Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 440151, lecture du 7 mai 2020

Analyse n° 440151
7 mai 2020
Conseil d'État

N° 440151
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du jeudi 7 mai 2020



37-05-02-01 : Juridictions administratives et judiciaires- Exécution des jugements- Exécution des peines- Service public pénitentiaire-

Mesures de protection des détenus d'un centre pénitentiaire pendant l'état d'urgence sanitaire (art. L. 3131-12 du code de la santé publique) (1) - Insuffisances alléguées constitutives d'une atteinte manifestement grave et illégale au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants (art. L. 521-2 du CJA) - 1) Absence de fourniture d'un masque de protection aux détenus lors des contacts avec les personnes extérieures - Existence - 2) Absence de distribution de masques à l'ensemble des détenus - Absence - 3) Absence de dépistage systématique de l'ensemble des détenus ayant été en contact direct avec une personne présentant les symptômes du covid-19 - Absence.




Juge des référés du tribunal administratif de La Martinique ayant enjoint à la garde des sceaux, ministre de la justice et au directeur du centre pénitentiaire, d'une part, de distribuer des masques chirurgicaux et des gants aux détenus, afin qu'ils en disposent, prioritairement, lors des situations les amenant à être en contact avec plusieurs détenus issus d'autres cellules et, d'autre part, de se doter de tests de dépistage, en nombre suffisant, pour permettre prioritairement, le dépistage des personnes ayant été en contact direct avec une personne présentant des symptômes de covid-19. 1) Compte tenu de l'obligation pour l'ensemble des personnels pénitentiaires de porter le masque qui leur aura été remis par l'administration pénitentiaire et pour les intervenants extérieurs de se présenter munis d'un masque de protection non sanitaire, il apparaît que les personnes détenues seront les seules à ne pas avoir de masque de protection, à l'occasion des contacts avec des intervenants extérieurs. Compte tenu de la nécessité d'assurer la plus grande efficacité possible au dispositif mis en place pour protéger les personnes détenues du risque de contamination à l'occasion de contacts avec des intervenants extérieurs, il apparaît, en l'état de l'instruction, que l'absence de fourniture d'un masque de protection non sanitaire aux personnes détenues afin qu'elles puissent le porter le temps des échanges avec le ou les intervenants extérieurs révèle, de manière caractérisée, une carence de nature à justifier, eu égard au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, qu'il soit enjoint à la ministre de la justice et au chef d'établissement du centre pénitentiaire de Ducos de fournir, à compter du 11 mai 2020, un masque de protection non sanitaire aux personnes détenues appelées à se rendre à un "parloir avocat", une commission de discipline ou un entretien avec un conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation. Ce masque devra être distribué par l'administration pénitentiaire à l'occasion d'un tel contact et lui être remis à son issue. 2) Compte tenu des mesures effectivement prises par le chef d'établissement du centre pénitentiaire de Ducos pour limiter les contacts avec l'extérieur et réduire les mouvements à l'intérieur de son établissement, des mesures effectivement prises pour assurer l'entretien et le nettoyage des locaux ainsi que le respect des règles de sécurité sanitaire, des nouvelles consignes relatives au port du masque par les personnels pénitentiaires, les intervenants extérieurs et les personnes détenues auxiliaires, de l'injonction prononcée au point précédent, du protocole relatif au signalement et à la détection des cas symptomatiques ainsi que des modalités de prise en charge des cas confirmés ou symptomatiques, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que l'absence de distribution de masques de protection à l'ensemble des personnes détenues au centre pénitentiaire de Ducos révèlerait une carence portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants. 3) Il résulte de l'instruction que l'administration est en mesure de mettre effectivement en oeuvre les consignes arrêtées par la note du 9 avril 2020 relative au déploiement des nouvelles capacités de tests de dépistage virologiques, qui identifie des populations prioritaires parmi lesquelles figurent désormais les personnes détenues et les personnels pénitentiaires. L'application de cette instruction sera combinée avec les modalités de prise en charge médicale arrêtées au sein du centre prénitentiaire de Ducos. Dans ces conditions, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, eu égard aux critères, constamment ajustés, retenus en l'état des disponibilités des tests, pour effectuer les dépistages, et qui sont appelés à évoluer après le 11 mai 2020, que l'absence de dépistage systématique de l'ensemble des personnes détenues ayant été en contact direct avec une personne présentant les symptômes du covid-19 révèlerait une carence portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées. Réformation de l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance.





54-035-03-03-01-02 : Procédure- Procédures instituées par la loi du juin - Référé tendant au prononcé de mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale (art- L- du code de justice administrative)- Conditions d'octroi de la mesure demandée- Atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale- Atteinte grave et manifestement illégale-

Mesures de protection des détenus d'un centre pénitentiaire pendant l'état d'urgence sanitaire (art. L. 3131-12 du code de la santé publique) (1) - Insuffisances alléguées constitutives d'une atteinte manifestement grave et illégale au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants (art. L. 521-2 du CJA) - 1) Absence de fourniture d'un masque de protection aux détenus lors des contacts avec les personnes extérieures - Existence - 2) Absence de distribution de masques à l'ensemble des détenus - Absence - 3) Absence de dépistage systématique de l'ensemble des détenus ayant été en contact direct avec une personne présentant les symptômes du covid-19 - Absence.




Juge des référés du tribunal administratif de La Martinique ayant enjoint à la garde des sceaux, ministre de la justice et au directeur du centre pénitentiaire, d'une part, de distribuer des masques chirurgicaux et des gants aux détenus, afin qu'ils en disposent, prioritairement, lors des situations les amenant à être en contact avec plusieurs détenus issus d'autres cellules et, d'autre part, de se doter de tests de dépistage, en nombre suffisant, pour permettre prioritairement, le dépistage des personnes ayant été en contact direct avec une personne présentant des symptômes de covid-19. 1) Compte tenu de l'obligation pour l'ensemble des personnels pénitentiaires de porter le masque qui leur aura été remis par l'administration pénitentiaire et pour les intervenants extérieurs de se présenter munis d'un masque de protection non sanitaire, il apparaît que les personnes détenues seront les seules à ne pas avoir de masque de protection, à l'occasion des contacts avec des intervenants extérieurs. Compte tenu de la nécessité d'assurer la plus grande efficacité possible au dispositif mis en place pour protéger les personnes détenues du risque de contamination à l'occasion de contacts avec des intervenants extérieurs, il apparaît, en l'état de l'instruction, que l'absence de fourniture d'un masque de protection non sanitaire aux personnes détenues afin qu'elles puissent le porter le temps des échanges avec le ou les intervenants extérieurs révèle, de manière caractérisée, une carence de nature à justifier, eu égard au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, qu'il soit enjoint à la ministre de la justice et au chef d'établissement du centre pénitentiaire de Ducos de fournir, à compter du 11 mai 2020, un masque de protection non sanitaire aux personnes détenues appelées à se rendre à un "parloir avocat", une commission de discipline ou un entretien avec un conseiller pénitentiaire d'insertion et de probation. Ce masque devra être distribué par l'administration pénitentiaire à l'occasion d'un tel contact et lui être remis à son issue. 2) Compte tenu des mesures effectivement prises par le chef d'établissement du centre pénitentiaire de Ducos pour limiter les contacts avec l'extérieur et réduire les mouvements à l'intérieur de son établissement, des mesures effectivement prises pour assurer l'entretien et le nettoyage des locaux ainsi que le respect des règles de sécurité sanitaire, des nouvelles consignes relatives au port du masque par les personnels pénitentiaires, les intervenants extérieurs et les personnes détenues auxiliaires, de l'injonction prononcée au point précédent, du protocole relatif au signalement et à la détection des cas symptomatiques ainsi que des modalités de prise en charge des cas confirmés ou symptomatiques, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, que l'absence de distribution de masques de protection à l'ensemble des personnes détenues au centre pénitentiaire de Ducos révèlerait une carence portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie et au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants. 3) Il résulte de l'instruction que l'administration est en mesure de mettre effectivement en oeuvre les consignes arrêtées par la note du 9 avril 2020 relative au déploiement des nouvelles capacités de tests de dépistage virologiques, qui identifie des populations prioritaires parmi lesquelles figurent désormais les personnes détenues et les personnels pénitentiaires. L'application de cette instruction sera combinée avec les modalités de prise en charge médicale arrêtées au sein du centre pénitentiaire de Ducos. Dans ces conditions, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction et à la date de la présente ordonnance, eu égard aux critères, constamment ajustés, retenus en l'état des disponibilités des tests, pour effectuer les dépistages, et qui sont appelés à évoluer après le 11 mai 2020, que l'absence de dépistage systématique de l'ensemble des personnes détenues ayant été en contact direct avec une personne présentant les symptômes du covid-19 révèlerait une carence portant, de manière caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées. Réformation de l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a de contraire à la présente ordonnance.


(1) Rappr., s'agissant des mesures de protection du personnel pénitentiaire, CE, juge des référés, 8 avril 2020, Syndicat national pénitentiaire Force Ouvrière - personnels de surveillance, n° 439821, à mentionner aux Tables ; s'agissant des détenus, CE, juge des référés, 8 avril 2020, Section française de l'observatoire international des prisons et autres, n° 439827, inédite au Recueil.

Voir aussi