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Ariane Web: Conseil d'État 366637, lecture du 29 décembre 2014, ECLI:FR:CESSR:2014:366637.20141229

Décision n° 366637
29 décembre 2014
Conseil d'État

N° 366637
ECLI:FR:CESSR:2014:366637.20141229
Mentionné aux tables du recueil Lebon
3ème / 8ème SSR
Mme Agnès Martinel, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public


Lecture du lundi 29 décembre 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu l'ordonnance n° 1302585/5 du 28 février 2013, enregistrée le 6 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'État, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par le syndicat Solidaires-Douanes ;

Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée par ce syndicat, dont le siège est 93bis, rue de Montreuil Boîte 56 à Paris (75011) ; il demande l'annulation pour excès de pouvoir de la note du 9 octobre 2012 du directeur général des douanes et droits indirects relative au fonctionnement des comités techniques (CT) des directions et des services à compétence nationale (SCN), en tant que cette note, d'une part, énonce, dans son paragraphe I qu'un membre titulaire d'un comité technique ne pourra en aucun cas être remplacé par un agent non élu de la liste, et d'autre part, prévoit dans son annexe 5 que pour l'application des dispositions de l'article 57 du décret du 28 mai 1982 relatives à l'obligation de consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, doit être regardé comme un projet " important " d'aménagement des conditions de travail ou d'introduction des nouvelles technologies, et nécessitant par suite la consultation de cette instance, un projet qui concerne un nombre significatif d'agents et qui conduit à un changement déterminant dans leurs conditions de travail, ces deux critères étant cumulatifs ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

Vu le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Martinel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;



1. Considérant que par une note du 9 octobre 2012, le directeur général des douanes et des droits indirects du ministère de l'économie et des finances a précisé les conditions de fonctionnement des comités techniques des directions et des services à compétence nationale relevant de ce département ministériel, ainsi que les modalités d'articulation des compétences de ces comités techniques avec les comités d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail ; que le syndicat Solidaires-Douanes demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette note en tant, d'une part, qu'elle énonce dans son paragraphe I que le membre titulaire d'un comité technique ne pourra en aucun cas être remplacé par un agent non élu de la liste et, d'autre part, que pour l'application des dispositions de l'article 57 du décret du 28 mai 1982 relatives à l'obligation de consultation du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail, elle définit, à son annexe 5, le " projet important " d'aménagement des conditions de travail ou d'introduction de nouvelles technologies, nécessitant par suite la consultation de cette instance, comme un projet qui concerne un nombre significatif d'agents et conduit à un changement déterminant dans leurs conditions de travail, ces deux critères étant cumulatifs ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction issue de l'article 9 de la loi du 5 juillet 2010 : " I. - Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques. (...) / III.- Les comités techniques comprennent des représentants de l'administration et des représentants du personnel. Seuls les représentants du personnel sont appelés à prendre part aux votes. / Les représentants du personnel siégeant aux comités techniques sont élus au scrutin de liste avec représentation proportionnelle dans les conditions définies à l'article 9 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée. (...)" ; qu'aux termes de l'article 10 du décret du 15 février 2011 : " Les comités techniques comprennent, outre la ou les autorités auprès desquelles ils sont placés, le responsable ayant autorité en matière de gestion des ressources humaines, ainsi que des représentants du personnel. / Le nombre des représentants du personnel titulaires ne saurait être supérieur à 15 en ce qui concerne le comité technique ministériel et à 10 en ce qui concerne les autres comités. Sans préjudice des dispositions prévues par le cinquième alinéa de l'article 28, ces représentants titulaires ont un nombre égal de suppléants." ; que les articles 13 à 15 du même décret précisent les modalités de l'élection des représentants du personnel des comités techniques ; que les dispositions de l'article 16 du même décret relatives aux modalités de remplacement des représentants du personnel, titulaires ou suppléants, qui permettent dans certaines conditions la nomination d'un remplaçant non élu désigné par une organisation syndicale, ont trait à la nomination, pour la durée du mandat restant à courir, des remplaçants des représentants du personnel, titulaires et suppléants, du comité technique dans l'impossibilité d'exercer leurs fonctions et dont le mandat a pris fin, et non au remplacement en cas d'absence d'un représentant du personnel convoqué à une séance d'un comité technique ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées qu'en cas d'absence, les représentants du personnel élus des comités techniques ne peuvent être remplacés par un agent non élu désigné par une organisation syndicale ; que la note du directeur général des douanes et des droits indirects, qui précise que le membre titulaire d'un comité technique ne pourra en aucun cas être remplacé par un agent non élu de la liste, se borne à rappeler cette règle ; que la circonstance que le règlement intérieur type des comités techniques dans les administrations et établissements publics de l'Etat prévoit, dans le troisième alinéa de son article 3 qui concerne les cas spécifiques des comités techniques dont les membres ne sont pas élus, qu'en cas d'absence du membre titulaire convoqué, le président convoque le membre suppléant élu ou désigné par l'organisation syndicale au titre de laquelle aurait dû siéger le membre titulaire empêché est sans incidence sur la légalité de la note attaquée ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la note attaquée serait entachée d'illégalité pour avoir énoncé que le membre titulaire d'un comité technique ne pourra en aucun cas être remplacé par un agent non élu de la liste ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 11 janvier 1984 : " I. - Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel ou commercial, il est institué un ou plusieurs comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. / II. - Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des agents dans leur travail, à l'amélioration des conditions de travail et de veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières.(...) " ; qu'aux termes de l'article 57 du décret du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, dans sa rédaction issue du décret du 28 juin 2011 : " Le comité est consulté : / 1° Sur les projets d'aménagement importants modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail ; / 2° Sur les projets importants d'introduction de nouvelles technologies et lors de l'introduction de ces nouvelles technologies, lorsqu'elles sont susceptibles d'avoir des conséquences sur la santé et la sécurité des agents. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le " projet important " s'entend de tout projet qui affecte de manière déterminante les conditions de santé, de sécurité ou de travail d'un nombre significatif d'agents, le critère du nombre de salariés ne déterminant toutefois pas, à lui seul, l'importance du projet ; que la note attaquée qui définit la notion de " projet important " comme un projet qui concerne un nombre significatif d'agents et qui conduit à un changement déterminant dans leurs conditions de travail, ces deux critères étant cumulatifs, a méconnu les dispositions précitées ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le syndicat Solidaires-Douanes n'est fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la note attaquée qu'en tant qu'elle définit, dans son annexe 5, la notion de projet important au sens des dispositions de l'article 57 du décret du 28 mai 1982 ;



D E C I D E :
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Article 1er : La note du 9 octobre 2012 du directeur général des douanes et des droits indirects est annulée en tant qu'elle définit, dans son annexe 5, la notion de projet important au sens de l'article 57 du décret n°82-453 du 28 mai 1982.
Article 2 : Le surplus des conclusions du syndicat Solidaires-Douanes est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au syndicat Solidaires-Douanes et au ministre des finances et des comptes publics.


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