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Ariane Web: Conseil d'État 413088, lecture du 5 juin 2019, ECLI:FR:CECHS:2019:413088.20190605

Décision n° 413088
5 juin 2019
Conseil d'État

N° 413088
ECLI:FR:CECHS:2019:413088.20190605
Inédit au recueil Lebon
9ème chambre
M. Nicolas Agnoux, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
CABINET BRIARD, avocats


Lecture du mercredi 5 juin 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Le groupement d'intérêt économique (GIE) Groupe Vauban a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de la cotisation de taxe d'habitation à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013 à raison d'un immeuble situé 9, rue Desmazières à Lille (Nord). Par une ordonnance du 6 janvier 2017, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a transmis la demande au tribunal administratif de Montreuil. Par un jugement n° 1538368 du 1er juin 2017, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 août et 3 novembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis venant lui-même aux droits du GIE Groupe Vauban demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat du GIE Humanis Fonctions Groupe.



Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative: " Sans préjudice de l'application des dispositions spécifiques à certains contentieux prévoyant que l'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public, le président de la formation de jugement ou le magistrat statuant seul peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience sur tout litige relevant des contentieux suivants : (...) 5° Taxe d'habitation et taxe foncière sur les propriétés bâties afférentes aux locaux d'habitation et à usage professionnel au sens de l'article 1496 du code général des impôts ainsi que contribution à l'audiovisuel public ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que le rapporteur public ne peut être dispensé de prononcer des conclusions dans un litige relatif à une taxe d'habitation pour des biens dont la valeur locative n'a pas été déterminée en application de l'article 1496 du code général des impôts. Ainsi, la dispense de conclusions permise par les dispositions de l'article R. 732-1-1 précité ne peut s'appliquer au jugement d'un litige portant sur des locaux affectés à une activité commerciale ou industrielle, évalués respectivement selon les méthodes prévues à l'article 1498 et à l'article 1499 du code général des impôts.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les locaux commerciaux litigieux ont été évalués selon la méthode prévue à l'article 1498 du code général des impôts. Dès lors, le rapporteur public ne pouvait être dispensé de prononcer des conclusions sur la demande du GIE Groupe Vauban tendant à la décharge de la cotisation de taxe d'habitation à laquelle il avait été assujetti au titre de l'année 2013 à raison de ces locaux. Le jugement attaqué, intervenu à l'issue d'une audience qui n'a pas donné lieu au prononcé de conclusions, a été rendu au terme d'une procédure irrégulière. Par suite, le GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis, lui-même venant aux droits du GIE Groupe Vauban, est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, à en demander l'annulation.

3. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

4. Il résulte de l'instruction que l'avis d'imposition concernant la taxe d'habitation relative aux locaux commerciaux situés 9, rue Desmazières à Lille au titre de l'année 2013, a été établi au nom du GIE Groupe Vauban. Or, l'extrait K-bis produit à l'appui du mémoire en réplique enregistré le 20 octobre 2016 fait apparaître que le GIE Groupe Vauban a été dissous le 1er janvier 2006 à la suite d'une fusion-absorption qui a donné lieu à la constitution d'un nouveau groupement dénommé Vauban Humanis. Par suite, le GIE Groupe Vauban qui n'était plus le redevable légal de l'imposition en litige, et aux droits duquel vient le GIE Humanis Fonctions Groupe, est fondé à en demander la décharge.

5. Toutefois, aux termes du premier alinéa du II de l'article 1413 du code général des impôts : " Lorsque, au titre d'une année, une cotisation de taxe d'habitation a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal de l'impôt, l'imposition de ce dernier, au titre de la même année, est établie au profit de l'Etat dans la limite du dégrèvement accordé au contribuable imposé à tort. " Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge de l'impôt qui constate qu'une cotisation de taxe d'habitation a été établie au nom d'une personne autre que le redevable légal d'en prononcer la décharge et de désigner, même en l'absence de toute demande des parties, le redevable légal de cette imposition au vu des éléments portés à sa connaissance et après l'avoir mis en cause.

6. Il résulte de l'instruction, en premier lieu, que le ministre a soutenu, sans être contesté, que le GIE Vauban Humanis, issu de l'opération de fusion absorption mentionnée au point 4, occupait les locaux en litige au 1er janvier 2013 ainsi qu'il ressortait d'une déclaration souscrite le 8 juillet 2013 par le propriétaire de ces locaux, la SCI Vauban Siège. En second lieu, le GIE Vauban Humanis a été radié le 29 avril 2013 du registre du commerce et des sociétés à la suite de sa scission en trois nouveaux GIE dont le GIE Humanis Fonctions Groupe, avec prise d'effet le 1er janvier 2013. Dès lors que le GIE Humanis Fonctions Groupe se présente devant le juge de l'impôt comme venant aux droits du GIE Vauban Humanis, l'imposition en litige doit être mise à la charge du GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.



D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 1er juin 2017 est annulé.
Article 2 : Le GIE Groupe Vauban aux droits duquel vient le GIE Humanis Fonctions Groupe est déchargé de la cotisation de taxe d'habitation correspondant à l'immeuble situé 9, rue Desmazières à Lille à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2013.
Article 3 : La cotisation de taxe d'habitation correspondant à l'immeuble situé 9, rue Desmazières à Lille au titre de l'année 2013 est mise à la charge du GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis.
Article 4 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis, lui-même venant aux droits du GIE Groupe Vauban, sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au GIE Humanis Fonctions Groupe venant aux droits du GIE Vauban Humanis, lui-même venant aux droits du GIE Groupe Vauban et au ministre de l'action et des comptes publics.