Séance publique du 5 avril 2019 à 14h

Rôle
Passer la navigation de l'article pour arriver après Passer la navigation de l'article pour arriver avant
Passer le partage de l'article pour arriver après
Passer le partage de l'article pour arriver avant

N° 399952         Rapporteur : M. Daumas                 Rapporteur public : Mme Cortot-Boucher

Litiges :

La SA Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2004 et en 2005, en sa qualité de société-mère du groupe fiscal intégré comprenant la Société Générale Asset Management (SGAM) Banque.

Par un jugement n° 0905895 du 3 février 2011, le tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 11VE02326 du 17 mars 2016, la cour administrative d’appel de Versailles, faisant droit à l’appel formé par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, a annulé ce jugement et remis à la charge de la société les impositions supplémentaires dont la décharge avait été prononcée par le tribunal.

Par un pourvoi, la Société Générale demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel du ministre ;

3°) à titre subsidiaire, de renvoyer une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne.

Question justifiant l’examen de l’affaire par la formation de Plénière fiscale :

Par une décision de Plénière du 7 décembre 2015, Ministre c. Crédit industriel et commercial (n° 357189, RJF 2016, n° 123), le Conseil d’Etat a jugé, sur le fondement des dispositions du 1 de l’article 220 du code général des impôts (CGI), que lorsqu’une convention internationale tendant à l’élimination des doubles impositions prévoit que des dividendes de source étrangère ouvrent droit à un crédit d’impôt dont le montant ne peut excéder « le montant de l’impôt français correspondant à ces revenus », le « butoir » ainsi défini doit être déterminé en appliquant à ces dividendes l’ensemble des dispositions du CGI. En particulier, lorsque les dividendes sont perçus par une société soumise à l’impôt sur les sociétés, il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 39 du CGI et de déduire, pour le calcul du « butoir », « l’ensemble des charges justifiées directement liées à l’acquisition, à la conservation ou à la cession des titres ayant donné lieu à la perception des dividendes, et n’ayant pas pour contrepartie un accroissement de l’actif, sauf exclusion par des dispositions spécifiques ».

1°)       Lorsque, dans le cadre d’opérations de prêts de titres et de structuration de fonds, une banque établie en France procède, en exécution de stipulations contractuelles, au reversement à son cocontractant des dividendes de source étrangère qu’elle a perçus, les reversements en cause constituent-ils des charges qui doivent être déduites pour le calcul du « butoir » ?

2°)       Dans l’affirmative, les dispositions du 1 de l’article 220 du CGI, combinées avec celles des conventions internationales auxquelles elles renvoient, méconnaissent-elles le principe de libre circulation des capitaux garanti par l’article 63 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ?

 

N°412503        Rapporteur : M. Uher                      Rapporteur public : Mme Ciavaldini

Litiges :

La société civile Fra SCI a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1401026 du 11 février 2016, le tribunal administratif de Paris a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 16PA01892 du 17 mai 2017, la cour administrative d'appel de Paris a, sur le recours du ministre des finances et des comptes publics, remis à la charge de la société Fra SCI les impositions dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, dans la limite des droits et intérêts de retard correspondant à une base imposable à l’impôt sur les sociétés fixée respectivement au titre des exercices clos en 2009 et 2010 à 6 027 122 euros et 1 121 997 euros, rejeté le surplus du recours et réformé le jugement en conséquence

Par un pourvoi, la société Fra SCI demande au Conseil d'Etat :

1°) d’annuler les articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter le recours du ministre des finances et des comptes publics.

Questions justifiant l’examen de l’affaire par la formation de Plénière fiscale :

Par la décision du 16 février 2000, SA Etablissements Quemener, n° 133296 (au Recueil p. 52), le Conseil d’Etat a, pour le calcul d’une plus-value de cession de parts de sociétés de personnes, jugé qu’il y avait lieu de calculer le prix de revient de ces parts en tenant compte de l’imputation sur les résultats de l’associé des bénéfices et des pertes de la société, de leur répartition et de leur comblement. Cette règle a été justifiée par l’objectif d’assurer la neutralité de l’application de la loi fiscale, compte tenu du régime spécifique des sociétés de personnes prévu à l’article 8 du code général des impôts.

Par la décision du 27 juillet 2015, SA Matériels électriques ascenseurs, n° 362025 (inédite), le Conseil d’Etat a jugé que, dans le cas où une société vient à retirer de l’actif de son bilan, à la suite d’une cession ou de la dissolution sans liquidation avec confusion de patrimoine prévue à l’article 1844-5 du code civil, les parts qu’elle détenait jusqu’alors dans une société relevant du régime prévu à l’article 8 du code général des impôts, le résultat de cette opération doit être calculé en appliquant la règle posée par la décision Quemener.

La décision du 6 juillet 2016, Ministre des finances c/ SARL Lupa Immobilière France, n° 377904 (aux Tables pp. 726 et 735) a précisé que cette règle ne peut néanmoins trouver à s’appliquer que pour éviter une double imposition de la société qui réalise l’opération de dissolution. Cette décision a donc pour effet de limiter l’application du « correctif Quemener » au cas d’une double imposition qui résulterait, lors de la taxation de la plus-value de cession des parts détenues par un associé, de la taxation de bénéfices de la société qui ont déjà été taxés entre les mains de cet associé en application du régime fiscal des sociétés de personnes. Notamment, elle exclut l’application du correctif lorsqu’il aurait pour effet, par la correction du prix d’acquisition des titres qu’il prévoit, de corriger lors de la taxation de la plus-value de cession des parts détenues par un associé, la taxation entre ses mains au titre de l’impôt sur le revenu, par application du régime fiscal des sociétés de personnes, de bénéfices de la société qui correspondent à un enrichissement de celle-ci antérieur à l’acquisition des parts par cet associé et dont il a déjà été tenu compte pour fixer leur prix d’acquisition.

Une telle exclusion est-elle justifiée, au regard de l’objectif de la décision Quemener d’assurer la neutralité de l’application de la loi fiscale ?