Conseil d'État
N° 417011
ECLI:FR:CECHR:2018:417011.20181025
Inédit au recueil Lebon
5ème et 6ème chambres réunies
M. Alain Seban, rapporteur
M. Nicolas Polge, rapporteur public
Lecture du jeudi 25 octobre 2018
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 janvier et 2 août 2018, la Fédération nationale des orthophonistes, Mme C...A..., la Fédération nationale des infirmiers, Convergence infirmière, M. F...B..., le Syndicat national des audioprothésistes UNSAF, Mme C...G..., le Syndicat national autonome des orthoptistes, M. I...J..., la Fédération nationale des podologues, Mme D...E..., le Syndicat national des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs, M. K...H...et la Fédération française des praticiens de santé demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 2017-1520 du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 ;
- la loi n° 2018-132 du 26 février 2018 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- l'ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 ratifiée par la loi n° 2018-132 du 26 février 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
1. Considérant que l'article 216 de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi requises pour la transposition en droit français de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l'intermédiaire du système d'information du marché intérieur (" règlement IMI ") ; que l'ordonnance du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé a été prise sur le fondement de cette habilitation législative délivrée en application de l'article 38 de la Constitution ; que la Fédération nationale des orthophonistes et autres demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé, pris pour l'application des dispositions de cette ordonnance, qui ont été ratifiées et ont acquis valeur législative en vertu de l'article 2 de la loi du 26 février 2018 ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Sur le mécanisme d'accès partiel :
3. Considérant que les requérants soutiennent que les articles L. 4002-3-1 et L. 4002-4 à L. 4002-6 du code de la santé publique, issus de l'article 1er de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont contraires au droit constitutionnel à la protection de la santé, protégé par l'alinéa 11 du Préambule de la constitution du 27 octobre 1946 ; que ces articles ont pour objet de mettre en oeuvre, pour les professions de santé, le principe dit " de l'accès partiel ", dégagé en premier lieu par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne et repris par la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ; qu'ils permettent d'autoriser, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 4002-3, " un professionnel pleinement qualifié pour exercer, dans l'Etat d'origine membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, une activité professionnelle relevant, en France, d'une profession réglementée de santé " à exercer cette activité sur le territoire national lorsque " l'activité professionnelle pour laquelle l'intéressé sollicite un accès peut objectivement être séparée d'autres activités relevant de la profession en France " ;
4. Considérant que les dispositions critiquées s'appliquent, ainsi qu'il vient d'être rappelé, lorsque l'activité en cause peut être objectivement séparée d'autres activités relevant de la profession en France ; que, pour apprécier cette divisibilité, l'autorité compétente est invitée par les dispositions introduites par l'ordonnance au I de l'article L. 4002-3 du code de la santé publique à tenir compte " du fait que l'activité professionnelle peut ou ne peut pas être exercée de manière autonome dans l'Etat membre d'origine " ; que le II du même article, issu de l'ordonnance critiquée, prévoit que : " L'accès partiel peut en outre être refusé si ce refus est justifié par des raisons impérieuses d'intérêt général, s'il est propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et s'il ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif " ; que l'ordonnance introduit à l'article L. 4002-5 du code de la santé publique des garanties pour l'exercice en accès partiel d'une activité relevant d'une profession réglementée de santé, notamment l'obligation pour le professionnel concerné d'exercer " sous le titre professionnel de l'Etat d'origine rédigé dans la langue de cet Etat " et d'" informe(r) clairement les patients et les autres destinataires de ses services des actes qu'il est habilité à effectuer dans le champ de son activité professionnelle ", ces professionnels étant par ailleurs inscrits sur une liste distincte du tableau de l'ordre professionnel concerné ; que l'exercice d'une activité objectivement séparable des autres activités d'une profession de santé ne peut être accepté par l'autorité compétente que lorsque cette disjonction ne présente pas de risque pour les patients ; qu'il ne peut par ailleurs être sérieusement soutenu que, de manière générale, les activités des professionnels de santé telles que définies par la réglementation nationale formeraient nécessairement des ensembles indivisibles ; qu'eu égard à l'ensemble des garanties ainsi apportées, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise en oeuvre du principe de l'accès partiel pour les professions réglementées de santé serait en elle-même de nature à porter atteinte au droit constitutionnel à la protection de la santé ;
Sur les compétences linguistiques :
5. Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 modifie plusieurs articles du code de la santé publique relatifs aux diverses professions réglementées de santé afin de prévoir notamment, ainsi que l'exige la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013, que " le contrôle de la maîtrise de la langue doit être proportionné à l'activité à exercer et réalisé une fois la qualification professionnelle reconnue " ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en tout état de cause, que la maîtrise de la langue française qu'implique l'exercice en France d'une profession de santé devrait nécessairement, pour que la protection de la santé publique soit garantie, faire l'objet d'un contrôle préalable à l'autorisation d'exercer ; que, s'agissant plus particulièrement de la profession d'orthophoniste, les dispositions qui viennent d'être citées sont insérées à l'article L. 4341-8 du code de la santé publique après un premier alinéa rédigé comme suit : " L'orthophoniste, lors de la délivrance de l'autorisation d'exercice ou de la déclaration de prestation de services, doit posséder les connaissances linguistiques nécessaires à l'exercice de la profession " ; que les dispositions législatives critiquées n'ont ni pour objet ni pour effet de déroger à ce premier alinéa en permettant l'accès à la profession d'orthophoniste de personnes qui ne justifieraient pas des connaissances linguistiques ainsi requises ; qu'il ne peut, dans ces conditions, être sérieusement soutenu qu'elles porteraient atteinte au droit constitutionnel à la protection de la santé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de renvoyer cette question au Conseil constitutionnel, le moyen tiré de ce que les dispositions du code de la santé publique issues des articles 1er et 3 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
Sur les autres moyens de la requête :
7. Considérant, d'une part, que le pouvoir réglementaire ne serait, en tout état de cause, pas compétent pour exclure les professions réglementées de santé du mécanisme de l'accès partiel défini par la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ; que les requérants ne peuvent dès lors utilement reprocher au décret attaqué de ne pas avoir procédé à cette exclusion ;
8. Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que le " droit des partenaires sociaux à s'organiser ", évoqué au considérant 7 de la directive mentionnée ci-dessus, n'aurait pas été respecté n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;
9. Considérant, enfin, que pour les motifs indiqués au point 5 ci-dessus, les dispositions législatives relatives au contrôle de la maîtrise de la langue française par les professionnels de santé bénéficiant de la reconnaissance mutuelle ou de l'accès partiel ne sont pas contraires aux termes de la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Fédération nationale des orthophonistes et autres.
Article 2 : La requête de la Fédération nationale des orthophonistes et autres est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Fédération nationale des orthophonistes, première requérante dénommée, au Premier ministre, à la ministre des solidarités et de la santé et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.
N° 417011
ECLI:FR:CECHR:2018:417011.20181025
Inédit au recueil Lebon
5ème et 6ème chambres réunies
M. Alain Seban, rapporteur
M. Nicolas Polge, rapporteur public
Lecture du jeudi 25 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 2 janvier et 2 août 2018, la Fédération nationale des orthophonistes, Mme C...A..., la Fédération nationale des infirmiers, Convergence infirmière, M. F...B..., le Syndicat national des audioprothésistes UNSAF, Mme C...G..., le Syndicat national autonome des orthoptistes, M. I...J..., la Fédération nationale des podologues, Mme D...E..., le Syndicat national des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs, M. K...H...et la Fédération française des praticiens de santé demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret n° 2017-1520 du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 ;
- la loi n° 2018-132 du 26 février 2018 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- l'ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 ratifiée par la loi n° 2018-132 du 26 février 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
1. Considérant que l'article 216 de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a autorisé le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi requises pour la transposition en droit français de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l'intermédiaire du système d'information du marché intérieur (" règlement IMI ") ; que l'ordonnance du 19 janvier 2017 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé a été prise sur le fondement de cette habilitation législative délivrée en application de l'article 38 de la Constitution ; que la Fédération nationale des orthophonistes et autres demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé, pris pour l'application des dispositions de cette ordonnance, qui ont été ratifiées et ont acquis valeur législative en vertu de l'article 2 de la loi du 26 février 2018 ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Sur le mécanisme d'accès partiel :
3. Considérant que les requérants soutiennent que les articles L. 4002-3-1 et L. 4002-4 à L. 4002-6 du code de la santé publique, issus de l'article 1er de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont contraires au droit constitutionnel à la protection de la santé, protégé par l'alinéa 11 du Préambule de la constitution du 27 octobre 1946 ; que ces articles ont pour objet de mettre en oeuvre, pour les professions de santé, le principe dit " de l'accès partiel ", dégagé en premier lieu par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne et repris par la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ; qu'ils permettent d'autoriser, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 4002-3, " un professionnel pleinement qualifié pour exercer, dans l'Etat d'origine membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, une activité professionnelle relevant, en France, d'une profession réglementée de santé " à exercer cette activité sur le territoire national lorsque " l'activité professionnelle pour laquelle l'intéressé sollicite un accès peut objectivement être séparée d'autres activités relevant de la profession en France " ;
4. Considérant que les dispositions critiquées s'appliquent, ainsi qu'il vient d'être rappelé, lorsque l'activité en cause peut être objectivement séparée d'autres activités relevant de la profession en France ; que, pour apprécier cette divisibilité, l'autorité compétente est invitée par les dispositions introduites par l'ordonnance au I de l'article L. 4002-3 du code de la santé publique à tenir compte " du fait que l'activité professionnelle peut ou ne peut pas être exercée de manière autonome dans l'Etat membre d'origine " ; que le II du même article, issu de l'ordonnance critiquée, prévoit que : " L'accès partiel peut en outre être refusé si ce refus est justifié par des raisons impérieuses d'intérêt général, s'il est propre à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et s'il ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif " ; que l'ordonnance introduit à l'article L. 4002-5 du code de la santé publique des garanties pour l'exercice en accès partiel d'une activité relevant d'une profession réglementée de santé, notamment l'obligation pour le professionnel concerné d'exercer " sous le titre professionnel de l'Etat d'origine rédigé dans la langue de cet Etat " et d'" informe(r) clairement les patients et les autres destinataires de ses services des actes qu'il est habilité à effectuer dans le champ de son activité professionnelle ", ces professionnels étant par ailleurs inscrits sur une liste distincte du tableau de l'ordre professionnel concerné ; que l'exercice d'une activité objectivement séparable des autres activités d'une profession de santé ne peut être accepté par l'autorité compétente que lorsque cette disjonction ne présente pas de risque pour les patients ; qu'il ne peut par ailleurs être sérieusement soutenu que, de manière générale, les activités des professionnels de santé telles que définies par la réglementation nationale formeraient nécessairement des ensembles indivisibles ; qu'eu égard à l'ensemble des garanties ainsi apportées, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise en oeuvre du principe de l'accès partiel pour les professions réglementées de santé serait en elle-même de nature à porter atteinte au droit constitutionnel à la protection de la santé ;
Sur les compétences linguistiques :
5. Considérant que l'article 3 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 modifie plusieurs articles du code de la santé publique relatifs aux diverses professions réglementées de santé afin de prévoir notamment, ainsi que l'exige la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013, que " le contrôle de la maîtrise de la langue doit être proportionné à l'activité à exercer et réalisé une fois la qualification professionnelle reconnue " ; que, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en tout état de cause, que la maîtrise de la langue française qu'implique l'exercice en France d'une profession de santé devrait nécessairement, pour que la protection de la santé publique soit garantie, faire l'objet d'un contrôle préalable à l'autorisation d'exercer ; que, s'agissant plus particulièrement de la profession d'orthophoniste, les dispositions qui viennent d'être citées sont insérées à l'article L. 4341-8 du code de la santé publique après un premier alinéa rédigé comme suit : " L'orthophoniste, lors de la délivrance de l'autorisation d'exercice ou de la déclaration de prestation de services, doit posséder les connaissances linguistiques nécessaires à l'exercice de la profession " ; que les dispositions législatives critiquées n'ont ni pour objet ni pour effet de déroger à ce premier alinéa en permettant l'accès à la profession d'orthophoniste de personnes qui ne justifieraient pas des connaissances linguistiques ainsi requises ; qu'il ne peut, dans ces conditions, être sérieusement soutenu qu'elles porteraient atteinte au droit constitutionnel à la protection de la santé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5 que la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de renvoyer cette question au Conseil constitutionnel, le moyen tiré de ce que les dispositions du code de la santé publique issues des articles 1er et 3 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
Sur les autres moyens de la requête :
7. Considérant, d'une part, que le pouvoir réglementaire ne serait, en tout état de cause, pas compétent pour exclure les professions réglementées de santé du mécanisme de l'accès partiel défini par la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ; que les requérants ne peuvent dès lors utilement reprocher au décret attaqué de ne pas avoir procédé à cette exclusion ;
8. Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que le " droit des partenaires sociaux à s'organiser ", évoqué au considérant 7 de la directive mentionnée ci-dessus, n'aurait pas été respecté n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;
9. Considérant, enfin, que pour les motifs indiqués au point 5 ci-dessus, les dispositions législatives relatives au contrôle de la maîtrise de la langue française par les professionnels de santé bénéficiant de la reconnaissance mutuelle ou de l'accès partiel ne sont pas contraires aux termes de la directive 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Fédération nationale des orthophonistes et autres.
Article 2 : La requête de la Fédération nationale des orthophonistes et autres est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Fédération nationale des orthophonistes, première requérante dénommée, au Premier ministre, à la ministre des solidarités et de la santé et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.