fournir des éléments propres à sa situation personnelle permettant d’établir l’acquisition de ce profil ou les risques qui y sont liés.
Statut de réfugiée accordé à une Ethiopienne originaire de la région du Tigré
La Cour a considéré – au regard des sources publiques consultées faisant état de multiples arrestations et exactions ciblées à l’encontre de membres de l’ethnie tigréenne – que l’appartenance de la requérante à cette ethnie et sa provenance de la zone de conflit, étaient de nature à l’exposer actuellement à des persécutions en raison des opinions politiques qui pourraient lui être imputées. Elle se voit reconnaitre en conséquence la qualité de réfugiée.
Avis
Avis sur un projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique
Lors de l’examen du projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique, le Conseil d’État a estimé que l’évolution de la situation épidémique justifiait la mise en place du « passe vaccinal ». En effet, l’outil, qui visait à limiter le risque de développer des formes graves de la maladie et à inciter à la vaccination, s’inscrivait dans l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de la santé. En revanche, le Conseil d’État a recommandé d'accepter le certificat de rétablissement comme substitut du justificatif de statut vaccinal, indépendamment de la nature des activités pratiquées et de l’état médical actuel de la personne.

Études & colloques
Les réseaux sociaux, vecteurs de transformation de l’action publique
3e conférence du cycle annuel de conférences sur les réseaux sociaux organisée par la section du rapport et des études, 23 mars 2022
Ces dernières années, les réseaux sociaux ont profondément modifié les relations entre les pouvoirs publics et les citoyens. Outils de communication directe avec les usagers, de recueil des opinions ou de recrutement… Comment les réseaux sociaux ont-ils transformé l’action publique et quels risques et opportunités représentent-ils pour les administrations ? Pour évoquer ce sujet, le Conseil d’État a organisé, le 23 mars de 17h30 à 19h30, la troisième conférence du cycle sur les réseaux sociaux sur le thème de la transformation de l’action publique.

Actualisation 2021-2022 du Guide des outils d'action économique
Depuis 2015, le Conseil d’État actualise chaque année un guide destiné à mieux faire connaître aux personnes publiques les différents outils d’action économique à leur disposition. Cette nouvelle actualisation intègre, pour l'ensemble des 24 fiches composant le guide, les mises à jour rendues nécessaires par l'évolution des textes et de la jurisprudence.

Actualisation des Recueils de jurisprudence associations et fondations (ARUP – FRUP)
Le Conseil d’État actualise, chaque semestre, les recueils de jurisprudence destinés aux associations et fondations reconnues d’utilité publique. Ces recueils témoignent de la volonté du Conseil d’État d’apporter un soutien institutionnel accru à la création d’associations ou fondations, en facilitant et encourageant leur création et leur gestion.

La justice administrative au quotidien
Les dernières publications
Ouvrages parus fin 2021 (éd. La documentation Française, coll. « Droits et Débats »)
Vers un nouveau droit du travail ? Regards croisés du Conseil d’État et de la Cour de cassation
Cet ouvrage analyse les nouveaux défis du monde du travail que le droit doit prendre en compte, le rôle du juge dans le contrôle et la mise en œuvre des accords collectifs, et aborde les questions de gestion de l’emploi et de protection des salariés.

Les professions de santé demain
Cet ouvrage traite des nouvelles professions de santé et des exercices nouveaux des professions, des nouveaux enjeux de la rémunération médicale, et des enjeux de la médecine de ville et de l’accès aux soins des usagers.

Guide de jurisprudence 2021 du Conseil d’État
Retrouvez les 31 décisions de justice marquantes du Conseil d’État en 2021 dans la nouvelle édition du « Petit Combarnous ». Pour chacune d’entre elles, ce guide de jurisprudence propose une courte analyse qui revient sur les principaux apports juridiques, un lien vers la décision du Conseil d’État dans son intégralité et les principales sources juridiques.

Médiation
Retour sur cinq années de médiation administrative
Cinq ans après l’entrée en vigueur de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, la justice administrative fait le point sur la médiation administrative, outil d’apaisement et de co-construction au bénéfice des citoyens. Depuis 2017, 4 327 médiations volontaires ont été réalisées par les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel, dont la moitié a permis d’aboutir à un accord. Le dispositif de médiation préalable obligatoire, pérennisé depuis le 25 mars 2022, a permis de trouver un accord pour 76 % des 4 364 médiations préalables menées depuis le début de son expérimentation.

Les actions en juridiction pour promouvoir la médiation
Ces derniers mois, de nombreuses juridictions ont contribué à la progression de la médiation et au développement de ce nouveau mode de résolution à l’amiable des litiges. Ainsi, les juridictions nancéiennes ont signé, le 9 décembre dernier, une convention avec la ville pour mettre en œuvre et favoriser la médiation au quotidien. Elles ont également signé une convention en ce sens avec la préfecture de Meurthe-et-Moselle le 13 janvier, ainsi qu’une convention le 2 mars avec l’association Armédial, association sans but lucratif dont les médiateurs sont des professionnels d’expérience dans le monde du droit et/ou de l’entreprise. Le 3 février, c’était au tour du tribunal administratif de Dijon de signer une convention avec les centres de gestion de la fonction publique territoriale de la Côte-d’Or, de la Nièvre, de Saône-et-Loire et de l’Yonne. Les centres de gestion s’engagent notamment à informer les collectivités territoriales des atouts de la médiation et à les encourager à recourir au dispositif.
Des évènements ont également été consacrés à la médiation. La cour administrative d’appel de Bordeaux a organisé, avec les barreaux de Bordeaux et Pau, une journée d’étude consacrée à la médiation en matière administrative le 3 décembre 2021. Ont notamment été évoquées les perspectives offertes par la médiation aux requérants et à l’administration ainsi que l’évolution de la médiation avec les acteurs. Trois jours plus tard, c’est au centre de gestion de la fonction publique territoriale du Morbihan que le tribunal administratif de Rennes a participé à une conférence-débat autour du sujet.
Enfin, sur le terrain, des succès sont à souligner au niveau local. À Clermont-Ferrand, le tribunal a organisé avec succès une médiation entre le ministère du travail et 307 salariés concernés par le dispositif retraite amiante (Acaata), débouchant ainsi sur une utilisation réussie de la médiation dans un contentieux de masse. A Bastia, le tribunal administratif a enregistré un succès grandissant de la médiation, avec 19 dossiers engagés en 2021, contre 11 l’année précédente, et un taux d’aboutissement de 75 %. La médiation commence ainsi à s’imposer comme un véritable mode alternatif de règlement des litiges sur l’Ile de Beauté. Quant au comité de suivi de la médiation qui s’est tenu entre la cour administrative d’appel de Nantes et le tribunal administratif de Caen le 11 janvier dernier, il a révélé le succès de la médiation dans le Calvados, l’Orne et la Manche, puisque l’objectif national « 1 % médiation » est pleinement atteint : sur les 2 900 recours déposées en 2021 devant le la juridiction caennaise, 40 ont trouvé une issue grâce à une médiation.

Les déplacements en juridictions
Le 21 mars, Didier-Roland Tabuteau a effectué son premier déplacement en juridiction en tant que vice-président du Conseil d’État. Il s’est rendu au tribunal administratif de Caen afin de rencontrer les personnels du tribunal, les bâtonniers et la presse locale. L’occasion de dresser le bilan de la juridiction administrative caennaise et de rappeler les missions du juge administratif au service du citoyen.

Événements
Conférence des chefs des cours suprêmes des États membres de l’Union européenne – 21 février 2022
Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État et la Cour de cassation ont organisé, lundi 21 février 2022 une conférence des chefs de cours suprêmes des États membres de l’Union européenne consacrée au rôle des juges dans la consolidation de l’État de droit en Europe.

Conférence Vincent Wright : La République et les groupements privés d’intérêt général (1870-1914) - une enquête dans les archives du Conseil d’État
Entre 1870 et 1914, le Conseil d’État a examiné plus de 1 000 demandes de reconnaissance d’utilité publique déposées par des associations et fondations. Cette activité lui a permis d’élaborer une doctrine exigeante de l’intérêt général, visant à concilier la liberté associative et les droits du public. Plongée dans les archives de l’institution le 7 mars 2022 à 18h avec Chloé Gaboriaux, maîtresse de conférences en science politique à Sciences Po Lyon et directrice de la revue Mots. Les langages du politique.

Remise du prix annuel du tribunal administratif de Poitiers
Chaque année, le tribunal administratif de Poitiers récompense l’excellence et l’investissement des étudiants en droit public de l’université de Poitiers avec le « prix du tribunal administratif », qui récompense le meilleur étudiant de master 1 de droit public durant l’année écoulée. Le prix de cette année a été décerné à Florentin Grevy, meilleur étudiant du master 1 « droit public des affaires » 2020-2021 de l’université de Poitiers.

Procès fictif sur les outils d'intelligence artificielle à la cour administrative d’appel de Lyon
Dans le cadre de la TechLawClinics de la faculté de droit de Lyon UCLY, un procès fictif a été organisé à la cour administrative de Lyon. Durant ce procès, a été abordée la question de l’encadrement juridique des outils dits d’intelligence artificielle servant d’interface entre les citoyens et les services publics de type chatbot.

Audience solennelle du tribunal administratif de Melun
Le tribunal administratif de Melun a organisé son audience solennelle le 7 février. François Lamontagne, président du tribunal, a évoqué le bilan de l'année écoulée, durant laquelle le TA a rendu près de 11 000 décisions et enregistré un nombre record de recours (11 807).

Séminaire régional de l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA)
Le vendredi 25 mars 2022, l’Agence de l’Union européenne pour l’asile (AUEA) a organisé, au Conseil d’État et en coopération avec la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), une journée de discussions sur le régime d’asile européen. Outre des membres des trois institutions, l’événement a réuni, dans le cadre de tables rondes, des représentants de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), ainsi que des magistrats de France, de Belgique, du Luxembourg et de Suisse.

Les rendez-vous diversité & égalité
Journée internationale des droits des femmes
A l’occasion du 8 mars, le Conseil d’État et les juridictions administratives se sont mobilisés pour sensibiliser sur l’égalité femmes/hommes au travail. Conférences, expositions, campagnes de communication … De nombreuses initiatives ont été prises afin de partager autour du sujet. La journée a également été l’occasion de faire le bilan sur la place des femmes au sein de la justice administrative, qui représentent désormais 60 % des effectifs totaux, avec une progression constante dans les postes à responsabilité.

Accueil de stagiaires dans les juridictions administratives
Dans le cadre de son engagement en faveur de l’égalité et de la diversité, la justice administrative reçoit régulièrement des stagiaires afin de susciter des vocations parmi des jeunes collégiens et de les intégrer au monde professionnel. Ainsi, le tribunal administratif de Paris a signé avec le rectorat de l’académie de Paris une convention afin de favoriser l'accueil des collégiens d’établissements situés en zone REP et REP+. C’est dans ce cadre que la juridiction a accueilli trois stagiaires de 3e du collège Daniel Mayer, situé dans le XVIIIe arrondissement de la capitale.
La cour administrative d’appel de Paris a également signé une convention avec le collège Evariste Galois (XIIIe) afin de recevoir des élèves de classe de 3 e pour leur stage obligatoire.
D’autres juridictions sont également mobilisées, comme la cour administrative d’appel de Nantes, qui a noué un partenariat avec la Fondation Agir contre l’exclusion (FACE) en Loire-Atlantique, pour accueillir chaque année des stagiaires ou des vacataires de tous horizons. Elle a, dans ce cadre, accueilli un stagiaire de 3e en janvier 2022 et échangé avec le président de l’association pour consolider son partenariat. Quant au tribunal administratif de Besançon, il a accueilli deux stagiaires de 3e du collège Diderot du 31 janvier au 4 février 2022, à la suite de la convention de partenariat avec cet établissement, classé en réseau d’éducation prioritaire.
De son côté, le Conseil d’État a accueilli cinq stagiaires de 3e du collège Utrillo (XVIIIe), ainsi que des lycéens pour une journée de rencontre et d’échange dans le cadre du partenariat conclu avec l’association Envol, le campus de la Banque Postale, qui accompagne des jeunes élèves talentueux issus de milieux modestes sur l’ensemble de la France.

Témoignage d’une juridiction administrative
A l’occasion de la première audience de la nouvelle cour administrative d’appel de Toulouse, le président Jean-François Moutte revient sur l’origine du projet et les ambitions de cette nouvelle juridiction, qui est désormais chargée de juger les affaires en appel des tribunaux administratifs de Montpellier, Nîmes et Toulouse.
1/ Pourquoi une nouvelle cour à Toulouse ?
La création de la cour administrative d’appel de Toulouse répond à l’augmentation des contentieux devant le juge administratif dans le sud de la France. La nouvelle cour va permettre de décharger les cours administratives d’appel de Bordeaux et de Marseille qui sont, chaque année, de plus en plus saisies par les justiciables. En 2019 , la cour de Marseille avait ainsi enregistré 5 813 nouvelles affaires et celle de Bordeaux 5 010, se classant respectivement en première et troisième place en nombre de recours sur l’ensemble des 9 cours administratives d’appel. La nouvelle cour permet aussi un meilleur maillage territorial et rapproche la juridiction d’appel des justiciables.
Nous sommes en effet chargés de juger les recours déposés contre les jugements des tribunaux administratifs de Montpellier, Nîmes et Toulouse. Au total, nous prévoyons d’être saisis d’environ 3 200 nouvelles affaires chaque année.
Depuis le 1er mars 2022, la cour a reçu 1 378 affaires à traiter, principalement un transfert automatique de tous les recours enregistrés après le 1er mai 2021 devant les cours de Bordeaux et Marseille et relevant désormais du ressort de la cour de Toulouse.
2/ Comment travaille-t-elle au quotidien ?
L’entrée dans les locaux, encore partiellement en travaux, a eu lieu le 17 janvier. Les personnels arrivent progressivement : au 5 mars, 11 magistrats et 12 agents de greffe ont rejoint la cour. La particularité du fonctionnement actuel tient à un démarrage en cours d’année judiciaire et à une montée en puissance progressive de l’activité : la juridiction compte aujourd’hui deux chambres, deux autres seront créées au 1er septembre 2022.
3/ Quels sont les actualités et les projets à court et à long terme de la CAA ?
Notre actualité immédiate, c’est bien sûr la tenue des premières audiences. J’ai présidé le 1er mars la toute première audience et rencontré la presse locale pour mieux faire connaître nos missions et notre fonctionnement.
Il faut bien sûr assurer l’ouverture de la nouvelle cour vers la cité. Cela passe d’abord par la connaissance du ressort qui correspond pour l’essentiel à la région Occitanie et la rencontre des autorités administratives, judiciaires ainsi que des barreaux. Ces premières rencontres sont aussi l’occasion de rappeler nos priorités et nos engagements : l’accessibilité du juge pour tous ou l’importance de la médiation par exemple.
La cour entend aussi mieux faire connaître le droit public et la justice administrative notamment par des échanges fructueux avec les universités du ressort. Nous allons mettre en place une lettre de jurisprudence à laquelle seront associés universitaires et avocats, et nous organiserons également des rencontres annuelles de droit public en collaboration avec les universités.

La justice administrative à l’international
Entretien avec Pavol Nad, président de la Cour administrative suprême de la République slovaque, à l’occasion de la création de la cour en 2021.
1/ Pour quelles raisons et dans quel contexte a été créé la nouvelle Cour administrative suprême ?
La Cour administrative suprême de République slovaque a été créée en 2021 dans le cadre d’une large réforme constitutionnelle dans le domaine de la justice.
La création de la Cour administrative suprême et la séparation de l’ordre administratif de l’ordre judiciaire a été longtemps discutée par les experts des institutions slovaques. L’une des raisons tient aux racines historiques de l’ordre administratif en Slovaquie. À partir de 1918, la Cour administrative suprême tchécoslovaque à Prague a fonctionné dans la République tchécoslovaque. Elle a fait autorité et a produit une jurisprudence importante toujours en vigueur dans certains domaines. Après la Seconde Guerre mondiale, le système de justice administrative issu de l’entre-deux-guerres s’est effondré et a été aboli en 1952 par le régime communiste.
D’autres raisons ont conduit à cette création, comme la stabilité de la jurisprudence, l'accélération et la simplification des procédures en lien avec la spécialisation des juges et l’exercice du pouvoir disciplinaire à l'encontre des juges, des procureurs et autres professions juridiques.
Aujourd’hui, la justice slovaque est composée de la Cour administrative suprême, plus haute juridiction de l’ordre administratif, et de la Cour suprême, compétente dans les domaines de la justice civile, commerciale et pénale ; elles ont un statut équivalent.
2/ Avez-vous été inspiré par d’autres institutions pour sa création ?
Oui, nous l’avons été notamment par la Cour administrative suprême de la République tchèque. Nombre de questions et de problèmes ont été soulevés à la création de cette cour (le délai de 10 ans entre la création de la Cour dans la constitution et sa mise en place effective, la réticence des juges de Prague à venir travailler à Brno, siège de la Cour…). Malgré cela, la Cour administrative suprême a été créée en République tchèque et ces décisions suscitent aujourd’hui l’intérêt au-delà de ses frontières.
La création de la Cour administrative suprême nous a été inspirée également par les modèles des Cours des pays de l'Union européenne. Pendant les premiers mois de son fonctionnement, nous sommes d’ailleurs devenus membre des plus importantes associations internationales, telles que l’ACA-Europe, l’Association internationale des hautes juridictions administratives (AIHJA/IASAJ), et le Réseau européen de formation judiciaire (REFJ/EJTN) et nous avons établi une coopération bilatérale avec des institutions partenaires.
3/ Quels sont les projets et priorités de la Cour ?
Peu de temps après sa création, la Cour administrative suprême était située dans les locaux provisoires de la Cour suprême de la République slovaque. Notre priorité a été de trouver puis d'installer, au cours du mois de janvier, le nouveau siège. Nous finalisons actuellement l'aménagement des derniers locaux – salles d'audience et salles de réunion.
Notre premier objectif a aussi été de transférer un certain nombre de dossiers vers la Cour administrative suprême. Grâce à plusieurs juges, membres de la Cour suprême de la République slovaque, nous avons réussi ces transferts sans difficulté.
Enfin, nous organiserons prochainement des concours de recrutement pour des postes de juges et de personnels administratifs.

Agenda
Vendredi 22 avril 2022
Le vieillissement, un défi social; Entretiens du Conseil d’État en droit social
Mercredi 8 juin 2022
Les réseaux sociaux, enjeux de régulation. 4e conférence du cycle annuel « Les réseaux sociaux »
Au Conseil d’État
Horaires à définir
[Revoir] Mercredi 23 mars 2022
Les réseaux sociaux, vecteurs de transformation de l’action publique
[Revoir] Lundi 7 mars 2022
Enquête dans les archives du Conseil d’État
La République et les groupements privés d’intérêt général (1870-1914)
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