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Ariane Web: Conseil d'État 371431, lecture du 20 novembre 2013, ECLI:FR:CESJS:2013:371431.20131120

Décision n° 371431
20 novembre 2013
Conseil d'État

N° 371431
ECLI:FR:CESJS:2013:371431.20131120
Inédit au recueil Lebon
7ème sous-section jugeant seule
M. Vincent Montrieux, rapporteur
M. Gilles Pellissier, rapporteur public
SCP MONOD, COLIN, avocats


Lecture du mercredi 20 novembre 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la communauté urbaine de Dunkerque, dont le siège est Pertuis de la Marine BP 85530 à Dunkerque cedex 1 (59386) ; la communauté urbaine demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304341 du 2 août 2013 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, sur la demande de M. B...A..., a suspendu l'exécution de l'arrêté du 3 juin 2013 du président de la communauté urbaine de Dunkerque radiant M. A... des cadres pour abandon de poste ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M. A...;

3°) de mettre à la charge de M. A...le versement des sommes de 4 000 euros et 35 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Montrieux, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, avocat de la communauté urbaine de Dunkerque ;


1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Lille que M.A..., agent titulaire de la communauté urbaine de Dunkerque a été placé en congé maladie ordinaire du 26 septembre 2012 au 15 mai 2013 ; que le 16 mai 2013, il a présenté une demande de congés pour la période du 17 mai au 12 juillet, qui lui a été refusée par décision du 17 mai ; que le 23 mai, la communauté urbaine lui a adressé une mise en demeure de reprendre son poste dans un délai de quarante-huit heures sous peine de radiation des cadres pour abandon de poste ; que le 3 juin, la communauté urbaine a pris un arrêté prononçant sa radiation des cadres ; que la communauté urbaine de Dunkerque se pourvoit en cassation contre l'ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille a suspendu l'exécution de la décision de radiation des cadres de M.A... ;

3. Considérant que, pour ordonner la suspension de la décision attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a énoncé qu'était de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de cette décision le moyen tiré de ce que le président de la communauté urbaine avait commis une erreur de droit en qualifiant l'absence de M. A...d'abandon de poste et non d'absence irrégulière constitutive d'une faute disciplinaire ; que, pour en juger ainsi, le juge des référés a relevé que M. A...pouvait se croire en congé et que la communauté urbaine ne l'ignorait pas, dès lors notamment que la mise en demeure de reprendre son poste lui avait été adressée alors qu'il était en Algérie et que l'accusé postal de ce courrier en recommandé avait été retiré par un mandataire n'ayant pas mentionné ses nom et prénom ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort des pièces du dossier qui lui était soumis que la lettre mettant en demeure M. A... de rejoindre son poste a été régulièrement retirée par un mandataire auquel l'intéressé avait donné procuration et que M. A...ne contestait pas avoir eu connaissance de ce courrier, le juge des référés a dénaturé les faits et les pièces du dossier ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

5. Considérant que si M. A...soutient, en premier lieu, qu'il n'est pas établi que le signataire de la décision de radiation avait compétence pour radier des cadres un agent pour abandon de poste, en deuxième lieu, qu'il n'est pas établi que le signataire de la décision se soit vu déléguer le pouvoir de nomination, alors que l'autorité compétente pour adresser la mise en demeure est celle qui est investie du pouvoir de nomination, en troisième lieu, qu'il n'a pas entendu rompre tout lien avec le service et n'était pas en situation d'abandon de poste, mais souhaitait solder ses droits à congés au titre de l'année 2012 et ne pouvait reprendre ses fonctions dans les délais impartis par la communauté urbaine dès lors qu'il se trouvait à l'étranger, aucun de ces moyens n'est, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision dont il demande la suspension ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la condition d'urgence, M. A...n'est pas fondé à demander la suspension de la décision le radiant des cadres ; que sa demande doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre la contribution pour l'aide juridique à la charge de M.A... ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, de mettre à sa charge le versement des sommes demandées par la communauté urbaine de Dunkerque au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille du 2 août 2013 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Lille est rejetée ainsi que les conclusions de la communauté urbaine de Dunkerque présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La contribution pour l'aide juridique acquittée par la communauté urbaine de Dunkerque est mise à la charge de M.A....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la communauté urbaine de Dunkerque et à M. B... A....