Forces de l’ordre : le Conseil d’État enjoint au Gouvernement de garantir le port effectif et la lisibilité du numéro d’identification individuel

Décision de justice
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Saisi par plusieurs associations, le Conseil d’État enjoint aujourd’hui au ministre de l’intérieur et des outre-mer de prendre, dans un délai de 12 mois, toutes les mesures nécessaires pour garantir que le numéro d’identification individuel soit effectivement porté par les policiers et gendarmes. Le Conseil d’État enjoint également que ce numéro soit agrandi afin qu’il soit suffisamment lisible, en particulier lorsque les forces de l’ordre interviennent lors de rassemblements ou d’attroupements.

Afin de favoriser des relations de confiance entre les forces de sécurité intérieure et la population et d’assurer, dans l’intérêt de tous, l’identification des agents, la réglementation en vigueur exige que les policiers et gendarmes portent, sauf cas particuliers justifiés par leurs missions, un numéro d’identification individuel visible sur leur tenue. Estimant que cette obligation est mal respectée dans la pratique, la Ligue des droits de l’homme, l’association Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, le Syndicat de la magistrature et le Syndicat des avocats de France ont saisi le Conseil d’État, après que le ministre de l’intérieur et des outre-mer a implicitement refusé de faire droit à leurs demandes de rendre plus lisible le numéro d’identification et plus effectif son port.

Le Conseil d’État statue aujourd’hui sur ce recours, dans sa formation de jugement la plus solennelle, l’Assemblée du contentieux, regroupant 17 juges.

Prendre toutes les mesures nécessaires pour s’assurer du port effectif du numéro d’identification individuel

Le Conseil d’État juge d’abord qu’il incombe au ministre de l’intérieur et des outre-mer de prendre, dans un délai de 12 mois, toutes les mesures nécessaires pour faire respecter par les policiers et gendarmes l’obligation de port apparent du numéro d’identification individuel, y compris lorsque l’emplacement habituel du numéro d’identification est recouvert par des équipements de protection individuelle (tels que, par exemple, des gilets pare-balles).

En effet, bien que le ministre procède régulièrement à des rappels généraux à la règle, les témoignages, photographies et vidéos fournis par les associations requérantes mais aussi plusieurs rapports et avis du Défenseur des droits et de la Commission nationale consultative des droits de l’homme ainsi que des observations formulées par les corps d’inspection de la police et de la gendarmerie nationale dressent le même constat qu’aucun autre élément ne permet de contredire  : l’absence de port apparent du numéro d’immatriculation par les agents de police et de gendarmerie est répandue et ne se limite pas à des défaillances ponctuelles liées à des comportements individuels. Peuvent être en cause aussi bien l’absence de port de la bande détachable sur laquelle figure le numéro, que le fait qu’il soit recouvert par des équipements de protection. Le ministre devra prendre toutes mesures utiles pour y remédier.

Revoir ses caractéristiques techniques pour garantir sa lisibilité dans l’ensemble des contextes opérationnels

Le Conseil d’État enjoint également au ministre de l’intérieur et des outre-mer de prendre, également dans un délai de douze mois, toutes mesures de nature à garantir que ce numéro soit de taille suffisante pour être lisible.

Le Conseil d’État juge en effet que les dimensions actuelles de ce numéro d’identification sont inadaptées, notamment lorsque les forces de l’ordre interviennent lors de rassemblements ou d’attroupements. Composé de sept chiffres de moins d’1 cm de haut, il est fixé sur une bande détachable – apposée sur l’épaule ou sur la poitrine des agents – de seulement 5 cm de long sur 1,2 cm de large s’agissant des policiers, et 4,5 cm de long sur 1,2 cm de large s’agissant des gendarmes, ce qui ne suffit pas à assurer sa lisibilité dans l’ensemble des contextes opérationnels où son port est prescrit.

À l’occasion de cette décision, le Conseil d’État précise quel est l’office du juge administratif lorsqu’il est saisi d’un refus de l’administration de faire cesser la méconnaissance d’une obligation légale. Le juge administratif peut, si cette méconnaissance est avérée, enjoindre à l’administration de prendre toutes mesures de nature à y remédier. Mais il ne lui appartient pas de se substituer aux pouvoirs publics pour déterminer une politique publique ou de leur enjoindre de le faire.

 

 

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