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Ariane Web: Conseil d'État 418844, lecture du 18 juillet 2018

Analyse n° 418844
18 juillet 2018
Conseil d'État

N° 418844
Publié au recueil Lebon

Lecture du mercredi 18 juillet 2018



36-09-01 : Fonctionnaires et agents publics- Discipline- Suspension-

Suspension d'un professeur des universités (art. L. 951-4 du code de l'éducation) - 1) Nature de la mesure - Sanction disciplinaire déguisée - Absence (1) - Mesure prise en considération de la personne - Absence - Conséquence - Obligation de mener une procédure contradictoire - Absence - 2) Légalité de la mesure - Condition - Faits présentant un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité (2) - Eléments nouveaux portés à la connaissance de l'administration postérieurement à sa décision - Eléments susceptibles d'être invoqués devant le juge de l'excès de pouvoir - Absence - Eléments obligeant l'administration à abroger sa décision - Existence, dès lors qu'ils font apparaître que la condition tenant à la vraisemblance des faits n'est plus satisfaite (3) - 3) Espèce.




1) L'arrêté suspendant un professeur des universités de ses fonctions, pris sur le fondement de l'article L. 951-4 du code de l'éducation, dans le but exclusif de préserver, alors même qu'une procédure disciplinaire vient d'être engagée à son encontre pour des faits de "harcèlements sexuel et moral", le bon fonctionnement du service public universitaire, ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée. Ayant ainsi pour objet de restaurer et préserver, dans l'intérêt de l'ensemble des étudiants et du corps enseignant, la sérénité nécessaire au déroulement des cours et aux activités de recherche universitaire, elle ne revêt pas davantage le caractère d'une mesure prise en considération de la personne au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA). Il s'ensuit que si, pour apprécier le bien fondé de la mesure de suspension, la présidente de l'université aurait pu utilement entendre l'intéressé avant l'édiction de cette mesure, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté prononçant sa suspension, faute d'avoir été précédé d'une procédure contradictoire, est entaché d'un vice de procédure. 2) Eu égard à la nature de l'acte de suspension prévu par les dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation et à la nécessité d'apprécier, à la date à laquelle cet acte a été pris, la condition de légalité tenant au caractère vraisemblable de certains faits, il appartient au juge de l'excès de pouvoir de statuer au vu des informations dont disposait effectivement l'autorité administrative au jour de sa décision. Les éléments nouveaux qui seraient, le cas échéant, portés à la connaissance de l'administration postérieurement à sa décision, ne peuvent ainsi, alors même qu'ils seraient relatifs à la situation de fait prévalant à la date de l'acte litigieux, être utilement invoqués au soutien d'un recours en excès de pouvoir contre cet acte. L'administration est en revanche tenue d'abroger la décision en cause si de tels éléments font apparaître que la condition tenant à la vraisemblance des faits à l'origine de la mesure n'est plus satisfaite.





36-09-03 : Fonctionnaires et agents publics- Discipline- Motifs-

Suspension d'un professeur des universités (art. L. 951-4 du code de l'éducation) - 1) Nature de la mesure - Sanction disciplinaire déguisée - Absence (1) - Mesure prise en considération de la personne - Absence - Conséquence - Obligation de mener une procédure contradictoire - Absence - 2) Légalité de la mesure - Condition - Faits présentant un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité (2) - Eléments nouveaux portés à la connaissance de l'administration postérieurement à sa décision - Eléments susceptibles d'être invoqués devant le juge de l'excès de pouvoir - Absence - Eléments obligeant l'administration à abroger sa décision - Existence, dès lors qu'ils font apparaître que la condition tenant à la vraisemblance des faits n'est plus satisfaite (3).




1) L'arrêté suspendant un professeur des universités de ses fonctions, pris sur le fondement de l'article L. 951-4 du code de l'éducation, dans le but exclusif de préserver, alors même qu'une procédure disciplinaire vient d'être engagée à son encontre pour des faits de "harcèlements sexuel et moral", le bon fonctionnement du service public universitaire, ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée. Ayant ainsi pour objet de restaurer et préserver, dans l'intérêt de l'ensemble des étudiants et du corps enseignant, la sérénité nécessaire au déroulement des cours et aux activités de recherche universitaire, elle ne revêt pas davantage le caractère d'une mesure prise en considération de la personne au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA). Il s'ensuit que si, pour apprécier le bien fondé de la mesure de suspension, la présidente de l'université aurait pu utilement entendre l'intéressé avant l'édiction de cette mesure, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté prononçant sa suspension, faute d'avoir été précédé d'une procédure contradictoire, est entaché d'un vice de procédure. 2) Eu égard à la nature de l'acte de suspension prévu par les dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation et à la nécessité d'apprécier, à la date à laquelle cet acte a été pris, la condition de légalité tenant au caractère vraisemblable de certains faits, il appartient au juge de l'excès de pouvoir de statuer au vu des informations dont disposait effectivement l'autorité administrative au jour de sa décision. Les éléments nouveaux qui seraient, le cas échéant, portés à la connaissance de l'administration postérieurement à sa décision, ne peuvent ainsi, alors même qu'ils seraient relatifs à la situation de fait prévalant à la date de l'acte litigieux, être utilement invoqués au soutien d'un recours en excès de pouvoir contre cet acte. L'administration est en revanche tenue d'abroger la décision en cause si de tels éléments font apparaître que la condition tenant à la vraisemblance des faits à l'origine de la mesure n'est plus satisfaite.


(1) Cf. CE, 26 octobre 2005, , n° 279189, p. 443 ; CE, 25 mars 2002, n°s 224221 233719, T. pp. 587 ; (2) Cf. CE, 11 juin 1997, , n° 142167, T. p. 905 ; CE, 10 décembre 2014, n°s 363202 363373, T. pp. 694-719. (3) Rappr. CE, 31 août 2009, Commune de Cregols, n° 296458, p. 343 ; CE, Ass., 6 juillet 2016, l et autres, n° s 398234 399135, p. 320.

Voir aussi